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Le défi du samedi
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3 septembre 2011

Défi 157 (rsylvie)

… crois moi, cette année l’est mure !


-«… m’enfin Jeannine,,,,,, c’est plus possible.

Crois-moi, cette année L’est mure pour y aller ! » venait de s’écrier mon père.

C’était dit. Et, il n’y avait pas à revenir sur le sujet. Ainsi, en avait décidé le brave homme. Cette année, je ferai mon entrée à la Communale.

J’avoue que je n’en menais pas large. Depuis le temps que l’instituteur passait et
repassait devant notre pas de porte sans jamais oser en franchir le seuil. Je m’étais fait à
l’idée que l’école n’était faite pas pour moi. J’avais ainsi, pris de mauvaises
habitudes. Pour ça, vous pouvez me faire confiance. Tiens, comme la fois où je
fis un pied de nez à tous, en passant devant les fenêtres ouvertes de la
classe, alors que nous rentrions des fenaisons. Du haut de la charrette à foin,
je les dominais, moi le tout petit. Alors ça oui, je leur ai fait une de mes
plus vilaines des grimaces. Eux qui soufflaient et suaient dans leurs tristes
tabliers noirs, sagement assis devant le grand bureau du maître. Et l’autre
fois, où je me mis à chanter si fort en conduisant nos vaches de l’autre côté
du village, pendant que j’entendais ceux de la grande section ânonner leurs
tables de multiplication. Pour sûr, m’ont bien amusé ceux de la grande école.
Mais à ce jour, que je dois les rejoindre, j’ai comme une boule au ventre. Qui
ne me quitte pas, depuis que j’ai entendu le père et la mère se prendre la tête
pour une histoire de soupe qui ne serait plus assez chaude pour être digeste.
La pauvre femme avait eu beau pleurer toutes les larmes de son corps, s’écriait
que je n’avais pas encore tout à fait atteint l’âge idéal, que j’étais fragile
des bronches, qu’une année de plus auprès d’elle ne pourrait que m’être
profitable en raison de ma petite taille…. Rien ni fit.


Faut dire que ça va me changer la vie.
Plus de bons petits plats le midi, mais un goûter tiédi par l’impossibilité à
rester mijoter sur le vieux poêle de la pièce centrale de notre demeure. Plus
de petit veau à conduire dans le pré, avant d’aller à la pêche le long de
l’Orne. Et puis surtout, plus de course folle dans la campagne environnante,
mais rester assis en silence, à écouter les enseignements de l’instituteur. Mais
là n‘est pas le pire, car il va falloir aussi faire des devoirs le soir et réciter
des leçons devant toute la classe. Et ça, je ne pourrais pas.

Vous imaginez, les grands qui me regardent et les filles aussi ?

Après une nuit de cauchemars. Une impossible tartine de beurre à avaler, tant elle est
épaisse … « pour que la fringale ne vienne pas lui gâcher la matinée » avait
murmuré ma mère. Mes beaux habits du dimanche délicatement enfilés au dernier
moment, afin de ne pas les salir, je prends le chemin du village, ou plus
exactement, celui de la grande rue conduisant à l’école communale. Terrifié, le
cœur battant la chamade, une perle au goût amer cherchant à tout prix un
passage dans le conduit lacrymal qui interdit tout débordement au flot de
larmes qui trouble mon regard. Je lâche la main de mon père à l’entrée de
l’énorme bâtisse où désormais je passerai la majeure partie de ma vie d’enfant
et d’adolescent, pour me diriger vers la file d’écoliers attendant la sonnerie.
Soudain un grand s’empare de la cordelette et fait tinter la cloche. Sagement,
je suis les enfants qui se dirigent chacun vers leur place attitrée. Le professeur
n’étant pas encore rentré dans la classe, une fois assis, là où il me semble
être ma place, je m’apprête du regard à faire l’inspection de la pièce, quand
une voix tonitruante venant de la porte principale, me surprend en pleine
réflexion.

-« Que chacun prenne une craie, son ardoise… écrivez »!

« C’est au pied du mur que l’on voit le maçon »

Vous avez une demi-heure pour me dire ce que cela vous inspire.

Et surveillez vos fautes !

Vous le nouveau… venez me voir !
Alors mon petit, ton père a enfin réussi à décider ta brave mère de te laisser venir parmi nous.
Tiens, histoire de voir à quoi nous devons nous attendre avec toi, dis-moi, ce que cette citation t’inspire à toi » ?


 

Vexé de constater que tout le village semblait
parfaitement au courant de notre vie de famille, je m’écriais dans un français
plutôt graphique que grammatical

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Commentaires
J
Bon retour, amie Normande !<br /> Ce texte me fait penser, très curieusement, à une chanson de Brigitte Fontaine "Où vas-tu petit garçon ?" sur un disque acheté il y a bien longtemps : http://www.musicme.com/Brigitte-Fontaine/albums/Brigitte-Fontaine-3590070010346.html#
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R
... et bien c'est une illustration !<br /> celle du mur escaladé par les enfants<br /> (car il faut avoué que le petit ne savait pas encore écrire,,, puisque non scolarisé) et qu'il n'avait pas encore la bouche salie par les gros mots qui viendraient bien assez vite (ou pas) en grandissant !<br /> <br /> merci venise de ton illustration, mais j'avoue avoir peiné à lire,,,
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W
J'ai suivi le lien de Venise et, tout Belge que je sois, je trouve au beauceron des accents familiers.
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V
http://gastoncoute.free.fr/Ecole.htm<br /> pour accompagner ce texte voici celui de gaston couté sur l'école
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W
Je pense que le mot de la fin, "plutôt graphique que grammatical", c'est le dessin, Adrienne. Mais attendons la confirmation de rsylvie.
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A
c'est quoi, le mot de la fin?<br /> (excuse-moi, je n'ai pas compris s'il y en a un ni où on le trouve)
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Z
le dessin est super sympa et illustre bien cette histoire,comme joye j'aimais beaucoup l'école j'avais du mal à croire qu'on pouvait y aller à reculons
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V
Une histoire toute simple et tellement vraie...
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M
Ah, c'est un plaisir de te retrouver rsylvie !!! Ah là là "plus de petit veau à conduire dans le pré", "plus de course folle dans la campagne environnante" ...<br /> Tout plein de raisons de vouloir faire le mur !!!<br /> Super l'illustration !!!
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W
J'aime l'illustration où les enfants "font le mur" !
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J
Je suis lente, rsylvie, aide-moi...le petit a-t-il dit un gros mot à la fin ?<br /> <br /> Peu importe, j'ai bien aimé ton histoire. Moi qui ai toujours adoré l'école, cela me reste curieux et étrange les histoires des enfants qui n'aiment (ou qui n'aimaient pas).
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C
Un parfum de nostalgie pour une histoire qui a dû être vécue des dizaines de fois par les galopins de la campagne, au temps de Jules Ferry...C'est très bien vu!
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