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Le défi du samedi
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21 mai 2011

Oubli (Berthoise)

Il y a des choses qui deviennent très compliquées. Des textes que je ne comprends pas, même à la seconde lecture. Des allusions vides de sens pour moi. J'entends les conversations sans plus vraiment les écouter. Je me tais. J'oublie, je me perds dans mes souvenirs. Oh, bien sûr, je connais mon nom, mon adresse, le prénom de mon mari, la date de naissance de mes enfants mais, il y des gens que je ne reconnais pas. On me parle d'anecdotes. On me dit que je les ai vécues. Que j'ai réagi ainsi. C'est crédible. Du reste, je le crois mais je ne me souviens pas. Alors, je hausse les sourcils, mais je ne réponds pas. Est-ce le début de l'appauvrissement de mes neurones ? Vais-je comme l'oncle de Boris Vian pleurer sur la sauce blanche de mon cerveau ?
Je n'ai plus rien à dire, mes mots sont pauvres. Mais écrire. Et bien non. Ne plus écrire. Je croyais que mon ami l'ordinateur m'aiderait. Il parle lui. Il raconte encore et toujours les mêmes histoires. Je feuillette les albums de photos si bien rangés. Il faut bien que quelque chose soit rangé dans cette maison. Je vois des gens sourire, des paysages. Il se dégage de tout cela de la tendresse, de la douceur. Mais c'est un peu impersonnel. Je les trouve beaux, ces gens souriants ; j'aimerais me promener dans ces lieux. On me dit que je les ai côtoyés, que je les ai fréquentés. Tout s'obscurcit. Je regarde comme un documentaire, et découvre à chaque fois de nouveaux visages. Hier encore, pendant ma promenade, on m'a saluée respectueusement. C'est étrange. J'ai hoché la tête. C'est vexant pour les autres de voir qu'on ne les reconnait pas. Ils croient qu'ils ne sont pas importants. Alors, je fais semblant. Mon fils a voulu me faire des fiches dans l'ordi avec les photos, les adresses, les dates et les évènements importants pour chaque personne que je suis appelée à rencontrer. Il m'a dit : "Ne t'en fais pas, si tu ne te souviens pas, l'ordi le fera pour toi. " Il est gentil mon fils, il ressemble de plus en plus à son père. Des fois, je me trompe et l'appelle du prénom de mon mari. Il ne s'énerve jamais. " Mais non, maman, c'est moi Sylvain." Alors oui, il me semble bien que son père avait les yeux plus verts.

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Commentaires
J
Oui, c'est un récit touchant.
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W
Un brin déprimant, mais très bien écrit, j'aime beaucoup, Berthoise.
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D
très touchant... biz
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J
Mais une maladie tout aussi grave, à mon sens, consiste à s'inventer une famille à partir de gens qui n'existent peut-être même pas, cachés derrière des pseudonymes, des masques ou des prénoms universels. Qu'en penses-tu, ma cousine ?<br /> <br /> ;-))))))))))))))))))))))))
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J
Nous portons tous de beaux fantômes et nous sommes si nombreux sur la planète qu'on se trouvera peut-être un jour réduits à ces seuls souvenirs mêlés (dans un disque dur externe ou interne comme ici).
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J
Un commentaire peut-il servir deux fois ? Ouiiii !<br /> Ce très beau texte me fait penser à ceci : "Is this what you wanted, to live in a house that is haunted by the ghost of you and me" de Leonard Cohen<br /> <br /> http://youtu.be/pgUI9RB37ds
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V
Corrupted memory... ça peut arriver à tous mais pour les humains, il n'y a pas de SAV
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T
tout ça me fait penser très fort à quelqu'un...
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3
texte très émouvant
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T
Merci Berthoise très jolie texte, j'imagine une technologie qui pourrais aider, comme avec un iPod ou iphone avec reconnaissance physiologique en temps réel.Ou bien un agenda avec photo des gens qui sont croisés souvent et se qu ils representent pour le personnage.Le courage est de mise
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K
Berthoise nous sommes là<br /> on va accrocher desb petits foulards de couleurs pour que tu saches à qui tu parles<br /> Pour moi ce sera un foulard vert comme les yeux du gamin et du papa "le regard vert"<br /> zut ! nous l'avions fait déjà, j'avais oublié<br /> tu vois ça arrive à tout le monde<br /> bisous<br /> katyL
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J
Ton fan club est nombreux, douce Berthoise, pas étonnant que tu ne puisses plus les appeler tous par leur nom. Nous comprenons !<br /> <br /> Très joliment écrit, ce texte, qui plus est.
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