Dernier sal☺☺n de l'Iowa de la saison : hip, hip, hip, hourra...
Où en sommes-nous ?
Joye, Tiphaine, tiniak, Joe Krapov, shivaya-warduspor, Poupoune, PHIL, Brigou, Virgibri, Vegas sur sarthe, Ondine, Zigmund, MAP, Plume Dame, Martine27, rsylvie, Pandora, Papistache, Moon, Caro_Carito, Val,
On my own (Val)
J 1
Je suis arrivée à La Roche sur Yon par le train. J’ai retrouvé Elodie à la gare. Nous avons pris l’autocar qui nous emmène maintenant à Ouistreham. C’est drôle d’avoir dû descendre en Vendée pour remonter en Normandie en bus.
J 2
Il paraît que dans le ferry de nuit on peut dormir. Trop excitées, nous avons oublié de dormir. Ce matin, nous n’étions pas fatiguées, nous avons pu nous promener dans Londres, mais maintenant, le coup de barre est là.
C’est sympa, Londres.
Je ferais bien une petite sieste dans le train, mais j’ai peur de rater mon arrêt. Avec Elodie nous nous sommes séparées après le déjeuner, dans la gare de Londres. Depuis je suis toute seule. Je suis un peu pressée d’arriver. J’ai envie d’une douche.
J 3
Je suis arrivée hier en gare de York en début d’après midi. Jo m’y attendait comme prévu.
C’est une femme gentille, elle a la cinquantaine. Son mari n’est pas là, il est parti pour quelques jours, je ne le rencontrerai que plus tard.
Jo m’a déjà montré le trajet en bus pour me rendre au travail, ainsi que des choses importantes comme le distributeur de billets, ou encore le bureau de tabac ou l’office de tourisme.
J 5
Je suis épuisée. J’ai fait ma première journée de travail ce matin. Comme c’est beau !
Les gens sont sympa et accueillants, la maison est superbe, mon travail est intéressant. C’est super, ce job, mais aussi super fatiguant. Je mange et j’vais au lit !
J 7
Le soir, je regarde des conneries à la télé. C’est marrant, la télé anglaise, mais abrutissant.
La matin, j’écoute les infos à la radio pendant le petit déjeuner, mais je n’y comprends pas grand chose. Ils parlent trop vite.
A la fnac, j’ai trouvé des bouquin de Christian Jacq en français, ça ne va pas me faire de mal, de lire un peu.
Sinon, je n’ai jamais autant bu que depuis que je vis chez Jo et Jim. Ils boivent une bière en rentrant du travail, un verre de vin en préparant le repas, des verres de vodka et de tequila après le dîner, ça n’arrête pas. Je devrais peut-être parfois apprendre à dire « no ! ».
J 10
Je rentre de Leeds. J’y ai passé le week-end avec Elodie. Elle n’a pas de chance, Elodie, elle s’ennuie ferme à l’université. Moi, j’ai du bol, j’ai un bon stage. En revanche, elle est logée dans une auberge de jeunesse. Il y a plein de jeunes de plusieurs nationalités. Le soir, elle sort, elle visite, elle s’amuse. Chez Jo et Jim, il n’y a qu’une seule chambre à louer, c’est pas pareil, je m’ennuie parfois un peu, surtout qu’ils bossent beaucoup. Pas grave, le soir, je joue à la ba-balle avec Angus, le chien du couple.
J 15
Chaque semaine, ma Mamie me téléphone pour prendre de mes nouvelles. Je vais très bien. Les journées de travail passent très vite, je suis très occupée. Je rencontre plein de gens intéressants. Mon maître de stage m’a filé des entrées gratuites pour tous les musées de la ville (et dieu sait qu’il y en a !), et quand il n’y a pas foule au musée, il m’envoie en visiter d’autres. Il fait beau, c’est le printemps, le soir je flâne un peu avant de rentrer. Je visite les parcs, les jardins, les abords de la cathédrale, je marche sous les remparts.
J’aime cette ville.
J 20
Je sens que j’ai fait des progrès énormes en anglais. J’en ai tellement fait que mon maître de stage me fait faire les visites, la réception et de la traduction en français, maintenant. Il doit se dire que j’ai assez progressé comme ça dans sa langue, et que maintenant ma langue maternelle leur sera plus utile que mes progrès.
Les claviers querty, c’est chiant.
J’aime beaucoup mes collègues de travail. Je ne déjeune plus seule le midi. Ils m’ont invitée à me joindre à leur pique-nique quotidien dans le parc en face. Ils me bombardent de questions sur la France.
J 30
Elodie vient passer quelques jours à York avec moi. Elle est en congé, pas moi. Le musée est ouvert pour bank holiday. Pas grave, j’ai demandé l’autorisation, elle va pouvoir venir au travail avec moi. Ce soir, nous irons ensemble à la fête foraine. J’ai demandé à mes collègues une liste de choses sympas et de sites à voir, et demain je nous partirons en excursion pour la journée.
J 40
Je me plais beaucoup ici. Jo et Jim m’ont emmenée au restaurant la semaine dernière. C’est drôle, on a dîné à 18h… c’est super tôt !
Jim était fatigué, il est rentré. Jo m’a emmenée dans des pubs. C’était sympa, il faisait chaud. Nous sommes rentrées très très tard, elle et moi. Elle est fun, mais je trouve qu’elle boit pas mal.
Plus que cinq jours, et je n’ai pas encore eu le temps de tout voir. J’aimerais rester encore quelques semaines…
J 45
Après une soirée bien arrosée dans les pubs de Leeds, j’ai dit au revoir à Elodie. Son stage est terminé, elle rentre en France. Nous ne nous reverrons qu’à la rentrée.
Le mien aussi est terminé, mais je reste. Jo et Jim m’offrent la location gratuite de la chambre jusqu’à la fin de l’été. Je me plais bien, ici…je n’avais rien prévu pour les grandes vacances.
Voyage sur la frande / Carnet 57- dGH (Caro_Carito)
15 VI 2742 Les
minuscules points blancs qui semblent s’écraser sur la vitre avant me font
penser à de la neige. Le ciel a la densité d’une encre de chine. Enfin, c’est ce
qu’avançait au début du millénaire Tokhen Shi. Je n’ai jamais rien vu
d’approchant et les rares vestiges des œuvres au pinceau du Maître sont enfermés
dans un bunker à plusieurs mètres sous la croûte terrestre. Bientôt, le vaisseau
retrouvera une vitesse moins inhumaine. J’échapperai pour deux rotations à la
surveillance ténue des awacs de l’espace et je m’envolerai au-delà de la Frange.
Tout est programmé. 16
VI 2742 Je
remplis le dernier questionnaire pour signaler ma position. Le consortium
stellaire aime savoir où chacun de ses membres se trouve. Pour notre bien. Je
regarde en utilisant un plus fort grossissement les planètes de l’archipel des
Cyclopes. Elles ont gardé cette douce variété de bleu qui se nuance de reflets
camaïeu. L’eau. Empoisonnée mais omniprésente sur sa surface. Dans deux minutes,
mon petit robot Souznic sera éjecté et enverra à intervalles réguliers les
rapports nécessaires pour ma quiétude et mon éloignement temporaire. J’ai un
petit pincement au cœur. Rester là. Là où mon odyssée personnelle a démarré et
où Xilos Népomucène, humble citizien du consortium céleste a cédé la place à
Xilos le baroudeur stellaire. Je
viens de dire au revoir à Souz nik. Je sais c’est puéril, il n’est qu’un
assemblage de circuits et de matières dérivés mais c’est le plus avancé de mes
droïdes. Je l’envierai presque ; plusieurs semaines à contempler les
éruptions gazeuses qui maculent la planète d’éclats mordorés. Et pénétrer le
regard plus avant sous l’épaisse d’écorce de quartz et de granit avec les yeux
de sa sonde. Ca me rappelle la première fois où j’ai débarqué ici ; j’ai
conservé mes croquis de l’époque. Je travaillais au fusain sur de gros blocs
notes que j’avais troqué contre une bouteille d’aguardiente à l’avant poste de
Guarzar, à quelques mille-lumières d’ici. 17
VI 2742 Le
vaisseau a passé le point de non retour. Ici règne l’ombre absolu. Je ne crois
pas qu’une peinture puisse retranscrire cette noirceur inhumaine. Pas un souffle
de vie. Un règne minéral. Il est temps de faire un petite somme d’une heure ou
deux. La Frange n’est pas loin. Je
me suis réveillé en sueur. Pourtant la clim n’a pas bougé d’un iota. C’est
toujours comme ça, chaque fois que je travers la frontière intangible de la
civilisation, le souvenir de ma première errance revient en force. J’étais
jeune. Excité comme un jeune chiot et inconscient. J’avais pris ce poste risqué
d’ingénieur dans les limites du monde ordonné. Et puis, trop loin de Guarzar,
j’avais eu une panne. J’avais sondé les mondes environnants et il était clair
qu’il me fallait trouver secours au-delà de la Frange. J’avais de quoi faire un
aller retour en étant sûr d’atteindre une ville, enfin une ville… Quelque chose
où s’agglutinaient mercenaires et rejetons d’indésirables, chassés quelques
décennies auparavant du consortium céleste. La peur m’avait collé aux basques
jusqu’à ce je revienne sain et sauf, les pièces défaillantes remplacés par des
neuves. Mais
j’avais pris le goût du voyage et de l’inconnu. J’y étais retourné dès que
possible sans plus chercher de prétexte. 18
VI 2742 Voilà.
J’ai laissé derrière moi les météorites de la Frange. Une forte luminosité
m’aveugle presque. Dans quelques heures, je retrouverai la première planète
sauvage habitée. Je regarderai les deux soleils s’écraser sur la ville haute et
le fleuve avant de m’égarer dans un bouge souterrain pour y nocer avec
méthode. C’est
drôle avec ma gueule abimée par l’âge et les voyages, je suis plus chez moi ici,
parmi tous ces fracassés que sur ma Terra de naissance. Là-bas, tout est si
propre est verdoyant, chacun transite sur une trajectoire de perfection, l’âme
et le corps retouchés depuis l’enfance. Je suis un lépreux parmi les miens,
nostalgique de planètes mortes et de villes bétonnées et
métallisées. Terra,
calibrée et miraculeuse, recouverte de prés et lacs translucides. Pas un bruit
trop haut, pas un geste démesuré. Je suffoque, ma Terra, dans ton oxygène
purifié et mon cerveau suinte l’ennui. Je
regarde une dernière fois mon visage sur lesquels se sont incrustées les
émotions charriée pandant mes voyages avant de contempler la ville blanche, son
fog épais et l’étendue liquide qui la ceint. Déjà le ballet désordonné du trafic
s’épaissit en un nuage de moustiques d’acier. Vrombissant.
Sautillant. Juste
avant d’amorcer la descente, j’hume l’air saturé et épais comme un cadeau de
bienvenue.
Bodhgaya, Bihar Inde (Moon)
Haï-kus à l’indienne
Elle sèche la flaque de boue
Le buffle y est couché
Seule sa tête émerge.
La pluie est tombée à l’est
Le lit de la rivière est encore trop grand
Pour le peu d’eau qui gargouille.
La rivière est là pour quelques jours
L’éléphant n’est plus au bord
Il a laissé la pierre qui attachait sa patte.
Le vieux moine est courbé au dessus de sa canne
La grotte de Buddha était si basse.
La fête est de l’autre côté de la rivière
Elles remontent haut leurs saris rouges
Les villageoises.
C’est une monotone psalmodie
Du moine chinois
Qui pointe son doigt
Vers la boite à donation.
La broderie anglaise a de beaux trous
Sur la peau noire
Des pèlerines du Sri Lanka.
La feuille du figuier sacré
Est tombée dans mon cahier
J’attends l’éveil.
Journal d'une blogueuse en terre du Perche : mai 2008 (Asphodèle)
Nous
avions convenu d’un rendez-vous, ici, entre les murs de la maison
jaune. Elle était arrivée à l’heure dite, un peu inquiète. J’étais
intimidé. Nous nous étions connus par la grâce des blogues. Une amie de
blogue : belle écriture, racée, tendue, joli vibrato.
C’était l’an dernier, à peu près à cette époque. Un peu plus tôt. A peine.
Mamoune
avait sorti les jolis verres. On avait parlé longtemps autour de la
cheminée froide — en mai, évidemment—. Elle portait un joli prénom qui
m’évoqua l’orient, des yeux de biche ; toutefois, j’avais voulu
continuer à la désigner par son pseudo de blogueuse : Asphodèle. Il lui
allait bien.
Le lendemain matin, j’avais la tête un peu lourde, je
m’étais couché tard, je lui avais proposé d’aller acheter les
croissants. Mamoune et moi l’avons attendue en vain. Elle n’est pas
revenue. Son blogue est resté muet. Elle n’a plus jamais déposé le
moindre commentaire sur le mien. Asphodèle s’est mystérieusement
évaporée.
C’est
Jean-François, de la compagnie des Eaux qui m’a remis ce carnet rongé
de moisissures. Je connais bien Jean-François, je faisais du vélo avec
son père : il me coiffait toujours au sommet de la côte du Liberot, un
fameux grimpeur. Jean-François n’est pas tenu de soulever la plaque qui
protège le compteur :
— Laissez, Papi, me dit-il à chaque fois. J’ai
l’habitude. Et il soulève délicatement la lourde dalle de ciment,
relève la consommation d’eau au compteur et me salue en claquant les
doigts. Son père faisait ça aussi.
— Tiens, qu’est-ce que c’est ? a-t-il lâché lundi en ouvrant le citerneau.
Il
m’a tendu le carnet broché gonflé d’humidité. J’ai reconnu l’écriture,
nous avions échangé quelques lettres via la poste : Asphodèle. Elle
avait dû poser l’objet sur le muret, un coup de vent ou le passage d’un
chat l’aura précipité au fond du trou : la dalle joint mal par endroits.
Certaines pages sont illisibles. Les dernières sont vierges. Je vais tenter de recopier au propre les moins abimées, ce sera ma participation au défi lancé par Valérie : Le récit du voyage d'Asphodèle la blogueuse en terre percheronne, en mai 2008.
Lundi 22 mai 2008
6 h 35 : Le jour est levé. Papistache et Mamoune dorment encore. Je suis sous le charme. Je pensais bien qu’il n’était pas devant son écran pour son billet de 6 h 01. Il triche. Il poste son billet la veille au soir. Coquetterie de vieillard. J’ai relu mes notes d’hier soir quand je décris mes impressions. La nuit n’a pas modifié mon sentiment.
7 h 12 : Mamoune est venue frapper à la porte de la chambre rose. Son époux est fatigué. Elle me propose d’aller acheter le pain et les croissants pour que nous déjeunions ensemble. Je n’ose accepter. Quel honneur ! Elle me griffonne un plan “... pour éviter que tu ne te perdes...”. Je refuse le billet qu’elle me glisse entre les doigts. Elle insiste. Je cède.
8 h 59 : Je quitte à l’instant l’angle que forme la rue Léon avec celle des Docteurs Piqûre. Il faut que je note pour ne pas oublier. Un choc. Au milieu de la route, un blason de fonte. Je l’ai dessiné du mieux que j’ai pu. Une évidence s’est faite. Ce blason, c’est lui qui l’a posé là, jadis. Je l’ai débarrassé des cailloux qui obstruaient le relief de dessin. De ma lime à ongles, j’ai ôté le goudron qui s’était infiltré dans les rainures fines. Une voiture vert improbable a failli me renverser quand, à quatre pattes, je recopiais la devise en lettres majuscules. Le chauffeur m’a indiqué la direction du ciel de son majeur tendu. Il était serein, bleu, exempt de nuages. Je me dépêche.
9 h 36 : J’achève de dessiner ce coquelicot qui a poussé au pied d’un mur de silex, exposé plein sud. Dans la rue, nulle autre végétation que ce coquelicot à la tige grêle. Le Papistache, à chacun de ses passages ne peut manquer d’en suivre la croissance. Si l’espèce n’était pas déjà répertoriée, je l’aurais baptisée papistachlicot. Mamoune a noté un point de vue exceptionnel sur son plan. Je vais m’y rendre.
11 h 12 : Quelle émotion ! Ni Klee, ni Kandinsky, jamais, n’auraient rêvé plus belle composition. Le buveur de thé en jouit tous les jours. Mon croquis est immonde, tant pis, la beauté du lieu me trouble.
12 h 29 : Au carrefour, je n’ai pas hésité. Le grand disque barré de blanc me sert de guide. Merci Mamoune. Je grave mon cerveau de tous les repères que je prends pour mon retour.
13 h 44 : Dans la rue déserte, un étrange animal m’est apparu. Sans les longs poils ondoyants on aurait pu penser à un chat. A mon approche, il s’est glissé sous une voiture en stationnement ornée d’une représentation stylisée de lion se cabrant fièrement. Se pourrait-il que Papistache caresse la bête lors des courses matutinales* (* je lui emprunte son mot fétiche).
J’ai tenté d’amadouer l’esprit sauvage de la petite bête. J’ai éc houé. Le soleil a tourné et a éclairé le bitume sous la voiture ; j’ai constaté que l’esprit s’était enfui. Je me dépêche.
15 h 01 : Une trouvaille. Dans le caniveau, à côté de petits cylindres fibreux couverts de papier jaunâtre, trois ballons de baudruche dégonflés, noués d’une même ficelle à rôti blanche. Vestiges d’une fête anniversaire. Papistache aurait su tirer un conte de la présence de ces reliques abandonnées. Je lui en lui offrirai le dessin. Il y puisera matière à un billet dont il a le secret.
16 h 45 : J’ai un peu tourné en rond. Mamoune m’indique deux boulangeries. Elle a oublié de me dire derrière quel comptoir officiait Mme Patapin. Finalement, j’ai opté pour la plus lointaine, puis me suis ravisée, me suis dirigée vers l’autre, ai regretté, suis revenue sur mes pas, me suis assise sur une marche d’immeuble, ai attendu un signe. C’est une tourterelle qui m’a décidée. Je l’ai suivie.
16 h 59 : Le véhicule du boulanger est rangé dans la rue. J’approche du lieu saint. Je griffonne son enseigne. Ma main tremble.
18 h 01 : Je m’amuse de la coïncidence. 18 h 01 ! Le billet de Papistache est paru depuis douze heures et je ne l’ai pas encore lu. J’avise un troquet : peut-être a-t-il un accès internet ? Je traverse la rue.
19 h 27 : Je sors du cyber café que le patron du troquet a bien voulu m’indiquer. Il était à l’autre bout de la ville. J’ai mal aux pieds. Quel billet ! Papistache s’est surpassé. Ma visite a dû le dynamiser hier soir. Je dois arriver à la boulangerie avant l’heure de fermeture. Pourvu que je ne m’égare pas dans le dédale des rues désertes.
20 h 01 : La boulangerie était bien ouverte. Hélas, il n’y a qu’en province qu’on voit des échoppes aussi désespérément dépouillées, plus une viennoiserie, plus une miette de pain. Mme Patapin me déçoit un peu. Elle est boudinée dans son tablier, pâle et semble bien fatiguée.
22 h 38 : J’ai fait tous les magasins du bourg et n’ai pas trouvé une demi-baguette à rapporter. Je suis mortifiée. Comment vais-je être reçue ?
23 h 17 : La lumière vient de s’éteindre derrière les volets clos de la maison jaune. Ils ont cessé de m’attendre. La lune jette une ombre lourde de sens sur le sol de la rue Léon. Je la reporte vivement sur une page blanche. Je vais déposer, en guise d’adieu, mon carnet et le billet de vingt euros sur le muret — la fente de la boîte aux lettres est trop étroite —Papistache les découvrira, il comprendra que je ne pouvais dignement me présenter à ses yeux. Quand il m’aura pardonné, il me fera signe.
Asphodèle, je vous en prie, revenez. J’ai acheté une machine à pain !
Les voyages ne forment pas que la jeunesse (Pandora)
J’étais d’abord emballée à l’idée de partager une anecdote de voyage mais bien vite, je me suis trouvée à hésiter, laquelle choisir ? Il me revenait tant de souvenirs.
Me fallait-il parler de Madagascar, cette ile merveilleuse qui m’a donné le goût des voyages et des destinations lointaines ? Aurais-je fait les mêmes choix de vie si je ne les avais pas décidés là-bas ?
Me fallait-il parler des émotions vécues lors des séjours dans la brousse africaine, quand je m’enrichissais paradoxalement au contact de la pauvreté et de la maladie. On croit partir pour aider l’Autre, on en reçoit énormément.
Me fallait-il parler du Kilimandjaro et du défi que je relevais ? De ce message que j’adressai à mon intruse en montant assister au lever du soleil depuis le sommet de l’Afrique.
Me fallait-il parler du pouvoir des voyages quand pour la première fois, lors de la grande traversée du Zanskar, je racontai mes petites histoires à la veillée et parlai de mon intruse, sans écran interposé ?
Me fallait-il parler des sourires de ces gosses des rues et des campagnes, ces enfants qui jouent avec un ballon fait de tissus et de sacs plastiques quand nous voulons toujours plus ?
Me fallait-il parler de la paix retrouvée lors du Tour des Annapurnas ? Au-delà des paysages magnifiques, la dimension philosophique et spirituelle de ce voyage m’a ouvert des perspectives inespérées.
Tellement de pages remplies de souvenirs et toutes celles, encore vierges, à vivre et à écrire pour mon plus grand bonheur. Les voyages ne forment pas que la jeunesse.