une et indivisible (Poupoune)
On n’imagine jamais à quel point on est capable d’aimer. Jusqu’au jour où on aime. Sans s’y attendre, presque par mégarde. Et soudain on aime plus qu’on n’a jamais rêvé d’être aimé soi-même. Au point qu’on pourrait donner ses deux bras, ses deux jambes, son cœur, sa vie, son âme. Au point de s’oublier soi-même dans l’amour de l’autre. Au point de ne plus vivre, penser, sentir, espérer, frémir, rêver que par et pour l’autre.
Et c’est comme ça que je l’aime.
Tant et tellement que j’ai même fini par aimer le rose des nœuds dans ses cheveux. Et le rose de ses jupettes à fleurs. Et le rose qu’elle a réussi à me faire mettre sur les murs de sa chambre. Et le rose de ses joues, par-dessus tout. Ses jolies joues rondes que je pourrais passer mes nuits à embrasser, pendant que mes doigts joueraient avec ses petits cheveux fins sur sa nuque. Les yeux clos, je me laisserais bercer par la douceur de son souffle ensommeillé et j’oublierais tout ce qui n’est pas elle en attendant le jour.
Mais il est l’heure. Je dépose sur son front une touche de rouge du bout des lèvres et je quitte sa chambre sur la pointe des pieds pour ne pas faire claquer mes hauts talons. J’ajuste ma jupe pour qu’elle cache la dentelle de la culotte, pas celle de la jarretelle. Je tire sur mon débardeur minimaliste pour laisser apparaître le cœur tatoué sur mon sein. Un coup d’œil au miroir pour retoucher le maquillage… J’ai une sale tête. Mais qui s’en soucie ? C’est pas pour mes jolis yeux qu’ils paient.
J’adresse une prière muette à la nuit pour qu’on se retrouve toutes les deux vivantes au matin.
Je suis la femme de tous les hommes, mon cul est à tout le monde, mais mon cœur est tout entier à la petite merveille improbable née de mes tristes amours éparpillées.