26 octobre 2013
Tante Marguerite (Vegas sur sarthe)
Monsieur Barcoule était si ennuyeux que la classe l'avait surnommé Barbacole, un nom que Bébert avait parait-il déniché sur l'ordi de son vieux, Willy.
Willy Pédia! Tu parles d'un nom! Bébert Pédia, passe encore...bref, on s'en fout.
Donc Barbacole, notre prof de physique-chimie - alias La Touffe - à cause de cette houpée d'indomptables cheveux roux qui lui faisait une crête de coq - nous avait refilé un devoir de ouf pour les vacances de Toussaint:
A partir de sa structure atomique amorphe, déterminer le poids d'un canal de fulgurite creux de 9cm de diamètre et 15 cm de longueur...
Déterminer quoi? Personnellement j'étais d'abord déterminé à profiter de mes vacances et de ce projet de cabane qu'on repoussait chaque année mes cousins et moi.
Cette fois, les tempêtes hivernales avaient rapporté sur la grève tous les matériaux qui manquaient à notre construction:
un stock de palplanches arrachées à quelques berges du Rhône par un plaisancier maladroit et surtout assez de cordages et de virebouquets pour assembler tout ça.
La fulgurite creuse du père Barcoule pouvait bien attendre mais moi, sans attendre les cousins je commençai à établir les plans de notre cabane.
Je n'en étais encore qu'à l'ébauche lorsque la foudre - fort à propos eut dit Barbacole - arriva, enveloppée dans son éternel balandran qui la faisait ressembler à une cloche de plongeur et deviner à cinq cent mètres.
Tante Marguerite débarquait, lestée de son inséparable cartable en youfte - mot dont j'eus le plaisir de copier deux cent fois la définition : Cuir de Russie à l'huile de bouleau - pour m'en être moqué!
Notre chère tante Marguerite - que nous aimions un peu, pas du tout, pas du tout, pas du tout - venait une fois de plus de faire capoter notre beau projet.
Institutrice en retraite - trop heureuse de reprendre du service avec ses neveux - elle avait flairé la fulgurite en dix secondes, digéré l'intitulé de l'exercice avec ce petit rire sarcastique propre aux sadiques et établi notre plan de travail sans même nous consulter.
De toute manière, notre avis lui importait peu et je compris aussitôt que l'aide de Willy Pédia, le père de Bébert et son ordi nous seraient d'un grand secours.
Cette nuit cauchemardesque là, tante Marguerite se crasha à deux cent mille kilomètres à l'heure sur notre cabane ensablée, faisant fondre à trente mille degrés nos palplanches et nos virebouquets pour n'en laisser qu'un ridicule petit tas de verre...
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