LES HUIT PETITS COEURS (Lorraine)
Les huit petits coeurs étaient cousins. Mais sept seulement battaient en mesure. Parce qu’ils savaient qui ils étaient, on leur avait donné un nom à leur naissance et c’était bien réconfortant de s’appeler Lundi, Mardi, Mercredi, Jeudi, Samedi et Dimanche.
Ils vivaient en fraternité et se tenaient par la main, toujours dans le même ordre, dormant à tour de rôle six jours sur sept, encadrés, consolidés par les autres, sûrs que rien ne les séparerait jamais. Ils se savaient éternels puisque leur confrérie appelée “Semaine” appartenait à l’ordre mondial depuis des décennies que rien, logiquement, ne détruirait jamais.
Le huitième petit coeur leur faisait de la peine. Certes, cet étrange cousin venait les visiter mais toujours à l’improviste, bousculant leur horaire, leur emploi du temps et, il faut bien le dire, leur sérénité! Il arrivait par la fenêtre comme un coup de vent , il apportait du soleil dans ses cheveux blonds et souvent fredonnait une musiquette joyeuse. Il se posait sur le bureau de Vendredi, le plus sérieux des sept, et faisait des claquettes. Il apportait des bonbons à Lundi, un peu endormi encore et lui racontait sa soirée d’hier. Il avait même confié à Jeudi, son préféré, qu’il voletait volontiers d’une fleur à l’autre, sans le dire à personne, car il avait le don de se rendre invisible ou, au contraire, très envahissant selon son humeur.
Les sept petits coeurs l’avaient cependant surpris en larmes, assis au bord de la rivière. Samedi l’en avait fermement éloigné car son fantasque cousin parlait de mourir. Resserrant leurs rangs, tous avaient monté la garde une Semaine entièr. Et puis, le huitième petit coeur émergea de sa peine. Il secoua ses ailes froissées, prit son arc, affûta ses flèches, remercia les cousins et s’en fut, plein d’un nouvel espoir.
Son nom? Comment, je ne vous l’ai pas dit? C’est l’Amour, bien sûr!