Le signe du cormoran (Mariev)
Très tôt chaque matin elle fuit vers la belle eau,
Elle court à perdre haleine
pour jouir du sable blanc,
Bondit dans le crachin fin,
vif et gai des flots,
Boit le sel de sa peine et
sort en défaillant.
Ce matin, elle a ouï le cri
d'un cormoran.
Quand elle voit l'oiseau, il
est déjà trop tard,
La fiente a chu sans bruit
et git bien mollement
Sur son nez qu'elle a gros;
voyez le traquenard !
Pas le temps de dire
« ouf », surgit un beau gaillard,
Le cheveu dru et gris, la
jambe souple et forte.
« Est-ce donc de la
schnouffe? » s'enquiert-il goguenard.
« Oh, c'est drôle, je
ris ... », elle voudrait être morte.
Un fou rire plus tard, sa
main sur son poignet.
« Enchanté, moi c'est
Paul! », « Et moi c'est Virginie ».
« Tiens, comme c'est
bizarre ... » « … ah bon, vous y croyez ? »
Et sa main sur l'épaule …
elle est toute étourdie.
A l'aube chaque jour, ils
vont vers l'océan,
L'oeil vif et plein d'amour
nourrir l'oiseau farceur.
Ils rient de tout, de rien,
même de leurs tourments,
Parce qu'ils savent bien à
quoi tient leur bonheur.