À toi le chef de gare de mon village (Venise)
À toi le chef de gare de mon village, niché entre la transhumance et l’oubli.
Au cœur de la grande vallée.
Je t’envoie quelques mots pour te dire que nous avons bien reçu tous tes trains de rêve que tu as fait partir de ton sifflet sonore.
Toi qui toujours officies dans un bel uniforme à la cérémonie des départs.
À tous ces trains du jour et à tous ces trains de nuit dans leur habit de lumière comme une guirlande sur un rail
Tu te tiens debout sur le quai plein de brume aspiré par tous ces secrets qui passent et ne s’arrêtent souvent même pas.
À toi chef de gare, tous ces bruits qui feulent ces adieux restés à quai que tu accompagnes d’un bras balayant l’air pendant qu’au même instant la vapeur se décroche des wagons.
Ton petit carnet est rempli d’horaires, de retards et d’attentes à calmer la panique des nouveaux voyageurs.
Et ces lambeaux de phrases mangés par le rugissement des rails.
Ta gare n’est pas la même à midi ou à huit heures du soir. C’est la lune ou l’ivrogne qui traine et qui s’accrochent à la grande horloge des départs.
On peut voir plein de choses quand comme toi on passe sa vie sur le quai d’une gare.
Tu as appris à creuser la brume pour nous frayer un chemin de neige sur le bord des grands départs.