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Le défi du samedi
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20 septembre 2008

Lorsque l’esprit… (Tiphaine)

Raymond s’ennuie. Ferme.

C’est pas que là haut ça manque de conversation mais il commence à en avoir fait le tour. Dédé Breton est toujours aussi intolérant, pas moyen de rigoler avec lui, faut toujours qu’il cause théorie… C’est vrai que la théorie, c’est ce qui reste quand on n’est plus qu’un pur esprit, mais quand même… c’est ennuyeux à la longue…

Le temps s’étire, le temps n’existe plus… Les temps mêlés, celui d’avant et celui qui dure, qui dure jusqu’à la Saint Glinglin… Et au-delà…

Raymond a causé avec Hegel aussi, quelques années, ça lui a rappelé ses études à la Sorbonne, parfois, il se tape une petite belote avec Jean-Sol, Boris et René qui pense donc il est. Ouais… Pas de quoi fouetter un chien avec les cordes de sa mandoline non plus, rien d’excitant, des conversations à n’en plus finir, et toujours cette foutue impression que le temps passe mais pour rien. Un dimanche de la mort.

Raymond s’emmerde. Ferme.

C’est pas que là haut ça manque de petites poulettes mais il commence à en avoir fait le tour. Janine bien sûr, sa Janine, mais aussi les Gala, les Odile, les Simone, les Sally et les Elsa, lalala… C’est bien beau l’amour platonique mais ça va cinq minutes. Pas plus. De toutes, façons, on est toujours trop bon avec les femmes… Quant on est un pur esprit, on regrette le temps où l’on avait un corps qui tiraillait peut-être avec les années mais qui savait tirer aussi… Et qu’est ce que c’était bon…

Raymond s’ennuie. Mortellement.

C’est pas que là haut ça manque de distractions pour un intellectuel en manque de vie. Il aurait pu lire ses cent mille milliards de sonnets, mais il n’en avait pas envie. En lisant vingt-quatre heures sur vingt-quatre ça lui prendrait deux cents millions d’années, l’avait tout son temps le Raymond… L’a fait sa psychanalyse avec tonton Sigmund, l’a partagé ses rêves avec Lacan, l’a joué aux dés avec Mallarmé pour voir si des fois il pourrait pas abolir le hasard, l’a même parié avec Pascal, si c’est pas du divertissement, ça…

Rien à faire.

Raymond s’emmerde. Mortellement.

C’est pas que là haut y’a pas d’ouvrage pour un bon gars qui voudrait rendre service. L’a débarrassé les champs de tout leur Chiendent, faut dire que c’est un spécialiste le Raymond, l’a fait avec méthode, l’a fendu les flots, l’a battu la campagne sans même lui faire mal, l’a fait pousser les fleurs bleues, l’a même retiré les enfants du limon, les enfants là-haut aussi, ils finissent par s’emmerder…

Raymond s’ennuie. Eternellement.

C’est pas que là-haut il ne peut pas écrire, l’en a écrit des romans, des pièces de théâtre, des poèmes merveilleux et des essais fabuleux. Mais à quoi bon ? Quand on est un pur esprit, on finit par comprendre que les mots n’ont pas de sens…

Et quand les mots n’ont plus de sens…

On s’emmerde… Eternellement.

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Commentaires
C
Zut ! Si le ciel est ennuyant, on va devoir ne pas mourir. Tant pis. On reste et on lit ici.
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T
Gilgamesh : aucune idée de ce qu'il en pense et pas non plus envie de le savoir!<br /> Poupoune : Merci!<br /> Adi : J'espère !<br /> Martine27 : qui a dit que ce n'était pas l'enfer?
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M
L'enfer est peut-être plus animé ?
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A
Très agréable à lire, et j'espère que depuis, Raymond a trouvé de quoi s'occuper!
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P
Très bon ! C'est très bien écrit et rendre l'ennui si agréable à lire, c'est une prouesse!
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G
Ah c'est sur, un monde sans femme physique...sans..<br /> Je comprends pourquoi j'ai pas envie d'y aller...<br /> Bon les purs esprits qui s'emmerdent.. fallait oser quand même. Qu'en pense Dalaï Lama..?
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T
Aude : Le cimetière de Sète est un bel endroit pour être enterré, qu'on soit à côté de Brassens, ou pas. A côté quand même, c'est chouette !<br /> joye : Jamais simone ne ferait une chose pareille ! De toutes façons, dans le paradis de raymond (est-ce vraiment un paradis?) y'a pas de pieds, donc pas de chaussettes...<br /> brigou, kloelle et rsylvie : merci beaucoup !<br /> Teb : oui, toujours à nous échapper d'une manière ou d'une autre...<br /> MAP : excellente idée!<br /> Janeczka : :-)<br /> Joe Krapov : Ce n'est pas la compagnie de Boris qui l'emmerde, quoi que... Il se trouve que Boris est un des hommes que j'admire le plus, je me demande si ça me plairait de passer l'éternité en sa compagnie... Je n'en suis pas si sûre.<br /> Comme tu en as de la chance de ne pas connaître la mort et comme je t'envie!<br /> L'automne à Pékin? Un rude hiver !
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J
- Si Raymond s'emmerde en compagnie de Boris, c'est qu'il a mal vieilli. Si les mots n'ont plus de sens là-haut, tant pis. Y'a pas que le blabla dans la vie ! Y'a aussi la trompinette !<br /> - Ah oui, mais Joe Krapov, c'est pas dans la vie, c'est dans la mort !<br /> - La mort ? Connais pas ! C'est du chinois pour moi ! L'automne à Pékin !<br /> <br /> P.S. A part cette petite réserve dubitative et taquine que j'émets, ton texte citatif est super bien écrit et très original.
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J
Un texte... divin!
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M
Il faudrait qu'il rencontre Raymons Devos !!!
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T
Les mots n'ont pas de sens ??? Sur terre, ils en ont surtout plusieurs...
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R
wahOU !<br /> "Quand on est un pur esprit, on finit par comprendre que les mots n’ont pas de sens"
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K
TRès bon texte Tiphaine..;J'ai eu grand grand plaisir à le lire. Vraiment.
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B
C'est vrai qu'on doit s'ennuyer ferme quand les mots n'ont plus de sens .... sympa ton texte.
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J
Et Simone ne lui aurais pas lavé les soquettes au paradis ? ;o)<br /> <br /> J'aime beaucoup ton texte ! Quand j'étais petite, j'avais décidé que le Paradis, c'était une grande bibliothèque où l'on avait le droit de lire toute la journée, et tout ce qu'on voulait, aussi. Je n'avais pas pensé à la possibilité de causer avec les auteurs !<br /> <br /> Bravo pour ton texte, il me plaît beaucoup.
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A
J'ai connu une femme dont le mari était enterré près de Georges Brassens. Elle en était heureuse, elle les imaginait même jouer à la belote ensemble.
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T
Berthoise : Vivons heureux, n'attendons pas la mort!<br /> Val : Malin comme il est, Raymond a sans doute trouvé le moyen de ne plus s'ennuyer, ce texte appellerait une suite sans doute ! Et comme je ne l'écris pas, je te laisse l'imaginer !
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V
Je n'aurais jamais imaginé que Raymond puisse s'ennuyer là haut. <br /> Soit! Il s'ennuie! <br /> <br /> Comment tu le sais? <br /> Ah oui! C'est vrai. Toi et Dieu... ;)<br /> <br /> J'ai beaucoup aimé ce texte :D .
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B
Vivons heureux en attendant la mort.
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T
Papistache : Il me reste une bouteille de Fragolino si vous voulez rencontrer Dieu !<br /> La place des femmes dans mon ennui? <br /> Heureusement, il ne s'agit pas de mon ennui mais très éventuellement de celui de Raymond (Queneau faut-il le préciser?) qui eut l'audace de publier sous le pseudonyme de Sally Mara le délicieux : "On est toujours trop bon avec les femmes". A lire ou à relire sans modération de même que Le Chiendent (mon préféré, il s'agissait d'après Queneau d'illustrer de manière littéraire le discours de la méthode de Descartes) , Le chien à la mandoline, les enfants du Limon, Les Temps Mêlés, Odile, La Saint Glinglin, Le dimanche de la vie, Les fleurs bleues, Battre la campagne, Fendre les flots...<br /> Bizarre, vous avez dit bizarre? ;-)<br /> Tilleul : J'aimerais bien...
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T
En lisant ton texte, on ne s'ennuie pas... tu as trouvé des mots qui ont du sens...
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P
Alors c'est sur Terre qu'on serait le mieux, il faudrait donc profiter de ce que on a.<br /> Tout bonheur que la main n'atteint pas serait un leurre.<br /> Vous faites bien de le dire tant qu'il est encore temps.<br /> Il vous reste des olives, on apporte le fromage et s'il n'y a pas de vin on boira au ruisseau.<br /> <br /> Bizarre quand même la place des femmes, dans votre ennui, bizarre !
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