Debout vous avez dit ? (Walrus)
Comme il est convenu, nous commencerons par "Il était une fois". Encore qu'à la réflexion, ce soit vraiment trop convenu. Commençons donc plutôt par "Il sera une fois" ça nous changera (une fois) (à croire que tous les conteurs sont belges) !
On se souviendra que la petite marchande d'allumettes, laquelle, contrairement à Lisbeth Salander, était dépourvue de bidon d'essence, avait fait feu de tout bois en entassant du carton ondulé devant la porte d'une célèbre maison d'édition.
N'importe quel criminel averti, une fois (encore !!!) son forfait accompli, eût détalé vite fait pour ne pas éveiller les soupçons des membres des corps de police et de pompiers réunis pour l'occasion en un corps-à-corps échevelé face à l'incendie, les uns écartant les badauds, les autres tout feu tout femme flamme livrés à leur activité d'extinction.
Telle ne fut pas l'attitude de la petite marchande d'allumettes réduite au chômage par la derstruction de son ultime bâtonnet incendiaire.
Elle n'allait quand même pas s'éloigner de cette merveilleuse source de chaleur, colossale amplification de l'étincelle née dans son esprit !
Aussi était-elle grimpée dans un des arbres agrémentant le large boulevard où la maison d'édition avait établi ses pénates.
Dieux (ben oui, les Pénates, vous suivez ou quoi ?), "Divinités domestiques, au nombre de deux, qui, chez les Étrusques et les Romains, veillaient à la prospérité de la famille et dont l'autel était le foyer de la maison" (là je cite le TLFI) dont l'autel sur le foyer de l'immeuble constituait un fameux risque d'incendie. Ils auraient couru moins de danger en y établissant simplement leur siège social.
On ne dira jamais assez l'importance des choix posés (comme un siège) lors de la fondation (j'allais dire le fondement, suis-je bête) d'une entreprise.
Revenons plutôt à notre histoire. Les hommes du feu (je ne parle pas du personnel de l'éditeur très récemment décédé vu qu'il avait péri dans l'incendie étant venu nuitamment trafiquer la comptabilité pour s'en mettre plein les poches,
Mais des vaillants pompiers dont on sait pertinemment qu'un léger pourcentage est composé de pyromanes) les hommes du feu, donc, allaient avoir du boulot en raison même de la nature de la marchandise stockée partout dans l'établissement,
Il suffit d'avoir lu les aventures de Pépé Carvalho par le regretté Manuel Vázquez Montalbán ou "Les Combustibles" de notre Amélie Nothomb nationale, tellement célèbre qu'on la regrette déjà avant qu'elle ne soit morte, pour s'en convaincre.
Raisonnablement, notre héroïne pouvait donc espérer passer la nuit bien au chaud, du moins pour la face exposée au brasier,
Dos bien calé contre une branche montant en pente raide vers le ciel étoilé.
Etoilé, oui, car le vent poussait les sombres fumées de l'incendie vers l'arrière du bâtiment.
Bonne nuit les petits ! S'écria-t-elle, in petto car elle ne voulait pas attirer l'attention sur sa maigre personne,
Option bien improbable au vu du ronflement puissant de la fournaise et de la profondeur de l'implication des pompiers dans leur lutte courageuse,
Une de leurs préoccupations majeures étant d'éviter que le feu se propage à tout ce quartier chic, ce qui ne manquerait pas de leur valoir la reconnaissance des propriétaires et autres assureurs.
Tout est bien qui finit bien, pensa-t-elle en fermant les yeux (qu'elle avait fort jolis), on se croirait dans un conte. Dommage qu'à cause de cette branche, je doive dormir debout...