La nuit, quand le marionnettiste dort, les marionnettes s’éveillent. Le Chevalier rejette son épée et s’extrait de sa lourde armure. Il n’est plus ce valeureux croisé qu’il incarne depuis tant d’années mais un homme jeune amoureux d’une princesse. Celle qui, enjambant ses jupons en haillons, cesse d’être Esmeralda par cette nuit sans lune.
Princesse, non. Femme tout simplement. Elle se hâte vers un rendez-vous galant, il le voit bien, le Chevalier, il sait qu’elle aime ailleurs. C’est Arlequin qui l’attend au creux de l’impasse et l’attire contre lui. Jamais lui, Chevalier de Montauban, vainqueur des Sarrasins, n’aurait cette hardiesse. Jamais en une nuit trop courte il n’aura l’audace d’exprimer sa passion.
Le marionnettiste les reprend en main dès l’aube pour les astiquer, les recoller tant soit peu, les frotter pour que leurs ors et leurs paillettes luisent. Le Chevalier voit bien que les yeux d’Esmeralda brillent plus fort et qu’Arlequin fanfaronne. Il voit aussi la douce Fée des Eaux, si pâle, si fluide, s’étioler plus encore chaque matin ; comme lui, elle sait lire l’amour des autres et cacher le sien pour cet Arlequin séducteur. Même si Pierrot, si beau dans son costume lilial, dépose chaque soir une rose devant la boîte feutrée où elle feint de dormir, elle est triste, de plus en plus triste.
Le marionnettiste, lui, ne voit rien que son agilité manuelle qui, sur scène, heurte le Chevalier à un Cyrano de comédie, ou envoie au ciel constellé d’étoiles, la fée diaphane. Une sorte de Mère Michel tricote au bord de l’estrade quand le spectacle commence, et elle commente les pitreries d’Arlequin, les prouesses du Chevalier, la beauté d’Esmeralda. Quelquefois, Pierrot la fait taire, car il chante à la lune. Et tout le monde écoute. Quand le marionnettiste, fatigué, éteint les lumières, il ignore que ses gigantesques poupées vivent pour quelques heures la vie des hommes. Et il ne comprendra jamais pourquoi, un matin d’été, il a retrouvé le Chevalier désarticulé dans la rigole voisine, comme s’il s’était tiré une balle dans la tête…
Il avait plu tout le week-end. Une pluie presque tiède.
C'était octobre, période, non pas de l'été indien, en nos contrées, mais de la mousson bretonne qui prend à la gorge et engorge les fossés où, sous les feuilles mortes, se cachent châtaignes et cèpes.
Mais si dehors ça tombait, dedans ça montait.
La pression, l'ambiance.
Les enfants n'en pouvaient plus de rester enfermés. Comme cloîtrés. Et au remède de l'enfermement et de l'ennui, le DVD n'est pas une solution. Juste une illusion pour d'amères désillusions. Même ET, Bach to the future, Beethoven... et encore moins Amadeus n'y pourront rien ! Vous connaissez la musique... Passer les trois quart d'heure, ça monte, ça monte. On s'énerve et les cinq dernières minutes deviennent infernales !
J'ai donc dit à ET et à ses petits amis musiciens, to phone home (cinéma!) and go out !
Et au lieu de s'user les nerfs optiques et les nerfs tout court sur un écran, j'ai sorti les pastels, les crayons de couleurs, les feutres, l'encre de Chine, les plumes, les pinceaux et le papier canson des grandes occasions. Toute la petite famille s'est attablée et on a dessiné. J'ai lancé un thème : Les bonhommes. Un classique. Bien sûr, on avait le droit aux arbres, aux fleurs, aux voitures et aux maisons ! Mais uniquement pour le décor.
Chacun s'est alors concentré, occupé à noircir et à iriser ses quelques centimètres carrés de papier blanc, bercé par le clapotis de la pluie contre la porte-fenêtre du salon. Personnellement, j'étais pris en étau par une bise intestinale tenace et un crachin tout aussi tenace qui glougloutait dans mon estomac... Comme si le poulet rôti du dimanche midi piaulait encore !
Pour ne plus l'entendre, j'ai décidé de mettre de la musique. J'ai alors farfouillé dans mes vieux vinyls. C'est alors que j'ai re-découvert les 45 tours, planqués derrière ma trentaine de 33. Plus petits mais plus véloces sur les platines. Plus aériens.
J'ai zappé les années 80 et j'ai pioché quelques sixties. Et pour rigoler, je les ai fait tourner chacun à leur tour. Toutes les six à dix minutes, je me levais pour changer de face ou de disque. Comme quoi, il est possible de marcher même lorsqu'il pleut.
les enfants ont tout de suite apprécié ces vieilles chanson et les craquements du diamant sur les spirales des microsillons qui accompagnent joliment la langueur automnale.
J'ai d'abord passé les quelques titres anglo-saxons, vestiges de ma maigre collection : Eight days a week, We love you, Nights in white satin, Massachussets...
Et puis je me suis lâché ! J'ai sorti quelques chanteurs français, presque oubliés. Adamo et Sa nuit, Guy Mardel qui N'avoue jamais, Leny Escudero et sa Ballade à Sylvie, Claude François et ses Même si tu revenais, Jean Ferrat et Sa montagne, Eddy Mitchell et son Good bye prêcheur...
Et puis sont arrivées Les Marionnettes de Christophe...
Tout s'est alors enchaîné. On s'est déchaîné.
Oui, sans préambule ni concertation, on s'est tous mis à chanter à tue-tête comme un seul choeur vibrato-wah wah. Et en plus de bonshommes en papier, on a sorti de la ficelle, du carton, de la colle... Nos bonshommes ont pris forme, car tout en chantant, on les a transformés en marionnettes.
Il avait plu tout le week-end mais comme ce week-end fut joyeux ! Ce dimanche, Christophe nous avait fait tourné la tête des dizaines de fois avec ces marionnettes !
Jusqu'au moment où, au-dessus de nos têtes, on a vu suspendue à son fil, comme une marionnette, une araignée qui descendait du plafond... Et nous ? Quels fils, quel marionnettiste au-dessus de nos têtes ?
...
Mais loin de perdre le fil et notre feeling, sans se défiler, on a recommencé de plus belle.
J'ai fini par empoigner ma guitare chantant jusqu'au soir :
Prends garde Qu'en refusant d'être la marionnette de l'un, Tu ne deviennes celle de l'autre. Car l'imbécillité se transvase A la vitesse du son. Ainsi font font font. Prends garde que la chanson Ne produise une génération De siphonnés à la pelle Mettant en péril ton éveil, Comme de vénéneux champignons.
Préambule:Une fois de plus je n'ai pas trouvé le temps de préparer un texte pour ce défi. Je vous adresse néanmoins celui-ci, que j'avais préparé et déjà publié surUn mot. Une image. Une citation.
Image de chez icanhascheezeburger.com
Le rideau vient de tomber.
Portant dans ses bras la croix de bois et les fils qui l’ont toujours maintenue et animée, Fantochina la marionnette, s’assoit et détend ses jambes. Le spectacle vient de se terminer et elle essaye, à grand-peine de reprendre sa respiration.
Cela fait maintenant près de vingt ans qu’elle se donne en spectacle et les représentations sont de plus en plus éprouvantes. Malgré la fatigue, Fantochina est triste. Elle vient d’apprendre que c’est son dernier tomber de rideau et qu’on lui retire son costume de scène. Elle est triste et la perspective de finir au fond d’une cave, couverte de poussière, abandonnée sur une vieille étagère, l’incommode au plus haut point.
Professionnelle jusqu’au bout des ongles, elle avait pourtant, comme à chaque fois, répété son spectacle. Pour chasser ce trac encore et toujours présent, malgré les années, elle avait aussi fait le vide dans sa tête pour habiter et incarner son personnage… Mais tout a une fin, et pour elle, c’est la dernière fois.
Si on me remplace, qui pour prendre la suite ? Qui reprendra le flambeau pour assurer le spectacle, amuser et réconforter notre jeune auditoire ?N’ayant pas la réponse, elle décide d’interroger son marionnettiste. Ils font équipe depuis si longtemps et ils se connaissent parfaitement.
« Écoute-moi, mon ami. Depuis de nombreuses années, nous jouons avec succès, et sans relâche notre petite comédie bouffonne. Jamais nous ne pourrons supporter le désœuvrement et l’ennui. Retapons notre vieille roulotte et reprenons la route comme à nos débuts.
- Ne rêve pas, ma pauvre ! De nos jours les routes ne sont plus sûres et nos bambins n’ont plus envie de mettre le moindre sou dans notre spectacle. De plus, tu es rongée par la vermine, tes articulations sont rouillées et couinent désagréablement, tes jambes sont vermoulues, tes vêtements sont mités, ton teint défraîchi… » La critique est hostile.
Plus la critique est hostile, plus l'artiste devrait être encouragé. Loin de se démonter, elle s’enferme dans sa loge et cogite. Elle se souvient d’une histoire extraordinaire que lui avait confiée la poupée de chiffon d’une habilleuse, rencontrée il y a longtemps, dans un théâtre quelconque.
Elle rassemble les bribes de sa mémoire et commence la confection d’un masque et d’un costume de scène. Elle y consacre toute sa nuit.
Au petit matin, elle réveille son marionnettiste et lui dit : « Je ne suis peut-être plus en état de me produire, certes ! Mais toi ? N’est-ce pas toi qui, en tirant les ficelles est le seul et véritable acteur de mon rôle ? Eh bien ! À ton tour de monter sur les planches, tu seras Polichinelle ! »
Et c’est ainsi que, Fantochina convainquit son possesseur de porter le masque qu’elle lui avait confectionné pour jouer le premier rôle.
De l’autre côté maintenant tu traverses dans le noir
Tes SMS n’arrivent plus et mon GPS se dresse droit comme un I dans mes nuits.
Je cesserai de pleurer, mais attention mon brisant s’est brisé.
Et je glisse en silence, ma vie se remplit d’asymétries
Dans ma boite à gâteau, j’épelle ton nom jusqu’à la dernière voyelle.
T’as pris la tangente t’as fait semblant de plus m’entendre
toi le frangin, moi la frangine ,on vire à l’oblique et ta citadelle
Deviens un repère de barbares.
Je suis un caillou solitaire au milieu d’un peuple de mouton gris.
Ma jumelle, mon double ma copie s’est fait la malle .et sur le pont j’ai envie de prendre la mer.
C’est ma dernière traversée, mais vois tu j’aime attendre !!!
Et en entendant le siècle suivant et qu’un millier de mouchoirs mouillés comme des oies s’envolent dans le ciel ……et docile j’attends l’aiguille du rouet le prince charmant.
Tu es là assis sur le même banc, je ne t’avais pas vue ,nos yeux se sont croisés
Les lucioles dans le noir et les petits anges d’un monde symétrique au notre ont guetté c e rouges aux joues dont les anges sont fous.
Nos destins parallèles, nos escalators ont fait rentrer par une sortie de secours notre amour.
J’ai beau savoir que les contines mentent elles collent à mon chagrin !!!!
C’est le temps de l’escale où le spleen caché sous nos paupières symétriques agitent leurs petits drapeaux blancs comme des vaincus.
Je n'aime pas la symétrie. Mais, direz-vous, quand tu contemples dans une glace ton corps parfait, C'est la symétrie qui triomphe! Mouais...A bien regarder, la Nature, comme si elle avait eu la prescience de mon aversion pour cette navrante régularité géométrique, pour cette ennuyeuse platitude des formes sans fantaisie, suivant un axe trop rectiligne, s'est amusée à parsemer tout mon corps de petites ingéniosités dissonantes... Pour me faire plaisir. Un petit grain de beauté par-ci, une tâche de naissance par là... deux oreilles pas tout à fait identiques . Un sein plus haut que l'autre...et caetera et caetera Je n'aime pas la symétrie. Comme Verlaine je préfère l'impair. J'ai trois enfants, Je n'ai qu'un chat, J'offre toujours cinq ou neuf roses Je trouve Versailles déprimant. Pas une fenêtre à gauche qui ne trouve sa consœur à droite... Pas un arbuste en pot, et pas une statue. Je lui préfère Chenonceau, le château clin d’œil, qui se mire, d'un pur bonheur dissymétrique, dans les eaux lisses de la Loire enamourée d'arbres et de ciel. Je n'aime pas la symétrie. Chaque jour, à 13:31 à 14:41 à 15:51 j'ai des palpitations et un léger vertige m'oblige à détourner les yeux de cette digitale et obsédante pendule... A 11:11 je défaille Je n'aime pas la symétrie. Je n'aurais jamais appelé ma fille hannah ou mon fils bob je ne vivrais pour rien au monde à Laval à Cazac ou bien à Noyon Je n'aime pas la symétrie
Si mes tris étaient bien faits Dans ma maison régnerait A tout jamais l’ordre parfait.
Si mes tris j’avais su faire Je saurais où trouver mes affaires Et sur quelle étagère j’ai rangé la théière.
Si mes tris avaient su trancher Un seul amour j’aurais gardé Au lieu de ces passades accumulées.
Si mes tris avaient été moins hésitants Je ne serais pas dans le brouillard maintenant Et saurais sûrement qui est le père de mon enfant.
Mais je n’ai pas assez réfléchi Je n’ai jamais su faire le tri. Cependant, je sais, je sens Que là, juste de l’autre côté du mur Mon double, en symétrie, assure.
Elle a su faire le tri nécessaire Elle sait où trouver sa théière Sa maison est bien rangée. Elle ne chérit qu’un seul amour Et leurs enfants qui les entourent.
L'homme est ingrat et irrespectueux des merveilles dont la nature l'a pourvu.
Si, de là-haut - puisqu'il parait qu'il 'crèche' en haut - Dieu parvient à entendre toutes ces expressions que l'homme a forgées dans son esprit tordu, il doit regretter d'avoir mis tant de soin à donner à ses bipèdes cette parfaite symétrie qui peut déclencher des sifflets d'admiration dans la rue et que certains qualifient de canon...
A quoi sert-il qu'il se soit décarcassé pour qu'aujourd'hui on oublie les concepts d'automorphisme, les similitudes, la pseudo-métrique de Minkowski, des trucs dont tout le monde se fout y compris moi!
Voici pour preuve quelque exemples du gâchis:
Dresser l'oreille:
Quand Adam s'éveilla au premier jour, il dressa une oreille. Non, il avait dû rêver... puisque la stéréophonie n'existait pas encore. Alors il la rabattit.
(à ne pas confondre avec rebattre les oreilles, ce que Eve savait très bien faire)
Jeter un oeil:
Caïn – et qu'en a deux – fils d'Adam et Eve se retourna dans sa tombe. “Qui a jeté un oeil?”
“Moi!” répondit Abel et son humour noir.
(à ne pas confondre avec l'Abel de Cadix qui en a deux de velours et bien symétriques)
Prendre son pied:
Si la mère d'Achille avait pu prédire 'la guerre de Troie' elle se serait abstenue de le tenir par un talon pour le plonger dans le Styx afin de le protéger des flèches de Pâris.
car Pâris sera toujours Pâris (Maurice Chevalier)
Prêter main forte:
On dit que le dieu celte Gargan (le Gargantua de Rabelais) prêta main forte à Jeanne d'Arc qui ne lui rendit jamais. Faites confiance aux pucelles!
Traîner la jambe:
Par expérience, traîner la droite ou la gauche revient au même, on se traîne.
Il faudrait être bête comme ses pieds pour prétendre qu'un droitier traîne mieux la jambe droite que l'autre.
Le contraire de traîner une jambe consiste à prendre les deux à son cou.
Avoir un bras long:
Se taper d'une main le creux du coude de l'autre bras que l'on plie alors en dressant verticalement l'avant-bras avec le poing serré n'a rien à voir avec le fait d'avoir le bras long: on appelle ça un bras d'honneur...
Faire deux bras d'honneur n'a pas de sens, autant se croiser les bras.
Parent de la fesse gauche:
Les cousins à la mode de Bretagne sont parents de la fesse gauche dit-on.
J'imagine qu'en politique les centristes se reproduisent plus facilement que les autres...
Si quelqu'un trouve ce texte un peu bancal, les réclamations sont à adresser aux Défis Du Samedi
Je ne t'aime pas quand tu es ta propre prisonnière.
Symétrie je t'aime et ne t'aime pas.
Je t'aime mettant de l'ordre dans la matière. Je ne t'aime pas réductrice et austère. Symétrie je t'aime et ne t'aime pas. Tu as deux visages et donc deux manières D'apparaître. Symétrie je t'aime pour la méthode que tu génères. Je n'aime pas quand tu règnes partout en maître. Pourtant honnêtement, je dois reconnaître Que dans la nature tu n'es pas présente plus que nécessaire. Seul l'homme quand il t'impose comme vérité unique et première Ferait mieux de se taire.