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Le défi du samedi
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12 juin 2010

Distraction dommageable (Papistache)

 Paula Reine n'avait jamais eu de bonheur avec ses amants.

Elle les perdait tous de la même façon : un beau matin, ils cassaient leur pipe, s'en allaient au champ d‘naviots, et là-bas les vers les mangeaient. Ni ses caresses, ni la peur du marbre du tombeau, rien ne les retenait. C'était, paraît-il, des amants incontrôlables, voulant à tout prix en finir avec l’existence et le sel de la vie.

La brave Paula Reine qui ne comprenait rien au caractère de ses amants était affligée. Elle disait :

- C'est fini ; les hommes s'ennuient chez moi, je n'en garderai pas un.

Cependant, elle ne se découragea pas, et, après avoir perdu six amants de la même manière, elle en séduisit un septième ; seulement, cette fois, elle eut soin de le prendre tout jeune, pour qu'il s'habituât à demeurer chez elle.

Ah ! Gringoire, qu'il était joli le petit soupirant de Paula Reine  ! qu'il était joli avec ses yeux doux, sa barbiche de sous-officier, ses cheveux noirs et luisants, ses souliers zébrés et ses longues moustaches brunes qui lui ourlaient la lèvre ! C'était presque aussi charmant que le cabri d'Esméralda, tu te rappelles, Gringoire ? - et puis, docile, caressant, se laissant traire sans bouger, avec l’art de prendre son pied en gémissant à peine. Un amour de petit sigisbée.

Paula Reine avait dans son mas un lit clos tendu d'aubépines brodées. C'est là qu'elle mit le nouveau pensionnaire.

Elle l'attacha à son pieu, au plus bel endroit du divan, en ayant soin de lui laisser beaucoup de corde, et de temps en temps, elle venait voir s’il était bien. Le soupirant se trouvait très heureux et la broutait de si bon cœur que Paula Reine était ravie.

- Enfin, pensait la brave femme, en voilà un qui ne s'ennuiera pas chez moi !

Paula Reine se trompait, son amant rendit l‘âme. Il repose sous le schiste.

Adieu, Gringoire !

L'histoire que tu as entendue n'est pas un conte de mon invention. Si jamais tu viens entre Maures et Esterel nos ménagers te parleront souvent du « petigo tourteraoú de Paúlà Arènaú , que fue estrangolado para la neui entréo lou soutiféo de sua doulcinéa y sua gargameléou, porque la  Paúlà Arènaú estabada particoulièramenta esdistraitéa quondá se habia esprisso lou piè suia ».

Tu m'entends bien, Gringoire.

Hommage à Paul Arène


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Commentaires
K
très recherché , beaucoup d'humour ... moi aussi cela m'a bien amusée.. et la réponse de Papistache à Zigmud aussi .. vous êtes fortiche!!<br /> j'ai appris aussi l'existence de Paul Arène , merci.
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T
Je vous dois mon premier rire de la journée..<br /> Et de bon coeur, même !<br /> Merci, c'était savoureux !
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V
entre maures et esterel j'y suis déjà!!
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K
Ca fleure bon la Provence mais la Beauce aussi avec l'champ d'naviots (que j'connaissions point !) La chèvre de Monsieur Seguin nous emmène ailleurs dans l'espace et le temps et la culture : merci Papistache pour cette ambiance !
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M
Grâce à vous Papistache j'ai appris pas mal de choses sur Paul Arène le nègre de Daudet ... et sur ce fameux Gringoire !!!<br /> Merschiste beaucoup !
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T
Belle traduction de l'occitan Papistache ! Un cabri qui voulait voir le loup ?
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W
Le soutiféo, même absent de mon dictionnaire, m'a bien fait rire moi aussi !
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J
Ici on apprend tout sur Paul Arène (de Nîmes ? Non de Sisteron !)<br /> On en apprend encore plus sur Wikipédia et c'est drôle aussi : "En 1868, Paul Arène écrivit ce qui reste son chef-d'œuvre, Jean des Figues. Après 1870, il publia des chroniques, des contes, des poèmes, dont notamment Le Tors d'Entrays, Le Clos des âmes, Le Canot des six capitaines, Au Bon Soleil et La Gueuse parfumée, deux recueils de contes. Vinrent ensuite La Chèvre d'or, puis Les Ogresses, Le Midi bouge et Domnine."<br /> Le buste de Paul Arène ressemble terriblement à la physionomie de Papistache, ne trouvez-vous pas ?
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V
Un soutiféo Marie-Jo, celui qu'il vous faut<br /> Mèèèè...<br /> Y a pas d'Mèèèè !
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P
Zigmund, le champ d'naviots, chez Gaston Gouté, poète beauceron (toute fin du XIXe siècle et tout début du XXe) c'est le cimetière, et pour moi, le cimetière, c'est la fosse, la terre, les dalles de pierre, les croix de fer, le retour à la poussière originelle...<br /> <br /> Pour vous :<br /> L’matin, quand qu’j’ai cassé la croûte,<br /> J’pouil’ ma blous’, j’prends moun hottezieau<br /> Et mon bezouet, et pis, en route !<br /> J’m’en vas, coumme un pauv’ sautezieau,<br /> En traînant ma vieill’ patt’ qui r’chigne<br /> A forc’ d’aller par monts, par vieaux,<br /> J’m’en vas piocher mon quarquier d’vigne<br /> Qu’est à couté du champ d’naviots !<br /> <br /> Et là-bas, tandis que j’m’esquinte<br /> A racler l’harbe autour des " sas "<br /> Que j’su’, que j’souff’, que j’geins, que j’quinte<br /> Pour gangner l’bout de pain que j’n’ai pas …<br /> J’vois passer souvent dans la s’maine<br /> Des tas d’gens qui braill’nt coumm’ des vieaux ;<br /> C’est un pauv’ bougr’ que l’on emmène<br /> Pour l’entarrer dans l’champ d’naviots<br /> <br /> J’en ai-t-y vu d’pis l’temps que j’pioche !<br /> J’en ai-t-y vu d’ces entarr’ments :<br /> J’ai vu passer c’ti du p’tit mioche<br /> Et c’ti du vieux d’quarter’ vingts ans ;<br /> J’ai vu passer c’ti d’la pauv’fille<br /> Et c’ti des poqu’s aux bourgeoisieaux,<br /> Et c’ti des ceux d’tout’ ma famille<br /> Qui dorm’nt à c’tt’ heur dans l’champ d’naviots !<br /> <br /> Et tertous, l’pèsan coumme el’riche,<br /> El’rich’ tout coumme el’pauv’ pèsan,<br /> On les a mis à plat sous l’friche ;<br /> C’est pus qu’du feumier à pesent,<br /> Du bon feumier qu’engraiss’ ma tarre<br /> Et rend meilleur les vin nouvieaux :<br /> V’là c’que c’est d’êt’ propriétare<br /> D’eun’vigne en cont’ el’champ de naviots ! <br /> <br /> Et tertous, l’pèsan coumme el’riche,<br /> El’rich’ tout coumme el’pauv’ pèsan,<br /> On les a mis à plat sous l’friche ;<br /> C’est pus qu’du feumier à pesent,<br /> Du bon feumier qu’engraiss’ ma tarre<br /> Et rend meilleur les vin nouvieaux :<br /> V’là c’que c’est d’êt’ propriétare<br /> D’eun’vigne en cont’ el’champ de naviots ! <br /> <br /> Après tout, faut pas tant que j’blague,<br /> Ca m’arriv’ra itou, tout ça :<br /> La vi’, c’est eun âbr’ qu’on élague …<br /> Et j’s’rai la branch’ qu’la mort coup’ra.<br /> J’pass’rai un bieau souèr calme et digne,<br /> Tandis qu’chant’ront les p’tits moignaux …<br /> Et quand qu’on m’trouv’ra dans ma vigne,<br /> On m’emport’ra dans l’champ d’naviots !
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Z
effectivement un petit côté chèvre de mr seguin version provençale mâtinée de X ( bene !?)<br /> demain, irai voir pourquoi "l'champ d'naviots " a un lien avec le minéral
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