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Le défi du samedi
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8 juin 2009

Le dernier homme (Vegas sur sarthe)

Le dernier homme sur la Terre était assis tout seul dans une pièce. Il y eut un coup à la porte...
un coup pourtant léger comme un froissement d'ailes de papillon mais, dans l'absolu silence qui règnait ici, le coup lui fit l'effet d'une détonation!
Il attendit une éternité, l'oreille tendue vers la porte, retenant sa respiration à la limite de l'asphyxie; ses ongles plantés dans les accoudoirs du fauteuil lui faisaient un mal de chien et il fit un effort surhumain pour se détendre un peu. Ses pauvres muscles étaient durs comme la pierre et malgré la chaleur qui règnait dans la pièce une sueur abondante et glacée coulait dans son cou.
Dans le souffle plus régulier de sa respiration, il sembla distinguer un autre souffle, comme un écho lointain et plus aigu... mais ça ne pouvait être qu'une hallucination de plus, comme celles qui le faisaient crier certaines nuits depuis le cataclysme.

Il avait dû dormir longtemps tant la lumière du jour était faible et il se força à bouger un peu, quitta le fauteuil trempé pour déplier sa carcasse en grimaçant; dans quelques heures il pourrait sortir respirer l'air frais de la nuit et, si les fauves lui en laissaient le temps il irait jusqu'à la mare pour se laver.
Ce bruissement d'ailes lui taraudait l'esprit au point qu'il se risqua à déverrouiller la porte et l'entr'ouvrit avec d'infinies précautions...

Elle était là immobile devant lui, nue tout comme lui, un peu voutée et l'air abasourdi comme lui puisque c'était lui, enfin son sosie féminin!
Elle avait les mêmes traits émaciés et sa posture aussi, même si la poitrine était lourde et les hanches plus rondes, et il vit aussitôt qu'elle reproduisait le moindre de ses mouvements, comme si elle tenait la poignée de la porte avec lui; il pensa d'abord qu'on avait apporté ici une glace magique qui reflétait son image au féminin, mais comme il poussait un râle, la créature lui répondit par le même râle!
Il n'y avait qu'elle et lui mais il porta instinctivement une main sur son bas-ventre, et elle en fit de même.

Décontenacé, il ouvrit brutalement la porte et aboya: "Qui es-tu?"...La créature répondait "Qui es-tu" d'un même timbre de voix, la même intonation; il était face à un clône et si cette explication lui semblait la plus rationnelle, elle ne le rassurait pas pour autant.
L'homme s'était habitué à sa solitude et l'idée de partager avec soi-même lui faisait peur; et puis partager quoi? ses maigres vivres, l'eau de la mare et l'unique fauteuil de cuir?
Comme il s'avançait sur le seuil de la porte, il eut soudain envie de toucher cet autre soi, et avança la main vers elle, ce qu'elle fit aussi; une même lueur d'incrédulité brillait dans leurs yeux, le battement des paupières, jusqu'à la respiration étaient semblables.
Alors son index effleurant l'index, il y eut un chuintement étrange comme une baudruche qu'on dégonfle, la créature se volatilisa ne laissant dans la poussière que l'empreinte furtive de ses pieds... et l'homme se vit seul face au désert vide où une lune pâle vacillait.

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Commentaires
T
Fallait y penser! Un clone! C'est tellement bien décrit que je tremblais presque en allant ouvrir la porte avec le personnage...
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C
Je penche comme Zigmund, as-tu d'autres histoires de pupées gonflables en stock?
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Z
mirage ou poupée gonflable à son image ?
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V
Je ne connaissais pas cette expression
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T
"...un grain de sable dans le slip d'un papillon à l'autre bout du monde..."
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V
@ tiniak : mon grain de folie est trop petit pour me permettre d'aller coloniser Mars
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T
... parce qu'on perçoit ici une ambiance qui rappelle, aussi troublantes, celles de Bradbury.
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P
de la douceur dans des mots de fin du monde ...
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T
"Toute tentative de faire poindre l’optimisme malgré tout, dans nos productions, sera appréciée".<br /> Bon, d'accord, j'ai traduit par "bienvenu", je n'étais pas bien loin tout de même, non?<br /> Ardemment bienvenu, donc, j'en prends bonne note !
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P
Ah ! Maintenant que vous me dites, docteur...
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V
Comment ça? Vous n'avez pas senti le pouième d'un chouia de tentative de faire poindre un soupçon d'optimisme dans mon récit?
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P
J'avais écrit "Bienvenu", Tiphaine ? <br /> Je ne me souviens plus !<br /> Ma langue aura fourché, je pensais probablement à "ardemment bienvenu".
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T
Papistache, l'optimisme était bienvenu, pas obligatoire, non? Un récit apocalyptique est rarement optimiste, il me semble !<br /> Cela dit, cette fin est vraiment terrible...
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P
C'est curieux cette propension à offrir l'extinction de l'humanité comme souffle d'optimisme ! Vous n'aimez pas la vie que vous ne vouliez pas la reconduire ?
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P
l'idée de ce double surréaliste est troublante à souhait...
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W
Regarder, pas toucher ! Je l'ai toujours dit...<br /> Excellent vegas !
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J
Un mirage dans le desert... quelle torture ca doit etre!
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V
La boucle est bouclée. Adam y avait mis le doigt et le dernier homme aussi! Incorrigibles...
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M
Excellente idée Végas ! Comme le dit Joye on voit très bien le film se dérouler devant les yeux. SUPER !!!
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R
et voilà, faut encore qu'il fasse une b^étise.<br /> comme si l'histoire de la côte ne lui avait pas suffit !!!<br /> <br /> j'aime beaucoup cette histoire, du double féminin<br /> et la délicatesse de ses traits suggérés
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V
Oh, le double féminin, jolie idée !
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V
Oh, c'est joli, ça. <br /> J'aime.
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J
Surréel à souhait, Vegas, j'aime beaucoup, surtout les descriptions, je peux bien situer cette histoire, ça passe comme un film devant mes yeux, grâce à tes descriptions. Alors, bravo !!!
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