Ont trempé leur plume d'oie dans l'encrier
Venise ; Pascal ; Laura ; Vegas sur sarthe ; Tilleul ;
Thérèse ; JAK ; Walrus ; bongopinot ; petitmoulin ;
Joe Krapov ; joye ;
Venise ; Pascal ; Laura ; Vegas sur sarthe ; Tilleul ;
Thérèse ; JAK ; Walrus ; bongopinot ; petitmoulin ;
Joe Krapov ; joye ;
Ha, ma reine… Tu peux te ceindre avec tes restes de charme, le poids de ta couronne est le poids de toute mon hypocrisie ; la brillance de ces diamants est l’éclat de mes silences ; la couleur de ces pierres est la pâleur de mes sournoiseries.
Ha, ma reine… Si j’additionnais toutes les secondes, toutes les minutes, toutes les heures, tous les jours, tous les ans, tout ce temps de reconquête, pour avoir les seules faveurs de ton entrecuisse autorisée…
Au garde-à-vous du samedi soir prometteur, dans notre maison bleue, combien de fois, dans la journée propice, ai-je lavé la bagnole, tenu avec brio les manettes du barbecue, échangé des propos affables avec tes invités, débarrassé la table, amusé les gosses, sorti le chien, fait la vaisselle, les courses, le ménage, etc, avant de subir ton mal de tête, comme une nouvelle Bérézina ? Combien de fois ai-je bu pour taire ma dépendance, pour m’obliger à ne voir, dans ton approximative silhouette, qu’une sirène aux gestes alanguis, en noyant d’alcool ce présent sans falbala ? Combien de fois ai-je été affabulateur, dompteur d’ours, protecteur, charmeur, piètre romantique cherchant ses rimes niaises avec : « tu baises ? », miroir captieux pour mentir que tu es toujours la plus belle, et tous ces costumes de cirque dont je m’affublais pour être au plus près de ton présent et de mes augures ? Combien de fois ai-je mis de l’eau dans mon vin, ai-je tu mes réflexions, me suis-je éloigné de ce que j’étais vraiment pour satisfaire encore et encore mes bas instincts de reproducteur ?...
Ma reine, seul comptait l’écartement de tes cuisses. Je t’aimais grandeur nature ; je voulais seulement te culbuter, c’était ma passion. Je voulais que tu transpires, que tu râles du Bonheur, celui dont j’étais le seul détenteur ; toi, tu voulais des enfants, c’était notre deal. Moi, je voulais des frissons sur ta peau, ceux qui engendraient des griffures sur la mienne comme des belles décorations d’amant généreux ; toi, tu demandais grâce parce que ci, parce que ça, parce que les voisins, parce que demain, parce qu’il faut être sage, etc. Jamais je n’étais essoufflé, j’aurais reculé la nuit et ses frimas pour qu’on dure éternellement ; je murmurais : « encore », tu disais : « on dort »…
Commandé par je ne sais quel démon de séduction, si tu savais tous les plans de comète que j’ai montés, toutes les ruses que j’ai utilisées, tous les mensonges que j’ai déployés pour arriver à mes fins. Comme un chien léchant sa maîtresse, tes maux d’orgasme étaient ma seule récompense. Avec toi, j’ai dû affronter les affres de l’Amour et ses armées de tourments ; j’ai dû patienter devant les grimaces revenantes de tes simagrées ; j’ai dû dormir et redormir devant ta porte ; j’ai dû rêver de femmes bien plus évanescentes que toi ; j’ai dû te tromper mille fois sans jamais franchir le pas…
Et toutes ces bouteilles de champagne entamées, sans une seule caresse pour n’avoir jamais envie de les reboucher, et tous ces restaurants au guide Michelin pour tenter de nous retrouver main dans la main, et tous ces bouquets de fleurs, comme des ornements de séduction bariolés, aux parfums envoûtants et toutes ces vacances, au bord de mer, que le seul plaisir voyeur de te voir changer de maillot de bain…
Ha, ma reine…. Fallait-il que je sois tellement sourd pour n’écouter que tes discours ? Ta voix avait-elle tant de pouvoir pour que je remette à d’autres calendes le plaisir de nos gymnastiques de plumard ? Tes calculs savants étaient mes erreurs de géomètre, tes « non » revenants étaient mes contretemps, tes pas de côté, tes dérobades, étaient ta danse de l’esquive ; tes couleurs du temps devenaient mes réalités d’impressionniste sans talent. Combien de fois, enfermé dans ta camisole, ai-je espéré reprendre Arcole ?...
Ha, ma reine… Fallait-il que je sois tellement aveugle pour ne voir en toi que la génération suivante ? Mes seules empreintes sur cette terre sont ces enfants que nous avons eus ; je ne sais pas si je dois être fier de ces gamins qui pianotent sur leurs portables, qui fument des joints et qui discutent de leur prochain tatouage. Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond au royaume de la descendance. Il me semble que j’ai été berné par dame Nature, qu’elle m’a baladé par le bout du… nez, alors que je croyais être devenu le grand patriarche des années futures…
Ha, ma reine… Hier, ébloui, subjugué, irradié, dompté, aujourd’hui, je ne vois dans tes yeux que le poids des ans, l’insomnie habituelle, le hasard des plats réchauffés et les feuilletons insipides de la télé. Quand je parle de nous, je parle à l’imparfait ; c’est le seul temps qui sied le mieux à notre banale vie privée. La plume d’oie s’est envolée, l’encrier s’est tari ; les arbres ont grandi, j’ai rapetissé ; le soleil est éblouissant, je ferme les yeux. Dans mon slip, il n’y a plus de feux d’artifice ; dans ta culotte, il n’y a plus le ciel bleu ardoise pour les magnifier. Si un jour, tu as envie, va faire un tour dans le Grenier des Anges parce qu’à cette heure de défaite, ma tête est plus irriguée que mon sexe. Je suis prisonnier dans ce temps morbide, handicapé du cœur, indigent des gestes de tendresse, seulement troublé entre l’ennui oppressant et le désespoir de tout ce que j’ai manqué…
Avec tout ce temps cavalier, avec toute cette peine de hussard, à l’assaut trop souvent vain de tes barricades, j’aurais pu faire le tour du monde, grimper sur la plus haute montagne et descendre dans les plus profonds abysses. J’aurais pu rencontrer la rigueur des hivers polaires, goûter les plats les plus exotiques, visiter des palais de glace, courir sur la ligne de l’équateur, dormir sous des aurores boréales, compter les orangers d’Irlande, traverser l’Atlantique, découvrir l’hémisphère sud, aux seuls alizés de mes soupirs heureux et tout recommencer, sans jamais le devoir à personne…
Pascal.
Bonne Année à toute l’équipe du Défi et à tous les défiants.
Dans Le grenier des anges, il y a mon petit train de mon enfance
Que je voudrais offrir à mon ingénieur préféré: un relais-symbole
Il doit y rester aussi une lettre écrite avec L'encrier d'un peintre
Qui changea une timide jeune fille gauche timide en fière amante.
Je me suis allongé sous Les orangers pour finir Irezumi un polar
Japonais qui mêle intrigue fine et psychologique et culture nippone.
Mes paysages Grandeur nature dépasseront-ils un jour la dérive
De mes rêves de découverte paysagère et picturale? Serais-je un jour repue?
Irais-je un jour jusqu'à l'Hémisphère sud tester les limites de ma curiosité?
Y chanterais-je une Maison bleue en grattant une guitare de Georges Braque?
Passion et savoir sont les mamelles de ma résistance aux souffrances.
Je me souviens de La plume d'oie qui traçait sur moi confiance et plaisir
Si les Couleurs du temps blanchissement peu à peu mes cheveux
Ma soif d'apprendre est de plus affûtée par l'incompréhension crasse
Vie privée n'est -il pas un titre de film ou une limite à ne pas dépasser
Dans ce poème qui hésite entre culture et nature, entre campagne et ville?
Je m'arrête en haut de la colline et je regarde le Bleu Ardoise des toits
D'une cité qui mêle tous mes paysages passés parcourus et lus.
Je lirais toujours la presse sans me soucier de leur orientation
Je noircirais mes doigts à l'encre de tes yeux qui me cherchent.
Comme chaque été, nous nous retrouvions mes frères et moi, en vacances chez mes grands-parents. Ce n'était pas l'hémisphère sud, parfois le soleil boudait mais nous adorions ces jours où le ciel montrait grise mine. Après un copieux petit déjeuner, nous nous enfermions au « grenier des anges », une mansarde surnommée ainsi par mon grand-père – sans doute nous trouvait-il bien sages... Là, étaient stockés de véritables trésors. Chiner était la passion de ma grand-mère. Sur un vieux secrétaire, la plume d'oie, ramassée lors d'une balade à la ferme voisine, trempait dans un vieil encrier de bronze. L'encre bleue ardoise avait séché depuis bien longtemps mais nous aimions jouer à faire semblant, tantôt j'étais marquise, tantôt j'étais reine et prenait plaisir à diriger mes valets...
Dans un coin, une Marianne grandeur nature, donnait l'impression de surveiller nos moindres faits et gestes. Elle avait longtemps trôné au milieu d'un parc, au temps où mes aïeux, jeunes mariés, habitaient une petite maison bleue. Ils avaient emporté la statue en changeant de demeure. Elle était dans le grenier provisoirement avant de retrouver une place dans le nouveau jardin... Le provisoire était devenu définitif...
Sous la toiture, à l'endroit où il fallait se baisser pour avancer, il y avait un grand coffre noir. Nous aimions fouiller ses secrets... Des vieux chapeaux, des photos jaunies, couleur du temps qui passe, montraient bon-papa et bonne-maman tout jeunets... A l'arrière d'un cliché, on pouvait lire « promenade d'un dimanche dans l'allée des orangers »... Il y avait un paquet de lettres aussi, serrées par un ruban de satin bleu. C'était sans doute le courrier échangé par mes grands-parents au temps de leurs fiançailles mais nous n'avons jamais lu ces missives, par respect pour leur vie privée. Pour des enfants, les grands-parents ont toujours été vieux. Il était dès lors difficile d'imaginer que papy et mamie aient pu être de jeunes amoureux...
La rentrée des classes approchant, nous repartions le cœur gros mais la tête remplie de doux souvenirs en attendant les vacances suivantes...
N.B Je n'ai pas connu mes grands-parents... Aujourd'hui, je suis mamie et j'aimerais que mes petits-enfants gardent de tels beaux souvenirs de leurs vacances chez moi...
Dans le soir qui commençait à ourler d'ombres la campagne environnante, il avait d'abord cru à un mirage qui dansait dans les lumières du couchant. Une fille aux longs cheveux d'or s'avançait dans une robe aux couleurs du temps sous les hauts arbres de la forêt.
"Viens !", lui dit-elle.
Et sans plus réfléchir ni poser de questions, il lui prit la main et la suivit sans un mot.
Ils arrivèrent au milieu d'une clairière devant une maison bleue qui semblait flotter hors du temps. Et là, bien à l'abri des regards indiscrets, durant toute une saison ils s'aimèrent d'une passion dévorante tandis que des orangers au parfum sucré semblaient monter la garde devant leur porte, protégeant ainsi leur vie privée. Pendant qu'ils apprenaient ainsi à se connaître, des rosiers odorants s'élevaient vers le ciel, des glycines, rivalisant avec le lierre, s'enroulaient amoureusement sur les murs. Et la rivière chantait...
Dans le matin naissant, ils partaient à la découverte de leur royaume. Elle lui apprit le nom des fleurs qui poussent sur les talus, les timides qui se cachent sous les brindilles, elle lui expliqua le nom des plantes qui soignent, elle lui montra la force paisible qui émane des grands arbres, et jusqu'au moindre des cailloux qui roulent dans l'eau claire. Et la rivière riait...
Puis un soir, à l'heure incertaine où le couchant magnifiait le ciel dans une farandole de couleurs extraordinaires, un soir funeste où les nuages se déchiraient en longues traînées bleu ardoise, mêlées de pourpre et d'argent, elle lui dit : "Le temps est venu pour moi de partir mais il ne faut pas que tu sois triste. Tu dois me promettre de ne pas pleurer. Dès demain, monte jusqu'au grenier de cette maison et tu y trouveras de quoi écrire. Alors, pour ne pas oublier notre histoire, je veux que tu l'inscrives sur le papier : ce sera notre souvenir à tous les deux. Et il n'en sera que plus beau."
Malgré son chagrin, il écouta la belle mystérieuse et, à l'aube, il monta les marches qui le conduisirent dans un endroit secret. Les yeux écarquillés, il découvrit avec surprise un sol jonché de plumes immaculées. Il s'avança d'un pas incertain avant de comprendre enfin qu'il se trouvait devant des ailes : des ailes d'anges, grandeur nature, des ailes perdues par des êtres qui avaient trop aimé sans doute et n'avaient pu les revêtir à temps, des ailes abandonnées là, le temps d'une pause sur terre. Toutes les suppositions les plus saugrenues lui passaient par la tête. Soudain, un courant d'air fit voltiger à ses pieds un fin duvet, telle une plume d'oie qui se mit à briller dès qu'il la ramassa. La caressant doucement, c'est alors qu'il remarqua, au centre de la pièce, un encrier aux couleurs arc-en-ciel. Etaient-ce les larmes des anges, déversées en ce réceptacle !?
Au loin, on entendait la rivière qui pleurait...
Malgré lui, il sourit à la pensée d'avoir aimé un être aussi pur, aussi beau, aussi parfait. Se souvenant de sa promesse, il trempa sa plume dans l'encrier et se mit à écrire... Dans sa tête, il entendait clairement la fille aux cheveux clairs : "Dis-leur que l'amour est plus fort que tout, apprends-leur ce que je t'ai dévoilé !"
Dès qu'il eut terminé, son esprit libéré, il referma en soupirant le grenier des anges.
C'était une maison bleue, aux confins de l'hémisphère sud, dans le parfum sucré des orangers des anges... Tout près de la maison, la rivière chuchotait...
Dans le Grenier des Anges
Mes mots grandeur nature
Que l'encrier capture
Et l’hémisphère sud mélange
Aux douces Couleurs du Temps
Et la plume d'oie bleu ardoise
Arrose de son encre turquoise
Tous mes mots à chaque instant
Puis le vent léger les dépose
Sur l’herbe tendre de mes souvenirs
Pour ne jamais les laisser mourir
Et les couvre de pétales de rose
Tout à côté de la Maison Bleue
Sous les Orangers de ma passion
Et ces mots comme une tradition
Se rassemblent formant des vœux
Et sans trahir ma vie privée
L’un de mes vœux les plus chers
Dans ce monde parfois austère
Est, que vous puissiez tous passer une belle année
La brume bleu ardoise
Est soudain traversée
Par une plume d'oie sauvage
En vol vers l'hémisphère sud
Tu n'entends plus
Que le souffle odorant
Du vent
Dans les orangers
Tu voudrais retenir les couleurs
Du temps de la passion
Déjà enfouie
Dans le grenier
Des anges ou des démons
Tu cherches des mots
Dans l'encrier du poète
Pour questionner la vie
Privée pour un temps
De ses chimères grandeur nature
La maison bleue ferme ses portes
Sur l'été
Qu’ai-je fait de ma vie privée ?
Je l’ai gardée pour moi, pour nous.
Une partie est au grenier,
Tout le reste aujourd’hui se joue
Car nous n’avons rien achevé :
Nous continuons d’être fous !
Chaque jour, c’est à l’encrier
Que je trempais ma plume d’oie ;
Sur le déclencheur, j’appuyais :
Je n'eus jamais d'ampoule au doigt !
Ah j’en ai rempli, des cahiers !
J’en ai pris, des photographies !
Avoir la passion du passé
A ce point, c’est de la folie !
Sous ce toit pentu, bleu ardoise,
Le grenier des anges fourmille
Des couleurs du Temps qui nous toise
Mais que malgré tout j’entortille
Dans mon lasso. Je les capture,
Je les enferme dans des boîtes.
De cette vie grandeur nature
J’ai fait une planète coite :
Tout est en ordre, bien rangé,
Pas de bordel – je suis trop prude ! -.
Traces d’étrange voyager :
Rien n’y vient d’hémisphère Sud,
Rien d’Irlandais, pas d’oranger
- Le climat là-bas est trop rude –
Ce sont des trésors tempérés :
Rien qui mérite qu’on le brûle,
Rien qui vaille d’être publié.
C’est notre vie, dans notre bulle :
Jamais nous n’avons habité
De maison bleue peuplée de fous ;
Une vie simple, en vérité,
Un « toi », un « moi » et voilà « nous ».
Ces morceaux de réalité,
A vous confiés, qu’en feriez-vous ?
Que vous dirait-il, ce viager,
Qui ne soit déjà obsolète ?
Ce sont des moments partagés
D’un bonheur tranquille et honnête,
Du théâtre jamais joué
Et nombre d’images de fêtes,
Des mots écrits en atelier :
Avec ça, on joue au poète !
On l’est peut-être bien, qui sait ?
Personne ne vient le dénier !
D’ailleurs, les anges archivistes
Qui farfouillent dans nos cartons
Si nous n’étions un peu artistes
Que feraient-ils à la maison ?
Et pourquoi sèmeraient-ils donc
Sur mes rimes, et ce, sans raison,
Ces Pénélopes sans galons,
Ces innombrables araignées
Qui tissent des toiles à foison
Par-dessus nos jeunes années ?
P.S. Je suis ravi que ces enseignes rennaises photographiées autrefois aient pu servir de support à cet atelier d'écriture. J'en remercie Miss Map et je souhaite une excellente année 2017 avec plein de bonheurs d'écriture, de réussite et de santé à toutes et à tous !
- Le Grenier des Anges
C’est là où tu manges ?
- L'Encrier
Est fendillé.
- Les Orangers
Fleurissent à Angers.
- Grandeur Nature
Nuit à l’écriture.
- Hémisphère Sud
Ma gnagnanitude.
- La Maison Bleue.
De Forestieux.
- Passion
Mon ablaquéation.
- La Plume d'Oie
Vient de l’Iowa.
- Couleurs du Temps
Peintes par Satan.
- Vie Privée
A besoin d’IV.
- Bleu Ardoise
D’une Abathudoise.
(eh oh, je ne moque pas, c’est son Lot)
-D'après une idée proposée par Joe Krapov
Et mon making-of.
On s'est rassemblé au bord de l'étang qui formait une ligne bleue
ardoise au loin sur l'horizon.
Il flottait dans la nuit une odeur d'oranger .
Un souffle d'air plus tendre prenait le chemin de la maison bleue .
Suis je vraiment sincère à lui dire ma passion ?
Ai je bien fait de lui dire que je prenais mes vacances dans l’hémisphère sud ?
Ai je eu tort de lui faire part de ma vie privée à l'aide de cette plume d'or ?
Qu'importe !! j'étais captive de ce grenier des anges .
Ce monde serait toujours là, grandeur nature vous dis je !!
L'étang couleur du temps n'avait plus rien d'énigmatique mais aussi réel que mes hésitations à engager la conversation.
Dans le grenier des anges habite un encrier
où viennent s'abreuver d'étranges plume d'oies
empruntées aux oiseaux émigrants québecquois
par quelque écrivaillon, troubadour oublié
Il rêve aux maisons bleues, à ses chers orangers
qui ont au fil des nuits pris les couleurs du temps
comme ses yeux rougis, fatigués, cécitants
rongés par la passion et le rhum arrangé.
De cet hémisphère Sud il ne lui reste rien
que des bouts de pampa, de rios bleu ardoise
les parfums entêtants de cette argentinoise
peinte grandeur nature, traces à main levée
Sur le coeur il a mis ces deux mots: Vie privée
dans ce grenier des anges où rêve un écrivain.
Il habitait une maison bleue, d'un bleu ardoise, un peu sombre, bien dans les couleurs du temps.
Installé dans le grenier des anges (l'endroit s'appelait ainsi parce que de pauvres créatures en gestation s'y étaient vues de vie privées par une précédente occupante, discrète faiseuse d'anges), il avait pensé qu'il viendrait à bout du pensum les doigts dans le nez.
Aussi,
Trempant dans l'encrier sa belle plume d'oie,
(Ce n'est pas ce qui manque par ces temps de foie gras)
Il entama ses vers comme on entre au combat :
"Les orangers de l'hémisphère sud poussent la tête en bas..."
Hélas, son deal tournait à la déconfiture
Et se révélait être un clash grandeur nature.
Jamais il n'avait eu passion pour la métrique
Et son alexandrin en jambes pléthorique
Défiait le vieux Boileau et son art poétique.
Hamelia est écrivaine, poète à ses heures.
Elle trempe journellement sa plume d’oie dans l’encrier maniant la parodie et la satire pour enchanter ses lecteurs, les porter à la réflexion au-delà de l’intrigue qu’elle développe dans ses Bestsellers.
La passion qui l’anime alors active son hémisphère sud. C’est ainsi qu’en riant elle désigne la partie cognitive de son cerveau. Le sud par analogie à l’allègre chaleur qui l’envahit dans ce moment-là.
Ce matin, le givre, tétanise ses pas dans le jardin. La rue n’est pas épargnée. Elle craint une escarmouche avec le sol, alors prudente pour ses os fragiles, elle se cantonnera dans son nid protecteur, hérité de son aïeule, où désormais elle coule des jours d’écrivaine, loin des mondanités
Présentement, La couleur du temps ne l'incite pas au travail, ce ciel chargé lui fait voir la vie en bleu ardoise, ceci, ajouté au scandale relatif à sa vie privée qui s’est étalée hier dans les médias, font que sa mélancolie s’accentue.
Elle est mal dans sa peau.
Pour tromper cette morosité, et pratiquer quelque peu d’exercice, elle emprunte les marches qui mènent au grenier des anges, ainsi nommé par son aïeule, collectionneuse de figurines d’angelots sculptés, d’archanges et autres chérubins. Certains anges sont impressionnants, grandeur nature si tant est que l’on puisse connaitre la taille exacte des anges
Ignorant ces sculptures qui pour l’heure ne l’intéressent guère, elle se dirige vers la tour, curieux arrangement de cette construction pseudo moyenâgeuse dont les fenêtrons offrent une vue élargie sur le paysage.
Le nez collé au carreau elle s'engouffre dans ses rêveries habituelles propices à sa créativité.
Des nuages palpables planent au-dessus du paysage tout blanc de dentelle.
Elle découvre au loin une maison poudrée à frimas.
Il lui semble à ce moment, revoir la belle maison bleue entourée d’arbres majestueux de sa Provence natale.
Autour de la maisonnée, elle distingue les plaqueminiers; leurs fruits, sous le givre, ont pris l’apparence des oranges de sa jeunesse.
Trop d’émotions la submergent, ses yeux se voilent, des larmes coulent comme pour chasser cette sombre nostalgie qui s’est incrustée en elle. Il lui revient trop de souvenirs…
Exaspérée, à l’instant même elle prend une décision, ferme et définitive, -lui semble-t-il -: dorénavant elle fera fi des perceptions destructrices du passé qui l’habite. Ne plus s’appesantir sur son égo, c’est la solution pour ne plus souffrir…
Mais hélas cette souffrance est justement la moelle qui l’irrigue, substance oh combien nécessaire à sa créativité, sa sensibilité en est imprégnée
Alors, elle descend de ses nuages et de son grenier retombe dans sa dépression, sorte de bipolarité qui lui permet d’exacerber son inventivité débordante d’idées.
Elle va exorciser cette souffrance.
Elle trempe sa plume dans l’encrier et ardemment, ébauche un nouveau roman sur son enfance, dont le titre est révélateur:
L’ANCRAGE INDELEBILE