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Le défi du samedi
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6 septembre 2008

L’Odyssée pour les nuls : extraits 1 (Joe Krapov)


Ce texte fait suite à « Une consultation intersidérante »

PROLOGUE

La chaise percée de Louis XIV était ravie ! Ce médecin de Montparnasse lui avait révélé tant de secrets sur elle-même, tant débloqué les neurones et tellement bien surtout décrispé la charpente qu’elle se demandait comment elle avait pu, si longtemps, rester à moisir dans ce musée poussiéreux et surtout se tenir autant éloignée des progrès que la psychanalyse avait effectués depuis l’époque de Louis XIV.

Mieux ! Elle avait fait d’une pierre deux coups ! A peine le docteur Dingo lui avait-il révélé que le cercle parfait découpé au milieu de son siège était en réalité une faille dans le continuum spatio-temporel et non un attrape-mouches pour le fessier royal de monseigneur Louis L’Etat qu’au sortir du cabinet médical elle avait pris langue sur le trottoir avec le chef Viking. Celui-ci, en complément de programme, lui avait révélé la raison de sa présence, de leur présence en ce bas monde.

La chaise percée de Louis XIV était complètement ravie. Trois d’un coup ! Pour sa première mission elle s’était propulsée, en plongeant dans sa propre faille, trois siècles en arrière. Elle s’était retrouvée à la braderie de Bellou-sur-Huisne, un vide-grenier en fait, posée sur un bout de trottoir entre un coffre viking, une bitte d’amarrage bariolée, un siège de bébé pour bicyclette, un vieil aspirateur, un confessional à rideau de velours rouge et une cage à rats.

Il faisait un temps superbe, un grand ciel bleu sans nuages, et un soleil tout lumineux noyait la foire aux puces dans une clarté blanchâtre. Réunir des conditions atmosphériques aussi idéales constitue toujours un défi pour les samedis de Normandie et de Bretagne. Papistache, Janeczka et Val qui venaient de se faire prendre en photo pour montrer leur bobine aux copines et leur bel entrain aux copains tombèrent en arrêt devant cette accumulation d’objets hétéroclites. Les deux filles portèrent d’abord une attention non désintéressée à la bitte d’amarrage des années 70 qui cadrait bien avec le style pattes d’éph et col roulé de l’époque et dont les couleurs psychédéliques rappelaient la Rolls des Beatles et les lunettes d’Elton John. De son côté Papistache s’intéressa à la cage à rats jusqu’au point de demander à son vendeur, un dénommé Bruno, s’il fallait mettre du tord-boyaux ou du Bondard dedans pour attraper des gros mastards. Tous les trois se tournèrent ensuite vers la curieuse chaise percée aux pieds enrubannés de pièces de monnaie.

Et après que Val en eut touché le bras, tous trois s’étaient trouvés aspirés dans la faille spatio-temporelle exactement comme Alice dans le puits sans fond au fond de son jardin. L’aventure merveilleuse pouvait dès lors commencer.

CHANT XII

Plouf ! Plouf ! Plouf ! Val, Papistache et Janeczka sont dans un bateau. Tous trois tombent à l’eau. Qui les repêche ? Qui, sinon Ragnar le Viking ?! C’est ainsi qu’en compagnie de ses deux acolytes préférés Janeczka se retrouve à bord du drakkar miniature qui l’intriguait tant, depuis deux semaines, qu’elle en a quitté sa blanche Albion, son doux Crouton et son lutin mignon pour trouver la solution de sa disparition.

Le drakkar, de fait, est gigantesque. L’immense voile claque dans le vent de la grande bleue : elle est aux couleurs de la Pologne, blanche et rouge, à rayures verticales. Les Polonais, fort peu sobres de nature, aiment le prénom Janeczka qui signifie « exhubérance » et tout ce qui est à 90° : la vodka, l’alcool et le drapeau national qui a pivoté d’autant pour devenir voile et prendre le vent.

Le comité d’accueil aussi est surprenant. Outre la trentaine de Vikings qui constitue l’équiparéopage de Ragnar, il y a là trois types à l’air bourru, le chef couvert d’un chapeau noir, et une demoiselle frêle d’épaules, vêtue d’une robe rose et coiffée de macarons qui la font ressembler beaucoup plus à la Sheila de la période couettes qu’à la princesse Leïa de la période « It’s a long way to tupperstarware I hun pour attendre coulé ».

Aussi bizarre que cela puisse paraître, il s’agit bien d’Isaure Chassériau que nous retrouvons ici en compagnie des trois frères Park : Luna, Central et Jurassic. C’est bien elle qui semble commander à toute chose sur le navire de Ragnar et c’est bien entendu à Papistache qu’elle s’adresse, non à cause de son autorité naturelle, mais bien parce que Val et Janeczka sont tout émoustillées d’être en compagnie si virile : jamais elles n’ont vu autant de Vikings aussi séduisants d’un seul coup !

- Vous voudrez bien nous excuser, Papistache, déclare Isaure, mais le projet Tornado avait besoin de vos services à tous les trois. Votre immersion – c’est le mot ! - dans cette partie de l’espace-temps a sans doute été surprenante, voire humide, mais cela vous a permis de constater que les bains dans la Méditerranée du VIIIe siècle avant Jésus-Christ sont aussi agréables que ceux que l’on peut y prendre au XXIe siècle. Il y a moins de méduses, moins de touristes ici et sans doute une meilleure compagnie et en tout cas plus de dépaysement qu’au Cap Nègre, vous ne trouvez pas ?

- Certes, je n’en disconviens pas, gente-demoiselle-qui-ressemble-à-Sheila-période-couettes, mais voyez-vous, nous ignorons ce qu’est ce projet Tornado dont vous parlez. Pourriez-vous nous informer de ses grandes lignes ?

- Tornado ? Tornado ? Vous vendez des aspirateurs ? demanda Val. J’en cherche justement un, de préférence sans sac !

- Cent sacs ? C’est un peu cher ! commenta Central Park. Vous êtes prête à mettre ça ?

Isaure les interrompit pour briefer à nouveau le mari de Mamoune et le papy de Mowgli qui ne faisaient jamais qu’une seule barbe à quinze points ce jour-là, comme les autres jours, du reste.

- L’opération Tornado est un projet de l’Université de Rennes 3. Les frères Park et moi-même avons pour mission de retourner dans des époques plus ou moins reculées pour porter secours à des femmes plus ou moins célèbres et aussi, hélas, plus ou moins maltraitées.

- C’est sympa, intervint Janeczka. Mais si vous changez des choses dans le cours du passé, ça modifie peut-être des choses dans la bourse du présent, non ?

- Pas forcément ! Pour cette opération-ci, par exemple, on ne fait que raccourcir les délais de durée d’un récit sans rien changer du tout à la légende d’Ulysse.

- Attendez, demoiselle-qui-parlez-d’Homère-et-de-l’Odyssée, vous voulez dire que nous sommes réellement à l’époque d’Ulysse ? Je veux dire d’Homère ?

- Non ? Simpson ? On est dans un épisode des Simpson ? demanda Val tourneboulée par les tresses blondes.

- Non, Val-qui-regardez-trop-la-télé ! Continuez de folâtrer avec cet hidalgo-nordique-à-moustaches-et-à-tresses, je vous expliquerai après.

Comment ! s’écria Joe Krapov, j’ai déjà rempli quatre feuillets manuscrits et je ne suis pas encore entré dans le vif du sujet ? Je ne vais jamais avoir le temps de finir ce récit ni de taper tout ça avant vendredi soir ! Et il va encore falloir que je découpe mon texte en deux épisodes ! Ca devient lassant, à la longue, ces romans-feuilletons ! Tant pis, je vais zapper la scène d’exposition. Ca ne fera qu’intriguer davantage le lecteur !

CHANT XIII

Le drakkar s’était immobilisé pendant la nuit à l’arrière de l’île d’Ogigy. Les Vikings mirent une chaloupe à l’eau et Janeczka se laissa glisser dedans sans un bruit. On lui passa le coffre Viking, réplique exacte de celui qu’elle avait remarqué à la boutique d’antiquités de Binsvard et qu’elle avait retrouvé ensuite à Bellou-sur-Huisne. Elle se mit à ramer en direction de la plage se sable fin. Cette histoire de drakkar, de chaise percée, de Méditerranée et de raccourcissement de la durée de l’Odyssée commençait à lui plaire énormément. Ca la changeait de ce drôle de bahut en Angleterre et ça lui rappelait les angoisses et les joies de l’apprentissage de la conduite automobile. Elle venait juste d’avoir son permis et on lui demandait ce jour de piloter un espace-temps, de le mener dans une direction imprévue, de réécrire, carrément, un épisode d’un récit mythologique mondialement connu. Elle s’en allait, toute seule, du haut de ses 27 ans et de son mètre 26 – sans les talonnettes ! – changer la vie d’Ulysse avec comme seules armes son large sourire et un chargement de chapeaux dans une malle ! Elle eut une pensée fugitive et se mit à sourire d’un seul coup, comme elle le faisait si souvent à la fin de ses vidéos au son pourri mais assumé. Elle venait de s’imaginer un nouveau dialogue avec Val :

- Dis, Val, est-ce que c’est encore loin l’Homérique ?

- Tais-toi et rame ! » répondait la voix de sa sirène préférée.

La suite de cette épisode s’intitule « L’Odyssée pour les nuls : extraits 2 »

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Commentaires
J
Merci pour le tuyau sur Jasper Fforde, Martine. Je ne connaissais pas. Je vais me précipiter là-dessus, tu penses bien !
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M
Voilà, ça y est tout lu ! Connais-tu Jasper Fforde (oui avec deux F, sûrement celui perdu par la rappeuse) parce que tu pourrais lui donner des trucs pour ses propres délires temporelles. Attention quand même de ne pas trop attirer l'attention de la chrono-garde, elle n'aime pas trop qu'on fasse joujou avec les oeuvres littéraires. S'il y avait eu la même version pour l'Iliade je me serais sûrement moins enquiquinée à la lire !
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J
Tout comme pour l'Iliade, je viens de me rendre compte que j'aurais dû commencer par la fin.<br /> <br /> C'est loin d'Homérique !!!<br /> <br /> Arf, Joe Krapov, tu me mets dans tous mes États !!!
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B
Première lecture effectuée.. j'attends la suite !
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J
5 pieds tout rond(s)!
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W
Midi ? J'y serai !<br /> Vous auriez quand-même pu toiser Janeczka en pieds et pouces, c'eût été moins brutal.
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T
Que d'humour!<br /> J'aime beaucoup les dialogues... surtout les réponses "à la Papistache"!<br /> P.S. Pour être sûr de l'aboutissement de la "mission", vous n'avez peut-être pas choisi les bonnes personnes...
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M
Que de clins d'oeil à chacun et chacune !<br /> Joe, le jongleur de mots ...<br /> Toujours aussi EXTRA !
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V
Comme Janeczka: les grands classiques ont été révisés, on dirait. J'ai beaucoup sourit en retrouvant des choses familières dans ce récit. <br /> Bravo pour l'investigation! <br /> Vivement la suite :D .
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P
La tête du producteur à la lecture du scénario !<br /> Ça va coûter une fortune.<br /> <br /> A moins qu'ils ne trouvent un trésor pour s'autofinancer.<br /> <br /> On verra vers midi, midi une !<br /> <br /> Quelle verve !
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J
Homer... d'alors. :P<br /> Rhalala, mais par ou je commence? <br /> 1m26... mouarf!<br /> Le son pourri, c'est pas sur toutes les vids, quand meme :P<br /> Oh, et puis Val et moi en admiration devant une bitte... t'as bien fait tes devoirs de vacances, on dirait!!<br /> Vite, la suite!
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J
Si la mer est bonne, la suite sera livrée à midi !<br /> Merci d'être parvenue jusque là, Aude : le pire est à venir !
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A
C'est où la suite?
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