Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le défi du samedi
Visiteurs
Depuis la création 1 050 253
Derniers commentaires
Archives
18 août 2012

Petit frère (Adrienne)

- Va chercher un pain, dit-on à la petite en lui tendant quelques pièces.

Parfois c’est le montant exact. Alors on lui dit :

- Fais attention à ne pas perdre la monnaie !

Parfois c’est un billet. Mais dans ce cas on lui dit la même chose. Au ton qu’on emploie, elle a compris que perdre le billet est encore plus grave.

Ce qu’on ne manque jamais non plus de lui dire, c’est :

- Et demande-le bien cuit !

Toutes ces précautions sont inutiles : c’est toujours la petite qui va au pain, jamais elle n’a perdu la moindre piécette, ni à l’aller, ni au retour – elle les serre toujours bien fort dans son poing fermé – et jamais elle n’oublie de préciser à la boulangère, une fois son tour venu :

- Un grand pain, s’il vous plaît, bien cuit !

D’ailleurs elle se dit que la boulangère doit savoir elle aussi, depuis le temps, ce que la petite va lui demander…

Puis elle se dépêche de rentrer, en tenant le grand pain rond et lourd serré contre elle d’une main et la monnaie dans l’autre. Des nuages de farine resteront collés à ses vêtements, mais elle n’y peut rien. Elle espère qu’on comprendra.

A la maison, on retourne tout de suite le pain pour en vérifier la croûte :

- Tu n’as pas oublié de demander du bien cuit ? fait-on d’un air soupçonneux.

Car souvent on trouve qu’il n’est pas assez brûlé.

« Brûlé », bien sûr, c’est le mot que pense la petite. Elle ne comprend pas pourquoi les grandes personnes tiennent tellement à ce que la croûte soit quasiment noire.

Mais ces derniers temps, elle a un problème plus grave à résoudre que celui de la couleur des croûtes. Désormais le petit frère, qui a trois ans, veut l’accompagner à la boulangerie.

- Je préfère y aller toute seule, dit-elle à sa mère.

Mais le petit frère ne lâche pas prise. Elle est bien obligée de l’emmener.

Avec lui, rien n’est simple. D’abord, il faut le tenir solidement par la main. Il est imprévisible et la route est dangereuse. Au retour, il faut porter le pain, bien garder la monnaie, tenir le petit frère. La petite aurait besoin de trois mains.

Puis, à la boulangerie, il la fait rougir de honte :

- Je peux avoir un bonbon ? demande-t-il bien fort à la boulangère.

- Tu ne peux pas demander de bonbons, lui explique tout bas la petite, cramoisie. Ce n’est pas poli.

Mais le petit frère fait la sourde oreille. Elle a beau le sermonner, si la boulangère n’est pas assez rapide pour lui tendre un caramel, il s’écrie :

- Je peux avoir un bonbon ?

Les efforts éducatifs de la petite finissent tout de même par produire leur effet. Au bout de quelques semaines, alors qu’elle tend la main pour recevoir la monnaie, le petit frère se tourne vers elle et lui dit :

- Je suis sage, hein ? Je n’ai pas demandé de bonbon !

Publicité
Commentaires
A
maintenant je le cuis moi-même, MAP ;-) et non, je n'aime toujours ni le goût ni l'odeur de brûlé ;-)<br /> <br /> (si je commence les anecdotes du petit frère, faut que j'ouvre un second blog ;-))<br /> <br /> merci et bonne journée!
Répondre
M
Et depuis cet épisode de l'enfance demandes-tu toujours du pain bien cuit ?????<br /> <br /> Sacré petit frère qui en fait voir à sa grande soeur !!!!
Répondre
A
ah tu crois? je n'y aurais jamais pensé moi-même, Walrus ;-) tu me mets sur une piste intéressante, je vais envoyer ma mémoire de ce côté-là ;-)
Répondre
W
C'est donc de là que t'est venue la vocation d'enseignante-éducatrice !
Répondre
A
deux francs? moi je ne me souviens pas du prix... j'avais le même âge et je n'imagine pas de nos jours une mère de chez nous envoyer seul son enfant de six ans acheter un pain ;-)<br /> <br /> merci Anémone et bon dimanche!
Répondre
A
Je retiens cette fois, en plus d'un petit frère encombrant, la sévérité et une pénible lourdeur dans le comportement des parents. Comment peut-on prendre plaisir à une tâche si elle se déroule dans la même ambiance dirigiste et sans compréhension pour l'intelligence de l'enfant? Tu en as retenu surtout ce côté répétitif du manque de confiance des parents. et je suppose qu'à l'époque il n'était pas pensable de répondre qu'ils l'avaient déjà dit et qu'on n'avait jamais rien perdu et toujours rapporté le pain bien cuit (pour ne pas parler encore du goût discutable et peu sain très bien perçu par la petite fille pour les croûtes noires!).<br /> <br /> Je me souviens que la première chose que j'aie pu faire seule était aller chercher le pain, car il ne fallait pas changer de trottoir. J'avais peut-être 6 ans et le pain coûtait 2 francs belges, ça je m'en souviens bien.
Répondre
A
merci Célestine, tu vas me dire qu'en Belgique on est en retard d'une dizaine d'années LOL ;-)
Répondre
C
oups ici: http://fr.wikipedia.org/wiki/Jeux_interdits
Répondre
C
Oui, c'est très mignon, on dirait un film des années 50 avec Brigitte Fossey et Georges Poujouly...<br /> <br /> ICI
Répondre
A
ah oui Mamido, la responsabilité pèse lourd et on n'aime pas ne pas satisfaire aux exigences ;-)<br /> <br /> <br /> <br /> merci à toi, Joye<br /> <br /> <br /> <br /> merci EVP<br /> <br /> <br /> <br /> merci Venise<br /> <br /> <br /> <br /> bone soirée à tous!
Répondre
V
http://maud96.cowblog.fr/enfant-a-la-baguette-2904049.html<br /> <br /> très visuel ce récit comme cette photo!!
Répondre
E
Un bien joli souvenir que tu nous confies, comme j'étais fière d'aller chercher le pain toute seule ! Délicieux !
Répondre
J
Adorable !<br /> <br /> <br /> <br /> Ce n'est pas la première fois que tu nous confies ton petit frère et c'est encore super beau.<br /> <br /> <br /> <br /> Merci !
Répondre
M
Un jour, ma future belle-soeur qui à l'époque avait onze ans a fait tomber le billet de 5 francs dans la bouche d’égout en allant chercher le pain. La honte, juste le jour où son grand frère venait présenter sa fiancée!!! Elle en parle encore!
Répondre
A
merci KatyL
Répondre
K
pour la grande soeur!<br /> <br /> pour le gamin aussi bravo ! et des dents cariées en moins!<br /> <br /> bisous<br /> <br /> katyL
Répondre
Newsletter
Publicité
Le défi du samedi
Publicité