La nuit dernière, j’ai rêvé de ma mère. Cela ne m’arrive pas souvent. Parfois, je l’entends prononcer mon nom juste avant de m’endormir, mais je ne la revois que rarement dans mes rêves.
Tout de même, cette nuit, je l’ai revue. Elle portait sa vieille blouse délavée par le soleil et son short denim qu’elle mettait pour aller traire les vaches dans la chaleur estivale quand j’étais enfant.
J’ai remarqué ses vieux tennis sales et troués, j’ai vu encore son petit orteil qui y jouait cache-cache, et puis Maman m’a dit qu’elle avait mal aux pieds, qu’il y avait quelque chose là-dedans qui l’embêtait.
- Assieds-toi, je te les ôterai, lui ai-je dit, et Maman s’est donc assise sur mon lit.
J’ai beau la regarder, je n’ai pas pu voir son visage, mais c’est souvent comme ça dans les rêves, je sais.
Et pourtant, j’ai entendu sa voix et j’avoue que cela m’a rendu très heureuse.
Je m’occupais donc à lui délacer ses chaussures et puis les enlever. Eh oui, elles étaient remplies de sable.
- Maman, où tu as été ? ai-je dit, surprise. Dans le désert ?
- Non, bien sûr que non, répondit-elle. Je marchais aux bords du fleuve Little Cedar.
- Oui ? Et que faisais-tu là ? De la pêche ? Tu cherchais des agates ? Est-ce que tu y étais avec Papa ? Je m’attendais à ce qu’elle me tende ses mains remplies de ces pierres rayées.
Mais Maman ne m’a pas répondu, et quand je regardais bien mon lit où elle s’était assise, il n’y avait personne. D’un coup, je me suis réveillée.
Franchement, je n’aime pas quand la tristesse me guette mesquinement au moment du réveil. C’est cruel, parce que je dois alors boire mon café et regarder l’aube glorieuse et insouciante sans pouvoir sourire. Pire, je n’aime pas traîner quand je suis de mauvaise humeur.
J’ai alors pris mon balai pour aller nettoyer le foyer, et là, j’ai pu éclater– enfin – de rire en voyant tout un tas de grains de sable sur le plancher devant ma porte.