Défi #297
Une photo pour vous inspirer :
Nous attendons vos "feuilles" à
samedidefi@gmail.com
A tout bientôt !
Semblent connaître la musique...
Epamine ; Minuitdixhuit ; Fairywen ; Joe Krapov ;
Nhand ; Lorraine ; EnlumériA ; EVP ; bongopinot ;
Vegas sur sarthe ; Pascal ; Walrus ; Venise ;
Mamido ; Zigmund ; KatyL ; JAK ; Djoe L'Indien ;
joye ; Prudence Petitpas ; Caro_Carito ; Célestine ;
The river dances forever (Célestine)
Aparté (Caro_Carito)
Il lui reste une heure. Excepté sa Fender fétiche, toutes ses guitares ainsi que son costume de scène doivent déjà se trouver dans sa loge. La balance est au cordeau depuis le début de l’après-midi. Il a déjà sifflé son litre de Benriach 19 ans d’âge, le seul assez efficace pour évacuer le stress à venir de la scène ; l’autre litre lui est camouflé dans une banale bouteille derrière son ampli et lui fera tenir les heures de concert, les sauts, les déhanchés, les solos qui n’en finissent jamais. Et pas que la gnôle d’ailleurs, mais ça… cela appartiendra à la légende.
Oui, Barbara, sa fidèle assistante et ex-p.. de femme a sûrement assuré comme d’habitude. Leur divorce lui avait coûté une baraque et la moitié d’une île. Une Harley aussi. Mais il y avait gagné la paix et une partenaire à toute épreuve.
Oui, la paix. Un coup d’œil dans le salon aux murs ornés de fusils, de disques d’or, d’une tête d’orignal empaillé. Il y aussi un bar chargé de fûts de bière, de bouteilles vides, de restes de fêtes et un immense canapé en cuir usé par la ribambelle de pin-up carrossées qu’il a culbutées, seule ou en compagnie.
Il s’enfonce dans le vieux fauteuil, celui qu’il n’a jamais remplacé depuis plus de quarante ans. Il est 17 h 30, aucune chance que qui que ce soit ne s’aventure à le déranger. Il attrape la télécommande de sa chaîne dernier cri et fait taire les feulements de guitare. Soudain, il n’entend plus que les crépitements du feu. Il se lève, sort de sa pochette un vieux vinyle et retourne s’asseoir pendant que les premières notes de l’album se saisissent de chaque parcelle de la vaste maison. Un son friable, au toucher délicat, fragile. Il ferme les yeux.
Cinq minutes et neuf secondes, solitaires, honteuses, jouissives. Un concerto italien de Bach, inoubliable, inavouable, qu’il savoure les yeux fermés, juste avant que Jasper, leur chauffeur, passe le prendre à 174h5. Cinq minutes neuf secondes d’un plaisir interdit, tatoué plus sûrement sur son corps que les dessins qui ornent ses bras et son torse.
Il a rangé le disque, l’a dissimulé dans une fente que seul lui connaît, caché la platine. Il soulève sa carcasse sanglée de cuir. Il sent l’alcool qui lentement lui donnera l’envie de bouger, courir, faire hurler ces mélodies qui résonneront dans les corps de la foule massée devant eux. Il sait aussi que, quand il entamera un de ses solos, chaque note de Bach se faufilera dans ses riffs, prolongeant la mélodie plus loin que le succès, l’orgueil, l’argent ou la drogue ne le feront jamais.
Participation de Prudence Petitpas
Musique Maestro…
S’envoler sur une partition
Comme j’aimerais connaître la chanson
Qui permet de s’évader de prison
Et d’échapper aux tourbillons…
Une note, deux notes, trois notes
Et je m’envole, je me dérobe
Je prends le large, je suis la côte
Je ne rentrerai pas à l’aube …
Ecole buissonnière
Serais-je la première
A voler ainsi le temps
De juste quelques instants
D’arrêt sur le piano
D’écouter jouer le beau
De sauter dans l’abîme
Sans avoir le vertige
De monter à la cime
Aller jusqu’à la tige
D’une escapade d’un soir
D’une balade dans le noir
Et ne jamais vouloir
Repartir, revenir
Sans même vraiment savoir
Où je vais pour m’enfuir…
Alors : Musique Maestro !
Maestria (Djoe L'Indien)
Eh, maestro ? Musique ! Egrène donc tes notes,
La place ensoleillée est là toute pour toi
Et les premiers badauds déjà on aperçoit !
Sors tout ton attirail, fais valser tes menottes
Sur la touche d'ébène, enchantes les pavés !
De la ronde pointée à la croche au moins triple,
De ta partition folle ébauche le périple,
Sur un doux lamento commence à t'échauffer...
Quelques premiers curieux s'arrêtent sur la danse,
Nonchalante d'abord, qui s'élève dans l'air ;
Une fillette approche, ouvre ses grands yeux clairs,
Se met à doucement balancer en cadence.
Le parvis se remplit au matin tremblotant,
Le rythme s'accélère... Une femme s'invite
Qui entame un ballet, la fillette l'imite
Et les voici tournant en temps et contretemps.
Quelqu'un dans le public se met des mains à battre,
Le musicien joyeux dès lors change de ton :
Une volte mineure emporte les piétons
Et la femme toujours sous sa robe d'albâtre.
Là s'envolent les doigts tout en notes d'argent,
Sur les cordes tirant ou martelant la table
Entraînant le pas leste au rythme inimitable ,
Et la voici volant pirouettant voltigeant !
La musique tournoie, envahit l'esplanade,
La foule alors se fige observant ces deux-là
Qui la vivent si fort et avec tant d'éclat,
Que la fillette aussi cesse ses galopades ;
Il n'est plus de vivant qu'elle et le musicien
Sur le pavé luisant que le soleil inonde,
Que caressent les pas bien dix fois par seconde
Suivant l'allegretto de l'adroit magicien...
Après une sublime et dernière envolée,
La musique se tait, la belle disparaît !
D'elle ne reste plus que le parfum discret
Qui ondule parmi l'audience médusée...
Mélomane sans les notes….. ♪♫ (JAK)
Mélomane sans les notes….. ♪♫
Oh ! Jean Philippe Rameau j’aime lorsque tu ‘claveçones’
Quand tu m’emmènes en cortège endiablé de chaconne
Je danse et rêve dans ce moment, moi midinette
D’être dans la robe de Marie Antoinette
Mais cet instant nostalgique, avidement bu
S’anéantit aussitôt quand radio s’est tue.
Alors
Je songe un instant, que si je t’avais connu,
Du haut de ton archet, avec dédain, tu m’aurais mesurée,
Moi simple soubrette qui rinçait de l’orchestre le parquet
Mais foin de toute morosité, la chose en est certaine
Ta musique m’enchante et m’enlève, moi vaine linotte
Tant pis que je n’en puisse savoir lire les notes……♪♫
Trois pianos et un basson (Zigmund)
(un petit retour éclair aux défis parce que la consigne #296 me plait )
Le piano trônait en bonne place dans le salon, il était pour moi.
J'ai eu du mal à comprendre pourquoi, alors que j'avais opté pour la harpe, mes parents avaient choisi le piano.
Comme j'étais un garçon docile, quoique peu doué, j'ai suivi sagement les cours de solfège du conservatoire.
Je me souviens qu'à l'examen oral de fin d'année mon prof a murmuré à l'un des examinateurs que malgré mon niveau assez minable, ce serait mieux de me faire passer dans la classe supérieure et de me laisser commencer le piano.
Il avait raison, le résultat de l'examen n'avait déjà plus aucune importance : je savais tapoter le début de la toccata de Bach ... et nous sommes partis sans retour possible en abandonnant le piano et la maison avec.
Par la suite, je retrouve un nouveau piano et je reprends l'étude avec un nouveau professeur. Je découvre les gammes de la méthode Hanon... je dois être maso ... j'aime ce genre d'exercices qui vident la tête et j'aime aussi étudier le solfège. Je malmène les classiques : le gai laboureur, la lettre à Elise, le concerto d'Albeniz et une polonaise de Chopin, mais je refuse de jouer la marche turque de Mozart que j'écoute en boucle de peur de l'abimer.
Dans une cage près du piano un mandarin chante dès que je me m'installe devant l'instrument.
Les années passent, mes progrès sont faibles, mon prof est trop coulant, mes études ont pris le dessus.
C'est ma grand mère qui prend ma place : elle chante dans un dialecte arabe-hébreu les chansons de Lili Bonniche ou de Reinette l'Oranaise ...et toute ma vie je m'en voudrai de ne pas avoir enregistré et photographié ces moments de grâce.
Une fois de plus, je laisse mon piano derrière moi pour plonger dans les études de médecine.
Bien plus tard, les sous me manquent pour racheter un piano, en attendant, je reprends à zéro les études de solfège, et je loue un basson ...
La maison résonne d'opéras, de musique baroque, ou contemporaine ; je me fais régulièrement la promesse de travailler plus sérieusement, mais le temps se rétrécit.
Le piano qui revient un jour dans la maison est un cadeau posthume de ma grand mère. Sa photo est posée en permanence sur l'instrument.
Reste cette émotion intacte quand je regarde cette image que j'essaie maladroitement de retrouver sous mes doigts les musiques de ma jeunesse et que je pense à ce premier piano resté de l'autre côté de la mer.
(https://www.youtube.com/watch?v=J7TNPXwnOXI)