La recette du KadHB (Joe Krapov)
- Eh bien aujourd’hui, ma chère Catherine,
nous allons nous intéresser à la recette du KadHB pour les ceusses qui sont un
peu galaffes et qui aiment à se fourrer des bonnes choses dans le copail !
- Je suis prête, môssieu Raymond. J’ai mis ma catiolle
et ma belle devantière !
-Vous allez commencer par me sortir vos orceux !
- Tous ?
- Il faut une robervalle avec son valiseau, un
fil à couper l’amann de la Prévalaye, une boursoule à bords relevés, un rollet
à pâtisserie, une bolée et un grand coulvassier.
- Voilà, voilà. J’ai tout déballé.
- Les ingrédients à présent : il faut 200
g. de farine, 200 g. de sucre et 200 g. d’amann,une pincée de sel, du lait, de
l’huile et un sachet de levure de boulanger lyophilisée.
- Oh oui, oh oui, j’aime la levure !
C’est ce qui fait gonfler la pâte ! Mais je ne savais pas qu’on pouvait
lyophiliser les boulangers !
- Justement ! Vous allez commencer par me
remplir une bolée d’iao au robin. Veillez à ce qu’elle ne soit ni trop chaude, faut
pas qu’elle soit à bouëdre, ni trop froide, mon boudet. Comment ça fait-y quand
vous y boutez le doigt ?
- Hi ! Hi ! C’est mouillé !
- Dans votre bolée d’iao à 37°, vous y versez
la levure. Mélangez, maintenant.
- Beuh ! C’est dégueu ! C’est comme
quand je me suis guénée à la rave !
- On va faire d’abord la pâte à bara. Fourrez
donc une tapée de farine dans le valiseau avec une pincée de sel. Versez l’iao
avec la levure. Mélangez. Complétez avec un gobillon de lait puis avec une
cuillerée d’huile pour obtenir une pâte bien lisse.
- Il est-y pas beau, môssieur Raymond, ce
pâton ?.
- Maintenant je vais vous le démêler à la
façon de mon grand-père…
- Oh oui ! Oh oui !
- Vous poussez la pâte devant vous avec la
paume de la main, c’est ça, poucéyez, vous repliez vers vous, vous donnez un
quart de tour à droite, vous repoucéyez, repliez, donnez un quart de tour et ce
pendant quatre bonnes minutes.
- Ca va vraiment monter après toute cette
pétrissure ?
- Mais oui, mais oui, ne vous bilez point. Voilà
qui est bien. On va la mettre à reposer au chaud près d’un radiateur pendant
trois quart-d’heures. Pendant ce temps, si vous le voulez bien, ma chère
Catherine, je vais vous emmener voir ma fabuleuse collection…
- …d’estampes japonaises ?
- … de fèves de l’épiphanie !
Trois
quarts d’heure plus tard :
- Oh ! Môssieur Raymond ! Comme
c’est gros et beilloux, maintenant !
- Eh oui, Catherine ! Grâce à vos mains
expertes, l’objet s’est développé et a pris des proportions admirables !
Prenez le rollet à pâtisserie !
- On va l’écabouir ? Quel dommage !
- On l’écabouit de manière à former un très
grand cercle, plus grand que la boursoule. Vous allez ensuite couper avec votre
eustache deux cent grammes d’amann si possible en neuf morceaux rectangulaires
que vous allez poser au centre du cercle de pâte. Ensuite vous pesez deux cent
grammes de sucre fin que vous frambayez par-dessus. Vous repliez ensuite les forrières
des quatre coins pour encrouiller beurre et sucre.
- Et après ?
- Après on se lance dans un feuilletage. Avec
le rollet, j’écabouis la pâte de manière à obtenir un rectangle trois fois plus
long que large.
- Comme ça ?
- Oui très bien. On replie en trois et on
donne un quart de tour. On recommence l’opération trois ou quatre fois en
veillant bien à ce que l’amann et le sucre ne se décrouillent pas.
- C’est bien comme ça ?
- Très bien, chère Catherine ! Maintenant
vous le positionnez dans la boursoule et je vais vous l’enfourner vingt-
minutes…
- Oh oui ! Oh oui !
- … à thermostat 240 °.
- Waouh ! C’est chaud ! Mais dites-moi,
môssieur Raymond, maintenant que l’objet est à cuire, qu’il nous reste à
ramasser le bourrier et à faire notre échauderie, c’est quoi un KadHB ?
- C’est un Kouign-amann de Haute
Bretagne !
- Qu’est-ce qu’il a de particulier par rapport
à un KadBB ?
- Celui-là, au bout des 20 mn, on le retourne
dans le grand coulvassier et on le réenfourne pour dix minutes !
- Ah oui, un petit supplément gratuit ? Un
« reviens-y faire des beluettes » ? C’est un tour de main de
votre grand père ? Une essespécialité régionale ?
- C’est surtout que mon fourneau est vieux et
qu’il chauffe plus en haut qu’en bas ! Ca permet de faire cuire le dessous
en le mettant cul par dessus !
30
minutes après :
- Voilà, ma chère Catherine, ce kouign amann
doré sur ses deux fesses, euh pardon, faces ! Comme il a l’air
goulayant ! Il est temps de passer à table et de royaumer. Mais, qu’y
a-t-il, vous faites la renfignouse, Catherine ? Vous êtes déçue ?
Quelque chose ne vous a pas plu ? Mais vous pleurez ?
- Ben oui, je viens de me rappeler que je vais
pas pouvoir en gaffer du KadHB à cause de mon cholestérol !
- Ce n’est pas grave, ma chère Catherine. Pour
vous consoler, je veux bien vous la montrer, maintenant, ma collection
d’estampes japonaises !
- Ah ? Vraiment ? Ben écoutez, je
suis désolée, mais…
- Mais quoi Catherine ?
- J’ai pus envie !
- Bouououh !
- Mais saperlotte ! Pourquoi vous
pleurez, vous aussi, môssieur Raymond ? pas pour les estampes quand
même ?
- C’est à cause du gâteau ! Je dois faire
mon renoncis, moi aussi !
- Vous avez du cholestérol ?
- Non. Moi, je ne peux pas en manger… à cause
de mon diabète !
V’la l’boute !