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Le défi du samedi
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17 mars 2012

LA MADELEINE DE PROUST (Lorraine)

               Hier sans raison me revint soudain en mémoire un refrain idiot et lancinant que les ondes de Radio-Toulouse lançaient jadis aux « chers auditeurs » juste avant le feuilleton du soir.

                « Je suis le Bonhomme en bois, mes meubles sont ceux qui plaisent, allez voir Boul’vard Barbès au coin de la rue là-bas….Ah ! ah ! Je suis le Bonhomme en Bois… »

                Et bientôt, machinalement, je me laissai emporter par le tempo. Il m’entraînait, il voulait me dire des choses à n’en pas douter et accablée, ne sachant où j’en étais, j’allais ouvrir la télévision pour échapper à mon obsession quand je tressaillis. Un plaisir délicieux m’envahit, isolé, dont pourtant j’ignorais la cause ! Mais je savais qu’en cet instant rien ne valait cette émotion suprême, inexpliquée et pourtant intense, effaçant d’un trait ma fatigue, les aléas de la vie, les pérégrinations de mon âme.  J’étais soudain d’une essence supérieure, une joie puissante me portait, liée intimement au « Bonhomme en Bois » et me transcendait.

                Je me tournai vers mon esprit : allait-t-il me dire pourquoi cette extase, cet engouement imprévu, ce besoin de réentendre la musiquette source d’une féiicité qui pourtant semble s’amenuiser et que je veux passionnément faire réapparaître. Je veux revivre l’apothéose qui doit m’ouvrir d’autres portes, j’en suis convaincue. Je me concentre au prix d’un effort surhumain et je chante à mi-voix, en scandant bien les paroles « Je suis le Bonhomme en Bois, mes meubles sont ceux qui plaisent… ». Je fais le vide, j’entends une rumeur, un vague souvenir se dessine, je vais l’atteindre mais il m’échappe . O dieux ! arrivera-t-il à la surface de ma conscience, ce souvenir, ce rien, cette explosion insensée ?...

                Et soudain, une voix nasillarde me crie à l’oreille : « Et maintenant, chers auditeurs, voici votre feuilleton quotidien : « Le mystère de la Chambre Jaune… ». J’y suis, un bien-être immense m’enveloppe. J’ai six ans et j’ai peur. Ah réminiscences !

                Proust avait goûté ; moi j’ai entendu. Nous sommes pourtant exactement pareils.

                Vous reprendrez bien une petite madeleine ?

 

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Commentaires
S
La lecture de ton texte a provoqué un déclic chez moi et du coup je revois aussi ce grand poste de TSF avec son œil magique vert comme évoqué par Walrus.<br /> <br /> C'était bien avant le transistor et l'atmosphère était différente. <br /> <br /> Chez nous c'était mon père, ce vicelard, qui avait la télécommande. Je veux dire qu'il était le seul à avoir le droit de toucher aux réglages. Quand le son commençait à crachoter ou à siffler ou quand la distorsion le rendait inaudible, il se levait pour recaler la fréquence en tournant les boutons (c'est à ce moment-là que je collais mes poireaux sous la table... déclic et des claques !)<br /> <br /> <br /> <br /> Merci pour cette belle page de souvenirs Lorraine.
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L
Sans pansement, tes doigts ont retrouvé leur agilité! je crois qu'à l'idée de la "madeleine", Walrus est sorti de ses gonds avec une vigueur que j'admire! Mais apparemment il s'est repris et compte nous régaler à nouveau de ses formules lapidaires. Ne le lui dis pas, (il pourrait se pousser du col!) mais j'aime ses deux façons de commenter!
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L
Tout juste, MAP, ils sont restés dans nos mémoires et c'est en parlant de Marcel Proust qu'ils réapparaissent! Etonnant détour! Si le Grand Homme savait par quels sentiers aussi tortueux que ses phrases nous en sommes arrivés là, il rougirait d'indignation!...
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L
Nous ne poussions pas l'amour jusqu'à emmener notre poste en vacances!...Mais ce fut notre premier achat de jeunes mariés! C'est dire comme l'information parlée;nous passionnait, beaucoup plus que celle de la télévision qui nous montre les horreurs quotidiennes sous toutes ses formes! je ne me souviens plus non plus par où l'agresseur était entré; par la pore, il me semble, mais à quel moment?...Il faudra que je relise la chambre Jaune, livre éminemment essentiel à tout lecteur passionné. <br /> <br /> Par contre, je n'aime pas non plus les sketches humoristiques; ils ne me font pas rire. Sauf Raymond Devos, que j'ai aussi vu "en vrai". Et qui va au-delà du rire, il entraîne à une sorte de réflexion surréaliste qui m'enchante!
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L
Que de souvenirs en commun, cher Walrus! Nous aussi, nous restions dans la pénombre, religieusement attentifs au déroulement du feuilleton. Moi, je me contentais d'écouter. Ma soeur aînée, toujours sérieuse, crochetait son châle mauve!
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K
○○○♂☺☺☺☺☻☻☻☻▬♥♥♥!!oh!oh!<br /> <br /> katyL
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M
:-D ;-) :-D ;-) :-D
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W
T'inquiète, KatyL, c'est pas demain que je recommence !
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K
et mes doigts se remettent à écrire... ils sont jaloux!! imagine un peu Walrus a écrit plus de 10 lignes !! non mais...<br /> <br /> il va falloir s'y mettre ....<br /> <br /> bisous aussi <br /> <br /> katyL
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M
Excellente cette mémoire auditive Lorraine !!! Je m'en souviens également du Bonhomme en bois, et de Robert Lamoureux, et de l'homme des voeux "Bartissol", et de la célèbre "Heure du Mystère" accompagnée d'un générique à vous donner froid dans le dos !!! J'adorais !!!<br /> <br /> Merci de faire ressurgir tous ces sons et ces voix ! Ils sont restés quelque part dans un coin de nos mémoires ! C'est fabuleux !!
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P
Et je suis comme Anémone, j'ai toujours eu horreur des sketches humoristiques. Même encore aujourd'hui, je suis très, très difficile... J'aime plutôt mieux les imitateurs. J'avoue, à ma grande honte, n'avoir même pas apprécié un des plus grands, Raymond Devos, à sa juste valeur. Et pourtant, je l'ai vu, "en vrai" ...
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P
C'est curieux, cela m'a rappelé une autre consigne (chez les Impromptus, sorry d'évoquer la concurrence o;) écrire "à la manière de..." - mais j'aime bien le résultat. Surtout pour la chambre jaune, qui passait aussi à la rtb, premier programme et que nous suivions. Je me souviens de la voix qui parlait de la pauvre Mathilde Stangerson... (Le nom est-il exact?) Finalement, je n'ai jamais su par où l'agresseur était entré. Mais les feuilletons radiophoniques, c'était très gai. Très évocateur, l'imaginaire remplaçait ce qu'on ne voyait pas. Je me souviens aussi du "Capitaine Fracasse", en feuilleton (légèrement adapté) et surtout d'un feuilleton de Maurice Tillieux, (l'auteur de Gil Jourdan), "La ville morte". Au point que nous avons emmené la tsf familiale en vacances...
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W
Il me souvient aussi, chère Lorraine (malgré ton autorisation, jamais je n'oserais t'appeler "ma vieille", ne pouvant sur le net te saisir par le coude pour murmurer à ton oreille), d'avoir entouré le poste de TSF avec mes parents pour écouter religieusement les épisodes de "La pierre de lune" de William Wilkie Collins. Nous le faisions dans le noir avec pour seuls éclairages le cadran de l'énorme SBR et son "oeil magique" vert permettant d'affiner la syntonisation.
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L
Merci pour ce témoignage du bon temps de la radio! Tes souvenirs rappellent les miens, et le dimanche matin, nous écoutions"Les chansonniers" faisant la critique du monde d'alors. C'est là aussi que j'ai entendu pour la première fois Robert Lamoureux et ses sketches. Nous voilà loin de Proust, mais il nous a servi de passerelle pour évoquer nos souvenirs, la Chambre Jaune, Rouletabille, et même Passe-Partout! Bonne journée, Anémone
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L
"Le temps perdu", il fallait s'y accrocher! Proust n'a pas perdu le sien. En relisant "les madeleines" je me suis souvenue de ma lassitude d'autrefois, même si les mots étaient beaux, ils étaient aussi tellement "copieux"! Il me fallait du temps aussi pour vivre, écrire, et perdre mon temps à ma façon...Alors j'ai délaissé Proust! Merci, Lise.
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A
Trop drôle je veux écrire 80 (quatre-vingt) et j'obtiens une frimousse à lunettes :)) ! Avec Rouletabille, il ne manquait plus que les yeux sur roulements à bille ;))))
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A
Début des années 6O. J'écoute avec Maman tous les jours de la semaine sur la RTB qui ne s'appelle pas encore F (RTBF) "Actualité de midi".<br /> <br /> J'en entends encore l'indicatif.C'est là que nous avons entendu pour la première fois Adamo (que nous avions pris pour une femme). C'est là que nous avons suivi les feuilletons "Le Mystère de la chambre Jaune" ou "Le Tour du Monde en 8O jours" (ce qui fait que dans mon esprit Rouletabille se confond toujours un peu avec Passepartout). Je ne suivais pas toujours bien (je me demande rétrospectivement même si j'y comprenais quelque chose) et mélangeais parfois un peu les rôles des personnages à l'intérieur de la même histoire. Mais je me délectais des voix, reconnaissant chacun à son timbre et c'était un moment de joie.<br /> <br /> Le samedi par contre mes parents se branchaient sur Radio Luxembourg (qui n'était pas encore RTL) et nous avions droit à des sketches qui m'énervaient prodigieusement car je n'en saisissais goutte et les rires qui fusaient ne faisaient que m'exaspérer davantage. Pendant longtemps j'ai même eu une aversion pour les sketches humoristiques (voilà un bon exemple d' anti-madeleine), persuadée qu'il ne servait même à rien que j'essaie de les comprendre.
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L
Oui, comme tu dis, la mémoire auditive parle au coeur. Ce fut le temps de belles émissions, même si les speakers étaient tous des hommes! Les femmes ont fait leur apparition à la TV; en Belgique ce fut Jeanine Lambotte qui inaugura l'entrée des femmes dans le secteur fermé de ces messieurs. <br /> <br /> As-tu enlevé ton pansement?...<br /> <br /> Bisous, chère katyl
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L
Si tu croques mon texte, je crains que Proust te reste sur l'estomac!.. Merci, EVP, d'aimer les madeleines...
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L
Le bon temps de la radio!.. Joli, la madeleine auditive"! Merci, Tilleul.
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L
Suivre..suivre le fil délicat qui se dénoue, ne pas lâcher, c'est tellement fou que les mots pour le dire peinent à suivre et tu l'as très bien évoquée cette laborieuse naissance du " temps perdu" Merci
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K
pensez à m'enlever ce pansement<br /> <br /> car je pense qu'il est temps<br /> <br /> katyL
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K
j'ai revu aussi notre enfance du coup avec la famille DURATON , nous tous derrière le poste ..et celui qui devait gagner 1 million de l'époque avec le jeu.....<br /> <br /> et puis jean NOhain<br /> <br /> la mémoire auditive parle au coeur<br /> <br /> merci Lorraine de m'y avoir fait panser<br /> <br /> bisous<br /> <br /> katyL
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E
Nom d'un petit bonhomme !! Que ce texte est délicieux...A croquer !
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T
Du coup, en évoquant la radio, je me revois gamine, devant le poste TSF...<br /> <br /> Jolie madeleine auditive Lorraine, bravo!
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L
La télévision apporte l'image et c'est parfois superbe. La radio réunissait la famille, D'une certaine façon, c'était aussi superbe, malgré les parasites et les coupures de son! Et puis, les speakers avaient de belles voix et une très belle diction. Je me laissais bercer!
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L
Je suppose que tu riais pour les deux motifs: Proust et l'hystérie! Merci d'aimer ma divagation... .-))
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L
La grande artiste te rassure, mon vieux: tu peux l'appeler "ma vieille"...comme au temps de l'école ou, quand on se faisait des confidences, on se prenait par le bras et on chuchotait: "Oh! ma vieille, tu ne sais pas ce qui m'arrive...". je m'inquiète soudain: les Défiants ne vont tout de même pas s'imaginer que j'écris "vraiment" comme ça?...Je veux dire: ampoulé, excessif, long, long, long...comme Proust, enfin! Comme tu dis, j'ai adopté son mécanisme, juste pour répondre à la consigne!
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L
C'était beaucoup plus calme, presque respectueux; on s'asseyait pour écouter le feuilleton du soir, certaines dames tricotaient , 'autres préparaient une infusion, moi j'écoutais tout simplement "Résurrection" de Tostoï, qui mettait maman mal à l'aise (en ce temps-là, les petites filles ne devaient pas écouter les histoires d'amour illicites...). Et on ne zappait pas. On n'avait d'ailleurs pas de télécommande, et pas beaucoup de postes non plus.
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L
La Dame de la Chambre Jaune étant la Dame en Noir, tu ne confonds rien, Joe; simplement tu suis la voix impérieusement amicale du speaker à ses chers auditeurs. Par mon intermédiaire, of course!
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L
"Le petit bonhomme en mousse" ce ne sera jamais qu'une parodie, cher Vegas. Le seul vrai, c'est Le petit Bonhomme en bois! Je vois que tu l'as bien compris... -))
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L
Eh oui! Un peu malgré moi dans ce cas-ci...il a surgi de mes souvenirs pour se pavaner en imitant Proust! J'espérais un peu plus d'élégance, mais bon, on ne choisit pas! J'ai donc suivi le Petit Bonhomme en bois...
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V
j'étais toujours été passionnée par la radio .je suis comme toi l'oreille suspendue !!
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J
Tu sais ce que je retiens de Proust que je lisais à deux heures du matin pour préparer l'examen ?<br /> <br /> Je riais comme une dingue.<br /> <br /> <br /> <br /> Je ne me souviens plus de ce qui m'a fait rire, mais je me souviens que soit c'était drôle, soit je frôlais l'hystérie car j'étais privée de sommeil.<br /> <br /> <br /> <br /> Comme d'habitude, j'aime ton histoire ! Je te vois bien en gamine devant la grosse radio !
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W
Zut, Lorraine, je l'ai connu aussi le bonhomme en bois des Galeries Barbès. Tu peux m'appeler "Mon vieux !"<br /> <br /> Et tu as conservé le mécanisme du texte original, tu es une grande artiste !
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C
La mémoire auditive, ça oui... je veux bien croire.<br /> <br /> <br /> <br /> Je me suis toujours demandé comment était cette époque où la radio faisait partie de la famille comme la télé ou l'ordinateur aujourd'hui.
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J
Le presbytère n'a rien perdu de son charme ni les textes de Lorraine de leur éclat !<br /> <br /> Et tant pis si je confonds la chambre jaune et la dame en noir !
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V
Ah cette mémoire auditive! Dans cinquante ans quelqu'un tressaillira en entendant "le petit bonhomme en mousse", mais ça ne sera pas pareil :)))
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A
ah, tu as la mémoire auditive, Lorraine?<br /> <br /> c'est original :-)
Répondre
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