Pumpkin soup - Janeczka
Trois femmes s’affairent
dans la cuisine etroite. C’est un ballet improvise mais pourtant execute au
millimetre pres. Les portes des placars
sont ouvertes et refermees en un clin d’oeil en evitant nez et fronts. Les
tiroirs beants ne genent pourtant pas et elles les evitent avec autant d’aise
que de grace. Elles se demenent, parlant
toutes a la fois, comme des petits lutins cuisiniers. La plus grande d’entre
elle – pas la plus agee – ne depasse d’ailleurs pas le metre cinquante-cinq.
Il s’agit d’une mere et des
ses jeunes filles, reunies pour la pendaison de cremaillere de la mere, et pour
feter son nouveau travail et sa nouvelle ‘naissance’. Quoi de mieux que
d’inviter famille et amis autour d’un diner fait maison ?
Seulement voila, il est
presque une heure et demie et rien n’est fait...
- Hattie !
- Oui !
- Tu
peux t’occuper d’eplucher deux oignons et de les couper en cubes ?
- Tu as
un trancheur qui coupe bien ?
- Oui,
quelque part... Ellie, ca te derangerait de laver la vaisselle ? on a plus
une seule mangette de propre.
- D’accord...
Et la jeune femme se met a
la plonge pendant que sa soeur s’attaque aux fourneaux. Un ragout aux haricots
bubulle tranquillement sur un coin de la cuisiniere.
- Oh...
gemit Hattie, il fallait que maman choisisse les oignons qui piquent le plus...
Retenant ses larmes, elle fourre
le tout dans un nourchaud. Sa mere avait deja decoupe et evide une bonne part
de potiron, qu’elle s’empresse de deverser aussi. Sa soeur, pied nus, continue de laver et
rincer trancheurs, touillettes, piquettes, mangettes, et autres liquoires. Sa mere s’est eclipsee
pour prendre une douche.
- Tu veux
mettre du coriandre la-dedans ? demande Hattie.
- Oh,
non... j’aime le coriandre, mais pas dans la soupe aux potirons. Peut-etre de
la noix de muscade ?
Hattie ouvre un placard et en
retire une caisse pleine d’epices, en boite ou non... elle fouille dans tous
les coins et fini par trouver une ou deux noix de muscade.
- Il faut
aussi presser des oranges et couper des carottes... note-t-elle a haute voix. Ou
est-ce que maman a mit le gratteur ?
- J’en
sais rien... je le vois pas...
A defaut de gratteur, la
jeune femme utilise son trancheur et saupoudre la tambouille de minuscules copeaux
de noix.
- Et le
presseur ? pour les oranges ?
- Je viens
de le laver. Tiens.
Les oranges pressees, c’est
au tour des carottes. Peleur a la main, Hattie debarasse les legumes de leur
enveloppe et les decoupe en tout petits morceaux.
- Et un
carre de bouillon pour la route !
Armee d’une platouille, elle melange bien les ingredients, puis laisse la concoction mijoter dans son nourchaud, sans oublier de gouter regulierement.
La soupe est a point, les mangettes
a peine seches et l’hotesse fraiche et parfumee comme une rose que les invites
arrivent, trempes jusqu’aux os.
C’est un temps a se manger
une bonne soupe aux potirons faite maison !