Participation de Prudence Petitpas
Après maintes ruses plus ou moins légales et honnêtes de notre bon gros matou, ce chat fatigué, usé, découragé n’arrivant toujours pas à attraper cette satanée souris, qui ne le ménage pas et lui envoie des pieds de nez à longueur de journée, n’en peut plus de cette chasse et catastrophé par ses piteux résultats, se désole sur son sort : il ne mange plus, ne dort plus, il déprime complètement et plus rien ne l’intéresse, même la télé, ne le concerne plus, encore moins les dessins animés de ce bêta de gros Tom auquel il ne veut surtout pas s’identifier… Il pleure donc sur son sort, et maigrissant à vue d’œil, notre adorable souris ne le reconnaît pas, et trouve le jeu un peu trop ennuyant depuis que son matou préféré ne s’intéresse plus à elle….
De son trou de gruyère, elle le voit se morfondre et se demande comment rendre l’énergie et la bonne humeur à ce chat décomposé … quel drame que de perdre son meilleur ennemi, sans avoir terminé la partie.
Un jour, pleine de courage, elle s’approche de lui, sur ses gardes tout de même, de peur que cette accalmie ne soit qu’un piège de la part du matou, elle n’est plus qu’à quelques centimètres du museau dont les crocs reluisent au soleil, mais dont la réaction se fait attendre, en effet, de sa léthargie, il n’est même pas sorti, et les yeux mi clos, il semble bien ailleurs, ce pauvre petit chat malade…
Tellement enfoui dans ses pensées, il ne s’aperçoit pas que l’être tant désiré est si proche de lui, et que de ses petits bras croisés, elle le toise et se demande comment le faire réagir… faisant le tour de sa tête de la pointe de ses petites pattes, la souris, grimpe délicatement sur la pelage du chat, qui ne se retourne pas, tant il est déprimé et sans réaction. Puis prés de son oreille, de sa petite voix, elle se met à lui parler tout doucement, feignant de n’être que sa conscience. Le gros chat ferme les yeux, et se croyant dans un rêve écoute distraitement cette petite voix venue de nulle part et qui lui dit quelques mots du genre : gros matou, petit chat de gouttière, ton plus grand désir n’est-t-il pas d’attraper cette petite coquine de souris, et de la croquer toute crue ? Ne vois-tu pas que ce jeu t’épuise et qu’elle est bien plus forte que toi ?
Le chat dans son semi sommeil, lâche quelques larmes et la souris pleine de remords se penche plus avant vers son oreille : je te propose un deal : tu commences par limer tes grosses griffes trop pointues, ensuite, tu râpes tes crocs venimeux contre un mur bien crayeux, puis, tu oublies ta fierté de gros matou dodu, et tu deviens tout doux comme un agneau, tout gentil comme un ange, tu me ménages une petite place entre tes grosses pattes de velours, où je me loverai alors, délicieusement, sereinement, ne craignant plus rien de tes actes, puisque la violence serait bannie de ta personnalité. Tu m’apporterais chaque jour, un morceau de fromage, gruyère ou parmesan, et même du saint Marcellin, ou une bûche de chèvre dont je raffole, puis tendrement tu lécherais de ta langue râpeuse juste comme il faut ma petite frimousse, tous les matins, afin de me réveiller en douceur, et de me laisser m’étirer de plaisir après chaque petite sieste… Tu me caresserais de tes moustaches délicatement sur tout le corps et murmurerais des mots tout doux dans le creux de chaque oreille, mais sans les mordiller, ou alors seulement quand tu sentirais le moment pour le faire, et puis tu ronronnerais de temps en temps, mais pas trop fort, pour ne pas m’empêcher de dormir, juste comme une berceuse, et je fermerais les yeux de douceur, et rêverais aux mille merveilles que j’aimerais que tu me fasses encore….
En échange : je te laisserais m’attraper délicatement de tes deux grosses papattes, et tu pourrais m’avoir constamment à tes côtés, quand tu te lasserais de m’avoir si près et de ne plus faire d’exercice, je ferais semblant de m’échapper, te donnerais juste le fil à retordre qu’il faut pour que cela reste un jeu, et je te laisserais de nouveau me prendre à ton piège, comme une petite souris docile que tu croirais avoir domptée…
Toujours endormi, le chat opine de la tête, le contrat est signé, il est d’accord sur tous les termes, la souris est à lui….
Le chat entrouvre les yeux, son odorat ne le trompe pas, c’est bien une souris qu’il sent et ce rêve bizarre qu’il vient de faire ! Il se retrouve tout penaud, tout étourdi comme si une souris lui avait grimpé sur lui pendant la nuit, comme si une petite bestiole de rien du tout, était là sur son dos et lui parlait à son oreille, comme si…. Et à ce moment là, Tom voit Jerry le toiser de haut, enfin plutôt notre gros chat se retrouve devant la plus merveilleuse des souris, à deux mini-mètres de son nez, et comble des souris, elle lui sourit… Il tend un peu la patte, n’y croyant pas, se pince de l’autre le museau, souhaitant ainsi finir ce rêve, mais elle n’a pas bougée, elle est toujours là, le sourire aux lèvres, le regard bizarre, comme si elle était d’accord pour se faire attraper. C’est un piège se dit le félin, dès que je vais tenter une approche plus directe, elle va s’envoler comme une bombe et je vais encore me faire ridiculiser par ce petit bout de rien du tout, à moins que, à moins que…Il ouvre alors la gueule dans l’espoir de la voir s’y engouffrer, et la souris s’approche de ses grosses dents pointues, sans frayeur dans le regard, sûre d’elle, elle ose même lui dire : bonjour mon gros matou chéri, alors bien dormi ? Croyant qu’elle se moque, le chat referme la gueule sur cette effrontée, mais au moment où il croit la croquer il entend à nouveau dans le creux de sa conscience les termes du contrat, que distrait il a signé… Il desserre alors les crocs et mal à l’aise sourit à cette impertinente, qui bien que vaillante, commençait à croire au pire… Mais se reprenant très vite, elle lui susurre : je suis à toi, dans les termes du contrat, notre deal est en place, montre toi correct et je ferai de même, ne te dérobe pas à ta promesse et nous allons vivre tous les deux des moments plus que fabuleux dans le respect de chacun et peut être plus si affinité…
Et le chat et la souris vécurent heureux pour le restant de leur vie, ils ne firent pas d’enfants, de peur de perturber à nouveau les concessions faites ensemble et de réinstaller entre eux et leur progénitures leurs instincts sauvages.
Il ne serait pas de bon augure qu’un gros matou mange son petit sous prétexte qu’il ressemble à sa mère….
Et voici pour Katyl, notre beau matou au fusain, que j’ai eu beaucoup de plaisir à peindre…