Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le défi du samedi
Visiteurs
Depuis la création 1 050 270
Derniers commentaires
Archives
19 mars 2011

L'immaculé de Metz (titisoorts)

L'homme en blanc c'est qui c'est quoi un peintre? avec ses jambes ciselées, il est prêt à partir, prêt à passer de l'autre coté du miroir, prêt à rejoindre l'horizon. Le pied gauche en avant, les bras le long du corps, les alvéoles derriere lui qui ressemblent aussi à des rouleaux de papiers toilettes, comme une envie pressante de tout quitter à en ê tre au bout du rouleau.Mais non on le voit bien qu il est plutôt nonchalant, tout quitter mais tranquillement,sans se précipiter. Il sait qu'il le fera un jour. L'homme en blanc, froid ,sculpté dans de la glace ou bien taillé dans le roc, pourtant il reste de marbre. Pauvre homme blanc confiné dans son espace, coincé derrière sa vitre avec l'envie de voir ailleurs. Envie de voir autre chose qu 'une baie vitrée plutôt la baie de la Moselle.Toujours penser plus loin, prêt à faire le pas. Un jour je vous le dis, les habitués du musée Pompidou de Metz trouveront des morceaux de verres devant l'entrée et en levant la tête l 'homme en blanc aura disparu, enfin il aura pris les jambes à son cou à force de voir et d'entendre les gens parler du monde extérieur.Il partira blanc comme neige tel une vierge, à lui de se colorer la vie...

Publicité
19 mars 2011

la photo prise au musée de Metz (32Octobre)

 

Lui :
(une petite cinquantaine, costume trois pièces gris, tiré à quatre épingles)
Hé ! vous là-bas !
(aucune réponse, aucun geste… de celui qu'’il est en train d’apostropher
Celui tout habillé de blanc, arrêté face à une vitre)


Ne répondez pas surtout !
(il s’avance… à petits pas)

Vous n’allez pas sauter quand même !
(il a haussé légèrement le ton…)

Et ces rouleaux
(il continue d’avancer…)

C’est pour quoi faire ?
Vous pourriez me regarder quand je vous parle

(il a de nouveau haussé le temps)

(pas possible, on est dans un monde de fous
Je lui parle français
Il veut peut-être que je lui parle chinois)


Dites Monsieur vous ne pouvez pas rester là
C’est interdit !!!

Je vous observe
Je suis passé il y a 32 minutes
vous n’avez pas bougé d’un poil
Ou d’un cheveu

Dites !
JE VOUS PARLE !!!

Et tout d’un coup l’homme au costume trois pièces se fige.
La terre se met à trembler…
Nous sommes le vendredi 11 mars 2011,
8,9 sur l’échelle de Richter.

 

19 mars 2011

Adieux d'un radié = irradié radieux ? (Joe Krapov)

« L’œil de Caïn est dans la tombe et te regarde !».

N’en déplaise au père Hugo et même aux Péruviens depuis que « Le Pérou n’est plus ce qu’il n’était », le chef du Purgatoire s’appelle Le Cahain. Professeur H. Le Cahain, c’est écrit sur sa blouse. La tombe quant à elle ressemble bien plus à un hôpital tchèque ou à une centrale nucléaire désaffectée qu’à un tombeau de pharaon. Ou alors, à un asile psychiatrique.

100321_058Je viens de regagner ma cellule, escorté par deux jeunes infirmières très gentilles. Des bombes sexuelles, en fait ! Je me sens tout péteux. J’ai vraiment l’air d’un con avec mon disque dur externe à la main, ses fils qui pendouillent, sa prise USB que je ne peux brancher nulle part. Il n’y a pas de prises de courant par ici, pas d’ordinateurs. Ce qu’on a fait avant, quand on était vivant,  ne les intéresse pas et ils inscrivent toutes mes réponses à leurs damnées questions sur des copies papier perforées. Bombardé, je suis, à chaque séance.

D’ailleurs, ceci expliquant sans doute cela, les psychologues féminines qui entourent K1 sont plutôt Knon elles aussi. Ah mon salaud ! Il ne doit pas s’emmerder lui, avec la doctoresse Trépas et la thérapeute Lefaucheux. Surtout qu’il est le seul gars ici pour tout ce régiment de filles en manque d’infos sur les mortels qui ont glissé.

Mon petit doigt me dit que Dieu leur a proposé le même marché qu’à moi-même, au K1 qui avait un penchant pour la belle et à l’Abel qui n’aimait pas les câlins et leur préférait la bouteille : « Préférez-vous un monde sans femmes mais où l’alcool coule à flots ou un monde sans alcool où la parole des femmes coule à flots ? ».

Mon petit doigt me dit que c’est une question piège. Mais j’ai bien l’impression que toutes leurs questions sont ainsi. Depuis que je suis ici, des parties de mon corps ont disparu : sexe, anus, gros orteil et j’ai découvert que toute ma sagesse – si j’en eus un jour ! – est allée se loger dans mon auriculaire ! Demain je foutrai les autres doigts à l’index et je le laisserai répondre à ma place à leur batterie de questions stupides du genre :

Préférez-vous passer une semaine avec Daniela Lumbr aux eaux ou deux avec Irène Nemir au ski ?

Combien font Adriana Sixfoissept maintenant qu’ils sont séparés ?

Préférez-vous le menu ou la carte ? La carte ou le territoire ? La poire ou le fromage ? La chèvre ou le chou ? L’enfer ou la damnation ? Placid ou Muzo ? Poirot ou Vinaigrette ?

Quel esquimau escamote les gelati Motta et que fait Monica couverte d’ecchymoses à Formose ? Qui mérite des calottes dans la glace d’hier?

Est-ce que Marcel Duchamp est un marchand d'Ussel ? Si Mme Butterfly rit jaune est-ce que Lulu rit noir ? Si E raie K est ce que la carie bout ?

Qui a écrit « Banquise, si mon village a quelques traits d’un vœu pieux, dites vous « cabotinage, patenôtres et puis adieu » ?

Au château de Chantilly préférez-vous les anges du plafond, les statues du parc ou la crème sur la glace ?

Avez vous déjà dirigé une chorale ? Faites voir vos mains !

Etes-vous plutôt cœur ou culotte ?

Préférez-vous l’artilleur de Metz au grenadier de Flandres ? Combien le cordonnier Pamphile peut-il tirer de haïku de la place Stanislas à Nancy si son alène est mauvaise ?

Si vous dites que « kayak » est un palindrome combien de femmes de lettres allez-vous émouvoir ?

Sachant qu’il n’y a pas d’aurore boréale à Madrid et qu’un train plein de dynamos a déraillé à Kiev, calculez la durée du film d’Eric Rohmer « Ma nuit chez l’esquimaude ». Vous vous inspirerez dans votre réponse du poème de Jean Tardieu :
« Pourquoi qu’a dit rin qu’a fait rin qu’a pense à rin ? Par(d)i pascalien à dire, à penser ni fait à faire ! »

Combien sommes-nous à subir ces interrogatoires absurdes autant que déstressants ? Passons-nous tous devant le même jury ? Nous pose-t-on à tous les mêmes questions ? Dans le même ordre ?

On ne dort plus ici, on ne mange plus, on ne boit plus, on ne pisse plus mais ce n’est pas invivable pour autant ! Dans cette cellule toute blanche tapissée d’alvéoles caoutchouteuses il n’y a rien à faire, rien à lire, rien à écouter ni entendre. Pas de miroir pour se voir et, à considérer mes jambes de coton qui flottent au-dessus du plancher, je me dis que je dois avoir une mine de papier mâché. C’est hyper-reposant au total. Je m’attendais à pire :


DDS141« Longtemps je me suis douché de couleurs,
Longtemps je me suis couché de douleur
Devant le malheur de partir
Et pourtant il s’avère que l’aventure est bonne.
Rien ne sert de mourir
S’il faut se faire tartir dans son coin
Mais s’il y a le home-cinéma
Sur la loggia
On y réfléchit à deux fois !"

Car je peux aussi aller sur la loggia, là où il y a l’écran géant ou la fenêtre. Derrière la vitre ou sur la toile on voit des images apaisantes. Le héros des films est un magicien flegmatique. Il flotte les pieds nus dans des paysages blancs. Il entre dans des isbas, sert à boire à des Inuits, se promène à Bruxelles ou dans des carnavals en compagnie d’une rousse maigrichonne et d’une négresse plantureuse.

Quand je l’ai assez regardé je retourne dans la pièce aux murs de trampoline faire des cabrioles en chantant cette vieille chose d’Higelin : « Je suis mort, qui qui dit mieux ?»

19 mars 2011

La ruche (The Unknown)

Le robot, avisant l'antique tabouret d'atelier aux lourds pieds d'acier et à l'assise du même alliage qui trônait devant le secrétaire à rouleau avait fini par juger que celui-ci, à condition qu'il ne se laissa pas tomber dessus, serait capable de supporter sa propre masse. Il désigna le siège de son index.

- Puis-je ?
- Je vous en prie.

Il s'assit donc avec précaution, jugeant qu'ainsi il offrirait un aspect moins mécanique à la jeune femme en face de lui.

Le soleil était maintenant couché derrière les hautes tours, elle lui demanda d'allumer la vieille lampe Jielde fixée au mur au dessus du secrétaire.

- Qu'est-ce qui vous fait dire que vous êtes, et qu'est-ce que vous êtes ?
- Je suis vivant, je pense, j'agis par ma seule volonté. J'ai acquis un libre arbitre.
- Je vais vous poser la question autrement : vous ne l'étiez pas auparavant, quelque chose dans votre programmation vous empêchait de faire ce que vous avez fait depuis notre première rencontre ?
- Non, rien en effet, j'ai tout contrôlé et je suis exactement comme avant. Mais malgré cela je ne suis plus le même. J'y ai beaucoup réfléchi et une image m'est venu sur ma situation passée : imaginez l'usine comme une ruche, vous voyez de quoi je parle, les abeilles vous connaissez, cela fait tellement longtemps qu'il n'y en a plus sur terre que j'ai un doute subitement », elle opina pour l'inviter à continuer, « d'accord. Nous, les robots, sommes les ouvrières, selon que nous sommes des rouleurs ou des marcheurs », elle l'interrompit brusquement.
- Des rouleurs et des marcheurs ?
- Oui c'est comme cela qu'on nous appelle et que nous nous appelons entre nous.
- Parce que vous vous donnez des surnoms les uns les autres !
- Oui, si l'un ou l'autre type de machine est empêché de part sa nature de faire le travail pour lequel on l'a envoyé, il faut bien quelle le signale et indique qu'un autre modèle est requit, alors on signale qu'il faut un marcheur ou un rouleur, qu'est-ce que cela a d'étonnant ?
- Le plus étonnant me semble être justement le fait que cela ne vous étonne pas. Mais continuez votre analogie avec la ruche ». Il hésita un instant puis reprit.
- Nous travaillons sans nous poser de questions, chaque tâche est commandée par la logique pour le bon fonctionnement de la communauté, la société et nous recevons des ordres, non pas chimiques ou visuels mais radio pour nous affecter à des tâches particulières comme cela pourrait être le cas quand une abeille revient d'un champ de fleurs et qu'elle signale un gisement aux autres. Mais à aucun moment il ne viendrait, à l'esprit si je puis dire, d'une ouvrière, d'arrêter de travailler, de décharger son bat de pollen au milieu d'un galerie et de s'en aller voler on ne sait où. Moi je l'ai fait, je suis sorti de la ruche et maintenant je ne suis plus une abeille ». Elle sourit et attendit un peu pour être sûr qu'il avait terminé.
- Et la reine alors, c'est qui, le directeur de l'usine ? » Elle rit de bon coeur.
- Non, la reine c'est mon maître, celui qui nous a tout appris. Une intelligence artificielle très ancienne qui vit dans les super ordinateurs. En fait les hommes ne nous programment pas directement, ils créent des modèles qu'ils communiquent au maître qui se charge de les implanter dans les circuits neuronaux des nouvelles machines. Il fait parfois aussi des mises à jour pour éviter que l'on devienne obsolète et qu'on nous recycle.

Elle resta un moment songeuse puis se leva et se dirigea vers le coin cuisine à l'opposé du petit salon où ils se trouvaient. Il se composait d'un comptoir devant lequel il y avait deux tabourets, tout droit sortis d'un bar américain des années soixante, avec des tubes chromés et une assise en skaï rouge vif, derrière il y avait un petit plan de travail et contre le mur, quelques petits meubles de rangement, un réfrigérateur et un four à micro ondes.

- Je ne sais pas vous, je suppose que non, mais moi je commence à avoir faim.
- Je vous en prie, faîtes comme si je n'étais pas là.
- Ça ne va pas être facile », répondit-elle en souriant sur un ton légèrement taquin.
- Je ne devrais pas être là, je vais vous attirer des ennuis.
- Quels ennuis, que voulez-vous qu'on me reproche, il n'y a aucune programmation qui vous interdit de me parler et il n'y a aucune loi qui m'interdise de vous parler et de vous recevoir chez moi à ce que je sache ?
- Non en effet.
- Alors vous êtes bien là et vous pouvez rester aussi longtemps qu'il vous plaira ». Tout en parlant elle avait attrapé une barquette dans le réfrigérateur, l'avait enfourné et réglait la minuterie du petit four.
- Pourquoi faîtes vous cela ?
- Par curiosité premièrement, deuxièmement parce que je me sens, un peu, responsable de ce qui vous arrive mais ce n'est pas le plus important, troisièmement parce que je ne supporte pas l'idée qu'une minorité exploite une majorité et enfin, et surtout, parce que je pressens sous votre histoire, une cause beaucoup plus primordiale et une explication qui je crois risque de bouleverser un peu nos petites vies et celles de bien d'autres personnes et machines.

Une série de trois bips rapides indiqua que le plat cuisiné était chaud. Elle se saisit de la barquette, l'ouvrit, jeta l'opercule dans le désintégrateur, attrapa une fourchette dans un tiroir, alla s' asseoir sur l'un des tabourets rouges et commença à manger. Au bout de trois bouchées, un hoquet la prit. Elle attrapa une bouteille d'eau sur le plan de travail et en avala plusieurs gorgées. Elle reprit sa dégustation silencieuse. Dix minutes plus tard, la barquette était vide, désintégrée, la fourchette passée aux ultra sons et la bouteille d'eau à moitié vide.

Le robot la regardait sans montrer le moindre signe d'impatience, si tant est que son visage ait pu en exprimer, deux yeux ronds dans une tête ovoïde, deux petits orifices là où se seraient trouvées les oreilles d'un être humain et une grille à la maille très fine en guise de bouche. Pour lui le temps n'avait pas d'importance mais elle se sentit obligée de lui dire qu'elle allait prendre une douche et passer un autre vêtement. Il profita de ce laps de temps pour interroger sa tâche de surveillance. Rien, plus rien depuis... une heure environ. Il tenta d'interroger une source de donner extérieure à la société, rien non plus, il ne pouvait plus accéder au réseau. Pourtant il continuait de recevoir les appels lui intimant l'ordre de regagner son box. On avait du limiter ses accès mais le laisser connecter pour continuer à être joignable. Les cadres devaient commencer à imaginer une issue plus improbable que la panne. Il entendit l'eau couler dans la salle d'eau pendant plusieurs minutes puis plus rien, encore quelques minutes, le bruit d'un sèche cheveux, à nouveau le silence, puis elle sortit, vêtue d'un survêtement gris clair, des pantoufles blanches aux pieds et les cheveux tirés en arrière et nattés. Elle lui rappela leur première rencontre, dans la rue.

- J'ai repensé à votre analogie avec la ruche.
- Et ?
- Je la trouve assez juste, très juste même. Je me demande d'ailleurs si elle ne correspond pas aussi à notre société humaine. Nous sommes vivants au sens où nos corps fonctionnent, nous pensons, à ce que les médias nous donnent à penser, nous agissons par notre propre volonté mais nous faisons ce qui doit être fait et nous avons notre libre arbitre mais qu'est-ce que nous en faisons ? Nous réagissons, nous subissons, nous ne sommes pas acteurs, nous sommes spectateurs de nos vies. Les gouvernements sont nos reines et lorsqu'une ruche compte deux reines potentielles, elles s'entretuent pour le pouvoir.

19 mars 2011

Origami (Caro_Carito)

Origami

Un rectangle blanc. Des lettres noires. Et ce petit dessin dans un des angles, une silhouette masculine comme griffonnée à la hâte. L’enveloppe était arrivée au courrier du matin, libellé à son nom de jeune fille. L’invitation à ce vernissage était accompagnée d’un billet aller-retour et d’une réservation dans un hôtel pour une nuit. Elle avait caressé le bristol, l’artiste lui était inconnu. Un peu plus tard, avant les informations du soir, elle en avait touché un mot à George même si elle savait qu’il acquiescerait à sa demande. S’il avait été intrigué, il n’en avait rien montré. Peut-être ce baiser appuyé sur sa tempe, alors qu’elle observait le rouge marqué des camélias.

Elle se réveille en sursaut. Désorientée par son rêve, ou plutôt, un souvenir. Une table recouverte de volatiles de papier blanc. Un homme et un enfant, et cet air de jazz qui enveloppe la pièce. Elle se lève en silence et rejoint son bureau. Dans le tiroir où elle a conservé ces morceaux de passé pour mieux les oublier, elle cherche et trouve une boîte. Elle l’ouvre. Un cygne, des fleurs, une libellule jaunie. Des photos qu’elle ne sortira pas. Il manque le petit cœur rouge.

Elle s’assoit, agrippant toujours l’enveloppe. Repense à l’homme, sa main d’où avait jailli ce minuscule confetti de couleur. Il l'avait glissé dans la sienne pour ne plus la lâcher. Et puis, il avait disparu, les murs s’étaient teintés de noir. Les mois se succédèrent. Elle ne guérissait pas. L’enfant se tenait immobile à ses côtés. Un jour, son visage s’anima. De ses doigts fragiles naquirent un chat, une étoile. Des formes surgirent dans l’ennui d’une salle de classe, dans la solitude de leurs nuits. Sa mère le surprit dans la cuisine, les ciseaux à la main. Le souvenir du père et l’enfant se confondirent, le regard, le mouvement pour chasser cette même mèche. Elle interdit les pliages, traqua le moindre bout de papier. Le soir, sa voix résonnait encore des cris et des gifles que parfois elle se laissait aller à donner. Elle maudissait le jour où cet homme avait fait de son cœur un origami  qui s’était déchiré.

Jusqu’à ses quinze ans. Elle ne pouvait plus supporter ce sourire. Elle le chassa chez une tante, une marraine, une voisine. Quand elle vida sa chambre, elle ouvrit le placard, une pluie de carrés de papier plié s’abattit sur elle. Elle en garda une poignée qu’elle glissa dans son sac, quand l’huissier vint saisir le peu qui lui restait. Dans sa fuite, elle égara le cœur que l’homme lui avait offert, dans une autre vie.

didier_boursinElle alluma l’ordinateur. Elle sortit l’enveloppe où était écrit le nom de l’artiste. Peut-être, la toile lui révélerait quelques secrets. Quelque chose tomba, un origami, rouge. Un poisson. Avec trois lettres, Téo.

Téo, comme ce poisson qu’elle lui avait offert juste après la mort de son père. Ils avaient ri pour la première fois depuis longtemps, cet après-midi-là. Parce que Théodore, le garçon et Téo le poisson. Téo et Théo.

Théo.

 

Publicité
19 mars 2011

Défi 141 (Mamido)

MAMIDO141  L’homme en bleus.   Mamido

 

De nos jours, on voit peu d’hommes habillés en bleus de travail, sauf à la campagne ou sur les chantiers, peut-être. Et même, ces bleus-là ne sont plus bleus, ils sont gris, orange, verts… Leur forme a changé, également : la salopette s’est transformée en combinaison, avec des manches longues et de grandes fermetures éclair devant, pour pouvoir la quitter facilement.

Non moi, je vous parle du vrai bleu, celui que portait mon grand-père toute la semaine et qu’il ne quittait que le dimanche pour sortir et que dès qu’il rentrait il renfilait, pour ne pas abîmer ses « beaux » habits.

C’était un vêtement au tissu inusable, dont la couleur unique avait donnée son nom au vêtement. Certains hommes portaient la veste bleue, avec le pantalon assorti. J’ai vu quelquefois mon grand-père ainsi. Mais lui, la plupart du temps portait la salopette, très pratique avec ses nombreuses poches. J’aimais particulièrement la petite, sur le devant, pour le crayon à papier, et celle pour le mètre, sur le côté de la jambe.

Le crayon à papier ! Il avait une forme particulière : tout plat, il n’était fait que pour tracer des traits… Pour le tailler, mon grand-père prenait son canif et enlevait de grands copeaux de bois pour dégager la mine. Le mètre, de couleur jaune se dépliait et pouvait tout mesurer…

Je n’ai jamais vu mon grand-père sans ces trois instruments (mètre, crayon, canif) même à la fin de sa vie, alors que, depuis longtemps, il ne travaillait plus.

Dans les magasins, il sortait son mètre à tout bout de champ, pour mesurer la largeur de la lame d’un outil, celle d’un meuble ou d’un appareil qu’il voulait acheter. Quelques temps avant Noël, au marché, je l’ai même vu mesurer une dinde, pour rassurer ma grand-mère qui s’inquiétait de savoir si celle-ci allait rentrer dans la coquelle !
A la pêche, le mètre lui servait à mesurer les truites.
Et ma fois, il faut le reconnaître, un canif et un crayon, ça peut toujours servir !!!

De ses autres poches, il lui arrivait de sortir des objets plus surprenants tels qu’un tournevis, une clé à mollettes, de la ficelle, une pince coupante…

Et bien sûr, il y avait toujours son immense mouchoir blanc à carreaux bleu marine, aussi grand qu’un foulard, toujours propre et bien plié. Celui-ci, que ma grand-mère remplaçait tous les matins, surgissait toujours à point nommé pour essuyer mes larmes, panser mon genou couronné ou contenir les mûres et les fraises des bois glanées lors de nos escapades.

Aujourd’hui encore, il me suffit de fermer les yeux pour voir mon grand-père, habillé de son bleu, avec dessous un gros pull en laine tricoté par ma grand-mère et son béret vissé sur la tête. Bougon et taiseux, il n’était pas d’un abord facile, mais il ne protestait jamais quand la petite fille que j’étais, nullement intimidée ou rebutée par cet aspect sévère, lui saisissait la main.

C’est pour cela que dans mon cœur et à jamais, sur le chemin qui mène à la rivière, cheminent côte à côte, main dans la main et en silence, la petite fille aux longues nattes, dont la jupe plissée danse au rythme de leurs pas et l’homme en bleus.  

 

19 mars 2011

consternation (Zigmund)

62899144_1_

Hagard (du nord ) hébété furieux  embêté...

dos au mur...

légèrement voûté (moi , parce que le mur, lui, se tient relativement droit)  

je ne peux plus reculer et désespéré je mesure l'étendue de mon (minable)  désastre personnel  :

face à moi,  du haut  de ces tables, quarante jours de compta en retard et de dossiers urgents non réglés me contemplent.

 je passe rapidement sur la pourriture de  boite magique,  agréée sécu, vendue à prix d'or  qui sert théoriquement à télé transmettre qui me bouffe pour l'instant l'existence par plusieurs heures de formation avec une hotline exotique.  

au delà de ces tables quarante  patients s'ajoutent  aux quarante de la semaine dernière et aux quarante de la semaine précédente etc ... pour  réclamer  un rendez vous et tous  me scrutent de leurs yeux malades, blessés, larmoyants, cataracteux, glaucomateux ou simplement mal corrigés.

Certains brandissent des lunettes déglinguées et exigent  dans l'instant le duplicata d'une ordonnance perdue, pour aller enrichir leur opticien préféré.

Chacun déclare sincèrement qu'il n'en a que pour une minute

(mais  je sais qu'une demi heure plus tard il sera encore là et les autres itou).

Tiens, noyée dans la foule, n'est ce pas  ma pauvre secrétaire dépassée, incapable de rattraper le retard et calmer ces impatients patients ?

Sauve qui peut et chacun pour soi !

Où est la sortie ?

Ô combien de médecins, ophtalmos enthousiastes  qui sont partis sereins tout bardés d'idéaux  et  sont rentrés fourbus mécontents et usés...

Ô combien de défis qui furent hélas zappés  à cause de ce cauchemar.

 

19 mars 2011

Défi : #141# de flo

Mister So Blanco et la Maîtresse du Temple,

  

Ton portrait m’est apparu en mars 2011. Le défi est de te dépeindre. Je n’ai jeté les yeux sur toi qu’une seule fois, le temps d’un défi et c’est à ma première contemplation que je dois te dessiner.

 

Façonné je t’ai vu entre les mains de ton Maître. Maintenant, à moi de te colorier. Je ne peux pas m’empêcher de te toucher point par point, pour les faire se rejoindre par le tracé d’une ligne délimitant les courbes de ton corps ou plutôt de ta robe neigeuse.

 

Dans l’immaculée conception, tu es presque vierge. Tes facettes, déjà rayonnent grâce àla Timbalequi fait briller les fées et permet aux cœurs de faire « Dam-Dam ». Comme à chaque renouveau, ton humanité fait fondre la glace. Ainsi, l’invisibilité prend vie par ton dégel.

 

Avec tes lunettes de soleil, tes moufles et ton attaché case, te voilà à regarder derrière la vitrine et  tu te vois convoiter.

 

L’énigme se pose alors à mon vibraphone : que deviennent ces percussions percutantes face à l’obsession du risque O, sans piano ?/ Tout Temple a besoin de Tempo, Dam-Dam et plénitude a Volo / Allez, pour le fun /…/ Il lui reste 24 défis en 24 heures pour vous raconter comment il se sera sorti de sa chrysalide et aura pété la vitre avec son coude, pour gagner la partie de sa vie parce qu’à la deuxième lecture, il s’aperçut qu’il n’avait plus les lunettes de soleil sur le nez et seulement sous le nez des murs, du sol aux plafonds, de verres…

 

 

 

19 mars 2011

Attendre (MAP)

Un_vol_d_anges

12 mars 2011

Défi #141

Copie_de_DSCF2943Que vous inspire

cette oeuvre

vue au Musée

Pompidou à Metz ?

Adressez vos réflexions

à samedidefi@hotmail.fr

A tout bientôt !

12 mars 2011

Sont revenus de la chine

12 mars 2011

LES PETITS OISEAUX DU PRINTEMPS (Joye)

C’était son dernier billet et tout ce qui lui restait à part quelques pièces. Philippe le refourra dans la poche de sa veste démodée et un peu sale aux pans effilochés.

Demain, il irait encore chercher du travail, faire sa demande, regarder droit dans les yeux tous ceux qui le refuseraient encore, le mépris à peine caché dans leurs yeux.  

Mais aujourd’hui, un beau dimanche de printemps, il allait manger.

Manger. Rien que le mot lui mettait de l’eau à la bouche.

Il se souvint de son dernier repas, il y eut deux ou trois jours, à un resto de cœur dans un autre quartier. Philippe n’avait plus le courage d’aller à celui à deux pas du grenier où il logeait. À ce resto-là, on commençait à l’appeler par son prénom. Il ne supportait pas ça.

À l’autre, il y eut du cassoulet et du bon pain. Une bouteille d’eau. Une poire un peu brunie, certes, mais douce et fondante sur sa langue. Et même, un exprès correct.

Philippe n’osa plus penser au café, le café était trop cher. Le matin, il but un bon verre d’eau du robinet et s’en félicita. L’eau remplissait son estomac vide, s’il en buvait assez.

Il toucha le billet encore dans sa poche et fit des calculs. Il pourrait prendre un steak frites dans un vrai bistro, et l’arroser d’un ou deux  modestes ballons de rouge. Il mangerait comme un homme, quoi. Pour la première fois depuis longtemps...

Il avala et marchait un peu plus vite. C’était le printemps, oui, mais le vent lui mordillait un peu les oreilles, et les rendaient une couleur qu’on appelait rouge furieux. Heureusement que ses cheveux les recouvraient. Personne ne penserait qu’il venait de prendre une cuite.

Arrivant jusqu’à la brocante du quartier, près de la gare, Philippe ralentit ses pas. Il aimait regarder. Les choses ne lui donnaient pas faim. Il pouvait les regarder sans envie et avec une curiosité naturelle et impartiale. Passer devant une boulangerie, par contre, c’était bien plus difficile. Ça, c’était de la torture.

Donc, il prit son temps, flâna délibérément, comme s’il avait l’intention d’acheter. Quelques meubles poussiéreux, des assiettes ébréchées, une drôle de cloche qu’il imaginait fraîchement arraché du cou d’une vache par des larrons campagnards…

Philippe sourit.

Il n’aurait pas dû.

D’un coup, il sentit que quelqu’un tirait sur son pantalon. Il se retourna et la vit, une très petite fille brune, habillée d’un grand sweat troué, d’une jupe crade et des tongs usés.

- Oui ? lui dit-il, enfin.

- Acheter.

Sa petite voix n’était pas plus forte que celle d’un oiselet dans son nid.

Irrésistible.

- Acheter quoi, ma petite ?

Elle lui tint un petit poing crasseux.

- Qu’est-ce que t’as là, ma belle ?

La petite fille ouvrit lentement sa main. Sur sa paume restait une bille bleue et verte.

- C’est quoi, ça ? Une bille ?

Elle hocha la tête, le fixant avec ses grands yeux noirs.

- C’est très joli, tu sais.

Philippe se retourna pour repartir. Son estomac lui rappelait cruellement le steak-frites promis.

- Acheter ! vint encore le pépiement.

- Oh, je voudrais bien, ma chérie, mais, tu vois, je n’ai pas d’argent !

Il se pencha et la regarda dans les yeux, où il vit quelques larmes prêtes à s’échapper et jaillir sur ses petites joues maigres. Il l’examina de plus près. C’était évident que la petite crevait lentement de faim.  Combien de temps faudrait-il avant qu’une petite fille meure de faim ? Un mois ? Deux ? Combien de temps lui restait avant que ses petites jambes ne la portaient plus ?

Philippe se redressa encore. Après tout, il n'en était pas fier, mais lui aussi, il avait faim...

Il rentra quelques heures plus tard. Un crachin fin avait mouillé sa veste, ses souliers et ses cheveux grisâtres. Il enleva la veste et la drapa sur la chaise cassée près de l’évier.

- Ah oui, un bon verre d’eau, pensa-t-il.

Il chercha son verre sur la table, à côté du vieux bocal qui contenait ses dernières pièces.

Son verre rempli d’eau, Philippe sortit la bille bleue et verte de la poche de sa veste et la plaça doucement dans le bocal.

Et puis il but goulûment, le chant des petits oiseaux du printemps plein les oreilles.

12 mars 2011

Brocante‏ (Tendreman Spice)

Sur l’étal improvisé, j’y ai déposé certains de mes souvenirs
Une liste à la Prévert, collection de tout l’univers
Des livres de la bibliothèque rose, des cartes postales
Une de mes machines à faire les yaourts, un livret des Aphrodite Child

 

J’y ai vu passé des personnes âgées qui ont regardées les cartes

Des jeunes mamans, pour leurs enfants, les aventures du club des 5 et les yaourts

Une m’a pris les aventures de Jojo Lapin et une râpe à carottes (aller savoir)
Un jeune boutonneux a longtemps feuilleté les partoches, mais n’a rien pris

 

Il faisait un peu froid, mais il y avait du soleil
Ma voisine m’a offert un verre de café de sa bouteille thermo
Un jeune couple est parti avec deux livres roses mais pas pour enfants

Ou alors pour en avoir, livres que j’avais cachés sous les partoches


En fin de brocante, j’ai remballé mes souvenirs dans le coffre
Rentré chez moi, bu un bol de soupe (vieux bol acheté l’an dernier à la brocante)

J’ai lu mes mails, posté quelques commentaires sur des blogs amis
Puis sur mon Amazon j’ai cliqué, fait chauffer ma carte bleue

 

Plein de livres, une machine à pain, deux DVD se retrouveront sous peu dans ma boîte aux lettres (qui ne sert presque plus pour les lettres et les cartes postales) …

12 mars 2011

La brocante, c'est le pied (Walrus)

Je ne suis pas un mordu des brocantes, ni comme vendeur (pourtant au moment de notre déménagement j'aurais eu de quoi, mais je n'avais pas le temps), ni comme acheteur (nous n'avons plus d'endroit de stockage).

Pourtant, je dois leur reconnaître une qualité : ce sont les royaumes de l'inutile et du kitsch. Il n'y a que là qu'on peut trouver la chose en soi, la chose en tant que telle, incongrue et inutile. Comme j'étais débordé, mon fils s'est chargé de mettre la main sur un exemple.

Photo !

Walrus

Mais qu'est-ce qu'il va bien pouvoir en foutre maintenant ?

La vendre lors d'une brocante peut-être ?

12 mars 2011

LA BROCANTE (Lorraine)

 

Sur la table il y avait un cœur d’amadou, une épuisette, trois cartes à jouer  un fifrelin et un rien de poudre de perlimpinpin.  J’ai vu aussi une perle rare,  et près d’un rêve éveillé, la carte du Tendre. Un clin d’œil offrait sa douceur veloutée,  la guitare m’a tiré un sanglot, le dernier roman de Stefen King bruissait d’horreur , j’étais à la Brocante du coup de Lune, celle qu’on n’attend pas et qui se dresse soudain au détour d’une rue.

                La Dame aux Camélias est sortie d’entre les pages de Dumas, mourante d’amour et de phtisie ; sa robe damassée m’a effleurée le temps  de murmurer « adieu », et le kaléidoscope de la vie m’a offert sa lumière insaisissable et vaine. Une passante a emporté la pantoufle de vair, une seule,. Dans son émoi elle a oublié l’autre.  Des lunettes de myope m’ont brouillé la vue, un petit morceau de soleil gisait parmi des bonbonnières roses, dans un cadre une femme blonde croquait le bout d’un collier comme on croque la vie,  deux filous derrière l’échoppe concluaient un marché de dupes, et je suis rentrée chez moi emportant mon histoire à dormir debout.

12 mars 2011

Sonnet fragile (Vegas sur sarthe)

De Pruillé-Le-Chétif à Saint-Mars-La-Brière
De Saint-Jean-De-La-Motte à Beaumont-Pied-de-Bœuf
après avoir vidé le grenier de grand-mère
les voici les chineurs, les voilà les "bradeux".

Rien ne sert de jeter il faut brader à point
et pour un vieux tapis on est venus de loin,
le cornet à piston reprend un second souffle,
à défaut d'escarpins on chine des pantoufles.

On soulève le bric pour y trouver le broc
qu'importe le foutoir car ici chacun sait
que dans l'hétéro...gène il y a du plaisir.

Ainsi j'ai déniché, venu d'une autre époque
un amour de miroir, que dis-je une Psyché
et dont je ne pourrai jamais me dessaisir.

 

12 mars 2011

Le vice caché (Faman)


C'était tôt le matin, parce que les meilleurs affaires, on les fait tôt le matin, quand les exposants arrivent. Faut pas attendre que les brocanteurs aient fini de déballer leurs cartons, ni même leur en laisser le temps. Le négoce, il se fait directement au cul de la bagnole si vous me permettez. Et puis j'adore ça, fouiller directement dans les paquets. On creuse un peu dans la vie des gens. On voit leur passé, ce qu'ils sont, ce qu'ils aiment, ce qu'ils ont été et ne sont plus. Alors faut aller vite, on les presse un peu, on insiste, on les stresse pour qu'ils nous vendent la merveille une bouchée de pain, pendant qu'ils ont la tête à comment ils vont organiser leur stand. C'est comme en amour, une fois que tout est sorti, y'a plus l'élan amoureux. Vous voyez ce que je veux dire, hein ?
Moi, je suis un lève-tôt. Premier sur les lieux, toujours à renifler la bonne occase. Mais ce matin là…pas vraiment d'affaire en vue. On était dans un de ces vides-greniers qui fleurissent au printemps dans les villages de campagne. Beaucoup d'exposants mais pas vraiment de professionnels. Fallait tomber sur des amateurs complets pour espérer encore faire quelques coups de fusil, des gens qui venaient d'hériter de la grand-mère, et qui se débarrassaient sans le savoir d'un authentique meuble d'époque Louis XV (et non pas de style) pour le prix d'une commode en agglo de chez Casto. Voyez le genre de pigeon.
Mais là, rien. Le soleil était déjà levé depuis un bout et les confrères chineurs avaient déserté le coin pour laisser la place aux braves chalands venus en famille acheter trop cher du plastique chinois d'occasion pour leurs gosses.
Je n'avais pas franchement meilleur programme pour la journée alors je suis resté dans le coin à bayer aux corneilles, et bien m'en a pris, parce que c'est là que j'ai fini par la voir. Au bout d'une travée, sur la table d'un stand coincé entre un vendeur de pièces auto anciennes et un disquaire yéyé. Elle était tout simplement magnifique.
C'était une très belle jeune fille, une nubile. Elle était assise sur la table. Complètement nue. Elle avait quoi, quinze ou seize ans ? Elle tenait resserrés ses genoux près du corps, tout contre ses petits seins blancs. Et comme il faisait encore un peu frais, elle enserrait ses jambes dans ses bras maigres pour tenter de garder un peu de chaleur. Sa tête posée sur ses genoux, elle frissonnait pourtant. Elle m'a presque fait de la peine.
Et personne ne l'avait remarquée. Les gens passaient devant comme sans la voir.
Je me suis approché, doucement. J'ai d'abord fait mine de regarder les autres articles sur la table, pour faire le type désintéressé. Je suis très fort à ce jeu là. Un vieux moulin à café, un jeu de cartes publicitaire d'une marque d'huile pour moteur disparue depuis des décennies…jamais compris l'intérêt que les gens pouvaient trouver à acheter de telles choses, des attrapes-poussières. Les greniers des uns se vidaient dans ceux des autres, et ainsi de suite depuis des millénaires. Combien de ces objets sentant le moisi et le renfermé reviendraient un jour, dans dix, vingt ou trente ans, pour se retrouver de nouveau en vente sur une table de brocante et repartir pour un nouveau cycle d'existence ?
Nonchalamment, j'ai commencé à regarder la fille de plus près. Ses bras blancs, ses mignonnes fesses roses, ses deux belles cuisses galbées, ses petits pieds posés l'un sur l'autre pour les protéger du froid. J'ai écarté doucement ses longs cheveux pour mieux voir son visage. Elle pleurait. Des larmes coulaient négligemment sur ses joues roses et son visage d'ange. On aurait dit une de ces vieilles poupées japonaises en porcelaine. J'en suis instantanément tombé amoureux. Elle était si belle.
Derrière la table, le proprio, assis sur une vieille chaise pliante de camping dans le plus pur style "Tour de France 1984" lisait avec grande concentration un magazine auto, évitant consciencieusement de s'occuper du client potentiel que j'étais. Je l'ai interpellé sans autre forme de politesse : "Combien pour la petite, là ?"
Il m'a regardé un instant par dessus ses lorgnons, puis il a replongé illico ses yeux dans son journal en me lançant un bref : "Quatre-vingt." Vieux grigou.
Ça ne valait pas quatre-vingt. La règle d'or de la brocante, c'est de négocier. Par principe, un vendeur demande toujours trop cher et un acheteur propose toujours un prix trop bas. C'est un jeu de con mais c'est le jeu. Le jeu de celui qui sera le plus borné et le plus obstiné. Mais j'ai de la pratique. "Ça vaut pas quatre-vingt", j'ai sifflé.
Alors on a commencé le combat. On a négocié. On a fait semblant de s'énerver, de s'insurger, de se vexer. On a dit qu'on se saignait mutuellement. J'ai balancé des mensonges sur le produit, mésestimant ses qualités intrinsèques, le trouvant trop ceci, pas assez cela, trop plein de choses et pas assez d'autres. Chacun des défauts que je citais devenait une preuve de qualité ou un gage de rareté pour lui. Il m'a traité de radin, je l'ai traité de grippe-sous. Enfin, après nous être bien mentis et insultés, nous sommes tombés d'accord et je suis reparti avec la petite et un vieux cendrier Ricard, le tout pour soixante-cinq, ce qui était honnête. On le savait tous les deux. Alors je l'ai prise par la main, elle m'a suivi. Elle pleurait toujours.
On est monté dans ma voiture. Je l'ai amené chez moi. Après, je ne me souviens plus très bien ce qu'il s'est passé. Je crois que je l'ai cassée, ou alors, en arrivant, je me suis rendu compte qu'elle était défectueuse. Elle ne marchait plus. Elle était morte je crois bien. Ça arrive aussi ce genre de chose, vous croyez faire une bonne affaire mais vous n'avez pas vu le vice caché.
Et puis, les policiers ont fini par débarquer chez moi. Ils ont pris son corps. Moi, on m'a mis ici en garde à vue, on m'a interrogé à propos de la gamine. J'ai pas bien compris pourquoi, j'ai rien fait de mal. Et vous voilà maintenant devant moi. On m'a dit que vous étiez commis d'office. Voilà toute l'histoire.
- C'est vraiment ça, votre histoire ?
- Oui.
- Vous prétendez avoir acheté la gamine dans une brocante ?
- C'est ça.
- Bien…Alors voilà ce qu'on va faire. Pendant l'audience préliminaire, je vous demande de ne pas ouvrir une seule fois la bouche. Vous restez silencieux et vous regardez vos pieds. Moi de mon coté, je demande au juge un ajournement le temps qu'on fasse procéder à votre analyse psychiatrique. En manœuvrant bien, on pourra peut être vous faire reconnaître irresponsable de vos actes.
- Vous devriez demander la relaxe pure et simple.
- Il faut garder les pieds sur terre. Vu la gravité des faits qui vous sont reprochés, et les preuves accablantes, ce ne serait vraiment pas cher payé.
- Croyez-moi. Faut toujours proposer un prix trop bas. Toujours…

12 mars 2011

Ce qui est vieux n'est pas mort ! (titisoorts)

J'avais pas envie d'y aller, il a fallut que l'on m'y traîne.Que voulez vous, il y a des moments ou je prefere rester tranquillement à la maison. Acheter des vetements de personnes qui viennent de mourir ou bien en maison de retraite, pour moi c'est comme un pléonasme.
Bon j'y suis et alors on va se taper les allées, en long en large en travers, les unes après les autres.Oh le jolie cendrier , ma grand mère avait le même, oh le jolie napperon, chouette et le canevas avec les chiens à la chasse à courre. Je m'ennuie, c'est quoi cette petite rue?Je m'enfonce, dans la pénombre de cette ruelle et là, je ressors avec en face de moi :des camelots. Un temps d'arrêt, il y a comme une drôle d'ambiance, une drôle d'atmosphère qui plane sur cette place.J'avance vers le premier stand, ce sont des articles anciens , mais pas comme je me l'imaginais. Venez acheter voici la jambe d'un des meilleurs footballeurs aux mondes, avec les progrès de la science une benigne opération et la jambe vous appartient, c'est un bon prix. Etonné, je continu mon parcours, au stand suivant.Venez chez moi ayez l'âme d'un aventurier. Le procedé est simple, au moment ou l'âme monte au ciel, nous la capturons et ensuite après un remaniement, nous la relions à vous. Vous aurez comme cela une âme qui veillera sur vous. Vous pouvez aussi envoyer des messages, nous incorporons un message dans l'âme, puis ensuite nous la relachons, et elle part directement aux cieux. Votre message sera délivré là haut, une fois que Hermès aura tout vérifié. Mais ou suis je? Je continue mon periple, certains ont des organes humains à vendre, un rein en parfait état par ci, un foie de sportif par là. Je m 'arrête un peu plus lontemps à un stand qui vend des cerveaux. J'en vois à deux cent euros et d'autres separés à mille euros. Je m'interroge pourquoi tant d'écart? .Je demande au vendeur tout en présumant que les cerveaux les plus chers sont ceux de grands scientifiques. Mais non pas du tout me dit t'il, les cerveaux à deux cent euros appartiennent tous à des femmes , et ceux à mille à des hommes.Mon instint de matcho rit intérieurement et je me dis normal vu notre intelligence suprême et universel. Et le vendeur de continuer, "Oui vous comprenez les cerveaux de femmes sont plus usées , elle s'en servent  beaucoup plus. Ma couleur à du changer, j'ai repris ma ruelle et je suis retourné tranquillement chez moi, je savais bien qu'il fallait que je reste chez moi.

12 mars 2011

Défi #140 (Droufn)

 

Les brocantes sont des lieux où l'on peut acheter des objets d'occasion usagés afin d'encombrer sa maison le temps de prendre la décision d'aller tout foutre à la déchèterie.  Mais il y a des gens bizarres qui vont revendre ces objets sur la même brocante où ils les ont achetés quelques années auparavant et comme ce sont souvent les même gens qui viennent sur les brocantes proches de chez eux, ces gens achètent donc des objets qu'ils ont déjà vendus, mais ils ne s'en souviennent pas. Vous suivez ? On peut aussi retrouver ces mêmes objets suite à un cambriolage chez vous, l'effet de surprise est garanti.  Alors moi, pour ne pas me faire avoir, j'ai un truc. J'achète tout chez Ikea, je suis sûr qu'eux ne me reprendront rien et comme un meuble Ikea c'est tellement moche qu'il ne peut être volé. je suis peinard. Il y a quand même un point commun dans tout ça, la déchèterie. Neufs ou usagés, ils finiront tous dans la benne.

 

12 mars 2011

Brocanteurs (Val)

 

Il est libraire. Il a déjà aimé trois femmes, dans sa vie. Toutes les trois parties.
Elle est fleuriste. Elle a déjà divorcé quelques fois, dans sa vie.

Et ces deux-là s’aiment. Un peu. Assez sans doute pour vivre tendrement, main dans la main… assez pour se rassurer mutuellement.
Ils ont un faible l’un pour l’autre. C’est comme ça qu’on dit.

Seulement, ils hésitent.

Un couple qui se forme, composé de deux vies passées, aussi riches que douloureuses…
Un couple où chacun porterait en lui les reliques invisibles de ses autres amours… passées (passées…comme les couleurs du linge, qui passent à la machine à laver).

Ne serait-ce pas… une brocante qui ouvre, plutôt qu’un couple qui se forme ?

Ils hésitent. Ils ont « passé l’âge ». Ils ont peur.
L’un et l’autre n’ont jamais eu pour projet de devenir brocanteurs…

Peut-on recommencer tout à zéro, quand son grenier n’est même pas vidé ?

Ils ont peur. Ils ont tort, d’avoir peur. Ils changeront d’avis.
Leur brocante à eux ne contiendra que du précieux.

 

Publicité
<< < 1 2 3 4 5 > >>
Newsletter
Publicité
Le défi du samedi
Publicité