Nocturne (Anthom)
C'est la nuit à la campagne, ici, pas de pollution lumineuse, les étoiles semblent figées dans une immobilité antique, la fenêtre est ouverte sur la fraîcheur nocturne de cette fin septembre. Devant la fenêtre, passe une petite route qui fut longtemps chemin, deux voitures s'y croisent avec peine. De l'autre côté s'étend le jardin. C'est le silence. Ici on entend véritablement le silence. Dans cette chambre nichée dans un ancien bâtiment de la ferme, séparée du corps de la maison par une cour gravillonnée, on dort dans un silence ouaté. Les seuls bruits qui me parviennent sont ceux de l'extérieur.
D ans l'obscurité, il y a ...
I l y a l'appel un peu lointain en trois tons d'une chouette, elle doit nicher dans l'un des vieux chênes qui bordent le terrain,
P lus loin, venant du hameau voisin, les aboiements répétés, un peu étouffés d'un chien,
L e doux ronronnement de mon chat qui, après avoir longtemps cardé la couette avec un griffement agaçant l'oreille, a enfin trouvé sa place , la tête nichée sur ma main,
O n entend, tout près, derrière la porte, le froissement fricatif des feuilles sèches dans lesquelles mon chien se ménage une litière comme un nid qui épouse la courbe de son échine,
D ans le silence qui m'entoure, je peux percevoir, au fond de l'oreille, les pulsations de mon sang, notre corps ne se tait jamais complètement,
O ù niche cette belette dont le cri jaillit soudain du jardin comme un appel implorant?
C' est de nouveau le silence rompu seulement par la respiration régulière de celui qui partage ma nuit,
U n grondement sourd monte du fond de la nuit, enfle et, à son apogée, fait vibrer les carreaux de la fenêtre, le train de deux heures trente trois passe sur la voie ferrée qui, plus loin, derrière la maison, traverse les champs,
S ur la campagne obscure, le silence est retombé, le sommeil ne vient pas,j'allume la lampe et reprend ma lecture interrompue.